Charte des langues régionales: les militants satisfaits mais «vigilants»

Charte des langues régionales: les militants satisfaits mais «vigilants»

Les défenseurs des langues régionales se sont réjouis samedi de l'annonce par Jean-Marc Ayrault de la relance du processus de ratification de la Charte européenne les concernant, tout en exprimant leur "vigilance" quant à sa mise en oeuvre.
Les défenseurs des langues régionales se sont réjouis samedi de l'annonce par Jean-Marc Ayrault de la relance du processus de ratification de la Charte européenne les concernant, tout en exprimant leur "vigilance" quant à sa mise en oeuvre.
Les défenseurs des langues régionales se sont réjouis samedi de l'annonce par Jean-Marc Ayrault de la relance du processus de ratification de la Charte européenne les concernant, tout en exprimant leur "vigilance" quant à sa mise en oeuvre. - Marcel Mochet AFP
© 2013 AFP

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Les défenseurs des langues régionales se sont réjouis samedi de l'annonce par Jean-Marc Ayrault de la relance du processus de ratification de la Charte européenne les concernant, tout en exprimant leur «vigilance» quant à sa mise en oeuvre.

«C'est une excellente nouvelle, mais nous serons extrêmement vigilants quant à la mise en application», a déclaré à l'AFP Tangui Louarn, président du comité français du Réseau européen pour l'égalité des langues, qui fédère les associations de défense des langues régionales.

Réclamée depuis plus de vingt ans par ces mouvements, de la Bretagne à la Corse en passant par l'Alsace et l'outre-mer, la mise en oeuvre de la charte, promise par le candidat François Hollande, a été relancée par le chef du gouvernement, qui s'est engagé à en accélérer la ratification, vendredi lors de la signature du Pacte d'avenir breton à Rennes.

«On ne peut ressentir que beaucoup de satisfaction, depuis le temps qu'on attendait ça», s'est réjoui samedi Justin Vogel, président de l'Office alsacien du bilinguisme et vice-président (UMP) du conseil régional d'Alsace. «J'attends que cela se concrétise, on a déjà été déçus tellement de fois», a-t-il cependant ajouté.

«C'est une bonne chose que l'Etat français admette la présence d'autres langues que le français sur le territoire», a déclaré pour sa part Jean-Philippe Antolini, porte-parole du parti nationaliste corse Corsica Libera, demandant lui aussi: «Quid de la suite ?»

«Nous nous félicitons de cette initiative que nous demandons depuis des années. Cependant nous disons +la charte, oui, mais pas que la charte+», a réagi de son côté David Grosclaude, élu de la région Aquitaine et président du Partit occitan.

Elaborée en 1992 et signée par le gouvernement Jospin en 1999, la charte n'a pas été ratifiée par la France, en raison notamment de problèmes d'ordre constitutionnel.

Jean-Marc Ayrault a toutefois jugé vendredi que le moment était «venu d'avoir ce débat au niveau du Parlement». Il a annoncé que «le gouvernement inscrira à l'ordre du jour prioritaire de l'Assemblée nationale» une proposition de loi constitutionnelle (PPL), laquelle pourra être examinée «le 20 janvier», selon le président PS de la commission des lois, Jean-Jacques Urvoas.

«C'est la première fois qu'une proposition de loi dans ce domaine est soutenue par le gouvernement», s'est réjoui samedi Fulup Jacq, directeur de l'Office public de la langue bretonne.

Fracture dans tous les partis

Déconseillée par le Conseil d'Etat et strictement encadrée par le Conseil constitutionnel, la ratification de la Charte européenne exige un marathon législatif impliquant une modification de la Constitution.

«En l'état, la proposition de loi se réfère à des clauses interprétatives du Conseil constitutionnel qui risquent de verrouiller la Constitution, faisant plus de mal aux langues régionales que le flou actuel», estime M. Louarn. Selon lui, «il vaut mieux attendre que les mentalités soient prêtes» plutôt que de voter une loi insatisfaisante.

Ces clauses, qui se réfèrent aux articles 1, 2 et 3 de la Constitution et réaffirment la primauté du français, sont évoquées «pour faciliter l'adoption de la PPL constitutionnelle, qui nécessitera les trois cinquièmes du parlement réuni en congrès», explique Paul Molac, député apparenté EELV du Morbihan et soutien de ce texte.

Son adoption, rappelle-t-il, exigera pour la majorité de gauche de mobiliser également la droite, dans un contexte où «la fracture sur ce sujet n'épargne aucun parti, sauf les écologistes».

M. Urvoas a confirmé samedi que «depuis le début, le gouvernement dit qu'il n'a pas de majorité pour modifier la Constitution». Mais «depuis quelques mois, nous sommes quelques-uns à lui dire que cette majorité existe» pour faire adopter cette charte sans passer par un référendum, a-t-il ajouté.

Cependant, pour Christian Troadec, porte-parole de Bonnets rouges, «la priorité est à des mesures immédiates, comme la création d'une télévision publique bretonne et des transferts de compétences en matière culturelle».

«On n'est même pas au tiers de ce qui est actuellement permis», a-t-il ajouté, dénonçant «un Etat jacobin qui s'est construit contre ses propres peuples».

Marie-Françoise Bechtel, députée de l'Aisne, 1ère vice-présidente du MRC, a déclaré dans un communiqué que «Jean-Marc Ayrault ouvre la boîte de Pandore aux revendications identitaires de toute nature et de toute origine». Pour sa part, Florian Philippot, vice-président du FN, a dit dans un tweet : «la charte des langues régionales et minoritaires, anti-française, anti-nationale et anti-républicaine, ne passera pas ! #NoPasaran»