Nancy: Un ex-directeur de prison jugé après un meurtre en cellule
JUSTICE•La procédure est inédite en France...20 Minutes avec AFP
Un directeur de prison sera jugé vendredi devant le tribunal correctionnel de Nancy pour sa responsabilité dans le meurtre d'un détenu par son compagnon de cellule, une procédure probablement inédite en France.
Stéphane Scotto, actuellement directeur de la maison d'arrêt de Fresnes (Val-de-Marne), encourt cinq ans d'emprisonnement pour «homicide involontaire», neuf ans après ce meurtre survenu à la maison d'arrêt de Nancy qu'il dirigeait alors. Il n'a fait l'objet d'aucune procédure administrative.
«A ma connaissance, un tel procès est une première», a expliqué à l'AFP l'avocate du prévenu, Marie Desmet. «Au-delà des faits, le débat sur le terrain juridique sera âpre, car l'homicide involontaire n'est pas un délit facile à caractériser et, à notre sens, les éléments constitutifs de l'infraction ne sont pas réunis», a-t-elle ajouté.
Coups de pied dans les parties génitales
Il est notamment reproché à l'ancien chef d'établissement de ne pas avoir cherché à placer en cellule individuelle un détenu connu pour sa dangerosité, ou à défaut, de porter «une vigilance particulière à l'équilibre de la cellule, notamment au nombre d'occupants et à la personnalité de ceux-ci», afin de prévenir tout risque de violence, selon la chambre de l'instruction.
«Il a mis dans la même cellule un détenu très jeune, très fragile, et un psychopathe patenté!», résume Xavier Iochum, l'avocat des parties civiles. Pour la défense en revanche, «la tâche était très rude à l'époque, dans cette maison d'arrêt, aujourd'hui fermée et démolie, qui était particulièrement rustre».
Le drame remonte au 24 août 2004. Ce jour-là, Johnny Agasucci, 25 ans, en détention provisoire à Nancy dans l'attente de son procès pour trafic de stupéfiants, est violemment agressé par l'un de ses deux compagnons de cellule, qui purge alors une peine pour des actes de torture et de barbarie commis quatre ans plus tôt.
Sébastien Simonet l'étrangle à mains nues, puis lui donne «des coups de pied dans les parties génitales et le ventre, ainsi que des coups de coude dans le dos», selon les constatations des enquêteurs.
Pas de surveillance particulière
La famille de la victime dépose rapidement plainte contre le directeur de la prison, qui est finalement mis en examen, à l'issue d'une procédure à rebondissements. Il bénéficie d'abord d'un non-lieu, puis voit cette décision annulée, avant d'être finalement renvoyé devant le tribunal correctionnel malgré l'avis contraire du parquet.
Le meurtrier «présentait un profil particulier de dangerosité, son parcours pénitentiaire au sein de plusieurs maisons d'arrêt étant émaillé d'incidents démontrant sa grande agressivité», ont notamment souligné les magistrats de la chambre de l'instruction.
Pour l'avocat de la partie civile, «il n'y a pas eu de surveillance particulière de cette cellule, et c'est une faute. Ce renvoi en correctionnelle est très rare pour un directeur d'établissement, donc très importante».
Pour le meurtre de son co-détenu, Sébastien Simonnet a été condamné en appel, en décembre 2009, à 27 ans de réclusion criminelle par la Cour d'assises de la Côte-d'Or, à Dijon.