Cahuzac de nouveau mis en examen à cause de son compte caché
•L'ex-ministre du Budget Jérôme Cahuzac a de nouveau été mis en examen mercredi par les juges enquêtant sur son compte bancaire à l'étranger non déclaré, qu'il n'avait pas mentionné lors de son entrée au gouvernement.© 2013 AFP
L'ex-ministre du Budget Jérôme Cahuzac a de nouveau été mis en examen mercredi par les juges enquêtant sur son compte bancaire à l'étranger non déclaré, qu'il n'avait pas mentionné lors de son entrée au gouvernement.
Déjà poursuivi, notamment pour «fraude fiscale» et «blanchiment», il l'est désormais aussi pour «déclaration incomplète ou mensongère de son patrimoine par un membre du gouvernement». En cause, l'omission de toute référence à ce compte dans sa déclaration d'intérêt signée lors de sa nomination en mai 2012 comme ministre délégué au Budget.
Cette décision, attendue, lui a été notifiée par les juges Roger Le Loire et Renaud van Ruymbeke lors d'une audition au pôle financier du Tribunal de grande instance de Paris, où il était arrivé avec ses avocats vers 10H00 avant d'en partir à 14H30, selon des journalistes de l'AFP.
Cette omission dans les renseignements transmis à la Commission pour la transparence financière de la vie politique est passible d'une amende de 30.000 euros et d'une peine d'inéligibilité. Contactés par l'AFP, ses conseils, Mes Jean Veil et Jean-Alain Michel, se sont refusés à tout commentaire.
Reconnaissant début avril qu'il détenait un compte bancaire non déclaré à Singapour, Jérôme Cahuzac avait alors été mis en examen pour «blanchiment de fraude fiscale».
Initialement lancée pour ce chef, l'enquête a été élargie au chef de «fraude fiscale» après un signalement de la Commission des infractions fiscales, qui dépend de Bercy.
M. Cahuzac avait ensuite été mis en examen le 16 mai pour «fraude fiscale», a indiqué mercredi soir à l'AFP une source proche du dossier.
C'est lors de cette audition que les juges avaient en outre ordonné qu'il verse sous forme de cautionnement les quelque 685.000 euros qu'il avait dit avoir rapatriés de son compte non déclaré à Singapour. Ce cautionnement avait été décidé comme modalité de son contrôle judiciaire.
Dans ce dossier, premier grand scandale de l'ère Hollande, l'épouse de l'ancien ministre star du gouvernement Ayrault, Patricia Cahuzac, a aussi été mise en examen fin août. Le couple est en instance de divorce.
L'affaire a ébranlé le pouvoir. Trois ministres de premier plan, Pierre Moscovici (Économie), Manuel Valls (Intérieur) et Christiane Taubira (Justice), ont dû aller répondre à une commission d'enquête parlementaire. Le scandale a également poussé le président François Hollande à annoncer une série de mesures pour moraliser la vie politique.
Pourfendeur de la fraude fiscale
L'existence de ce compte non déclaré de Jérôme Cahuzac, qui à Bercy s'était fait le pourfendeur de la fraude fiscale, avait été révélée en décembre 2012 par Mediapart.
Après des semaines de dénégations «en bloc et en détail» et de joutes par médias interposés avec le site d'information, Jérôme Cahuzac avait été contraint à la démission du gouvernement le 19 mars quand le procureur de Paris François Molins avait annoncé l'ouverture d'une instruction.
«Dévasté par le remords», il avait ensuite avoué avoir menti, y compris aux plus hautes autorités de l’État, et reconnu avoir placé quelque 685.000 euros sur un compte, ouvert en Suisse en 1992 puis déplacé à l'automne 2009 à Singapour.
M. Cahuzac avait déclaré à La Dépêche du Midi en mai qu'il avait «fait procéder au rapatriement des montants litigieux». «Ils sont en France à la disposition de la justice. Je paierai ma dette. Et je ferai don du reliquat, s'il existe, à des œuvres caritatives de l'arrondissement de Villeneuve», avait-il déclaré.
Selon son avocat, ces sommes non déclarées étaient essentiellement le fruit de son activité de chirurgien et accessoirement de son travail de consultant pour l'industrie pharmaceutique.
Il a en effet créé en 1993 une société de consultant, Cahuzac Conseil, après avoir été conseiller technique chargé du médicament au ministère de la Santé de 1988 à 1991.
Les juges s'attachent à vérifier ces dires, notamment par le biais d'investigations en Suisse et à Singapour.
Ils ont également entrepris d'explorer ses relations avec les laboratoires, M. Cahuzac étant aussi mis en examen pour «blanchiment d'avantages procurés par une entreprise dont les services ou les produits sont pris en charge par la Sécurité sociale».
Dans ce cadre, ils ont notamment perquisitionné le domicile et le bureau chez Sanofi du lobbyiste Daniel Vial, qui a indiqué avoir fait travailler l'ex-ministre pour qu'il conseille des laboratoires pharmaceutiques. Daniel Vial a récemment quitté ses fonctions de conseiller chez Sanofi. Les locaux du laboratoire Pfizer ont aussi été perquisitionnés.