«Fadettes» du «Monde»: L'ex-patron du renseignement intérieur Squarcini jugé mardi
JUSTICE•Il est poursuivi pour avoir réquisitionné, en pleine affaire Bettencourt, les factures téléphoniques détaillées d'un journaliste du quotidien du soir...20 Minutes avec AFP
Bernard Squarcini, l'ancien patron du renseignement intérieur sous Nicolas Sarkozy, comparaît mardi devant le tribunal correctionnel de Paris pour avoir réquisitionné, en pleine affaire Bettencourt, les factures téléphoniques détaillées d'un journaliste du Monde.
Le 18 juillet 2010, le quotidien publiait un article mentionnant le procès-verbal d'audition de Patrice de Maistre. Le gestionnaire de fortune de l'héritière du groupe de cosmétiques L'Oréal, Liliane Bettencourt, y évoquait ses liens privilégiés avec Eric Woerth, alors ministre du Travail.
Jusqu’à cinq ans de prison et 300.000 euros d’amende
Contacté par le directeur général de la police nationale de l'époque, Frédéric Péchenard, Bernard Squarcini avait sollicité la réquisition des factures téléphoniques détaillées de l'auteur de l'article, Gérard Davet, pour identifier sa source. Ces «fadettes» devaient permettre au patron de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) de porter ses soupçons sur David Sénat, conseiller de la garde des Sceaux de l'époque, Michèle Alliot-Marie.
Bernard Squarcini, 58 ans, devra répondre du délit de «collecte de données à caractère personnel par un moyen frauduleux, déloyal ou illicite», passible d'une peine maximale de cinq ans de prison et 300.000 euros d'amende. Le chef d'atteinte au secret des correspondances par personne dépositaire de l'autorité publique, qui aurait signifié que les conversations du journaliste avaient été écoutées, a finalement été écarté par les juges d'instruction Sylvia Zimmermann et Alain Nguyen-The.
Bernard Squarcini dit avoir agi dans le cadre de la loi de 1991 sur le secret des correspondances, en particulier de l'article 20 qui en autorise le contrôle aux «fins de défense des intérêts nationaux». La violation du secret des sources était donc justifiée en l'espèce, selon la défense. Mais les juges d'instruction ont estimé que cet article «ne permet en aucun cas de recueillir des données individualisables, visant des personnes déterminées».
La révélation des déclarations de Patrice de Maistre lors de sa garde à vue «ne pouvait que justifier éventuellement» la saisine de la justice pour violation du secret de l'enquête, ont-ils ajouté. Selon les juges, s'agissant d'un journaliste, «aucun impératif prépondérant d'intérêt public ne pouvait justifier la collecte de ses factures détaillées».