René Pétillon ou la simplicité d'une plume qui fait mouche

René Pétillon ou la simplicité d'une plume qui fait mouche

Le regard bleu profond souligné par d'épais sourcils blancs, le dessinateur breton René Pétillon, dont une nouvelle aventure de son détective un peu ballot Jack Palmer sort vendredi, transpire l'amour de la satire et la simplicité.
© 2013 AFP

© 2013 AFP

Le regard bleu profond souligné par d'épais sourcils blancs, le dessinateur breton René Pétillon, dont une nouvelle aventure de son détective un peu ballot Jack Palmer sort vendredi, transpire l'amour de la satire et la simplicité.

A l'entrée de sa résidence secondaire, à Port Manech, dans le sud Finistère, le visiteur est surpris par l'absence de sonnette. Il faut pousser le grand portail et s'engager dans l'allée jusqu'à la jolie demeure aux volets bleus inondée de lumière.

Pétillon surgit d'une porte-fenêtre laissée ouverte. «Entrez, entrez». Interrogé sur l'absence de sonnette, le dessinateur vedette du Canard Enchaîné, petit homme sec, répond comme une évidence: «Si on veut entrer, on pousse la porte et on entre!»

«Je n'ai jamais fait l'objet d'une fatwa!» lance-t-il, amusé, au cours d'un entretien avec l'AFP, évoquant «L'affaire du voile», album paru en 2006, dans lequel il parvient à faire rire du voile islamique et des pratiques religieuses.

«Je n'ai pas la volonté d'être méchant, mes albums sont très ironiques», souligne l'homme vêtu d'une chemise bleue sur un pantalon en toile marron, qui réside habituellement à Paris.

Pétillon, qui fêtera prochainement ses 68 ans --il est né le 12 décembre 1945-- est depuis tout petit fasciné par l'image.

A la maison, à Lesneven, au nord de Brest, il dévore les Tintin et les Spirou dès son plus jeune âge. «Ça m'a tout de suite fasciné», dit-il.

A l'école, en revanche, il cumule les mauvaises notes et les remarques. «Je n'étais pas du tout intéressé par l'école», avoue-t-il, disant avoir grandi dans une famille catholique traditionnelle. «J'étais intéressé par le dessin... et les filles», ajoute-t-il l'oeil rieur sous un front légèrement dégarni.

Dessins politiques

A la fin de la classe de seconde, il rejoint son père dans la boulangerie familiale. Il y enchaîne gâteaux, tartes et petits pains, tout en esquissant le soir dans sa chambre des dessins, déjà humoristiques, qu'il envoie à des revues comme Lui ou Plexus, sans succès.

Après son service militaire en Allemagne il rejoint Paris. «Je savais exactement ce que je voulais faire», assure le dessinateur de sa voix douce. «Au début, je recevais des refus d'un peu partout, mais j'étais plein d'espoir», enchaînant les petits boulots (magasinier, livreur, coursier...).

Ses premiers dessins paraîtront en 1968 dans Planète, Plexus et l'Enragé, puis en 1972 sortira sa première bande-dessinée dans Pilote. Deux ans plus tard, il donnera naissance à Jack Palmer, un Groucho Marx se prenant pour Humphrey Bogart, détective un peu bêta au gros nez et à l’imperméable trop grand qui lui apportera le succès en 2000 grâce à ses déboires dans le maquis corse («Enquête Corse», Albin Michel).

Prix du meilleur album au Festival d'Angoulême en 2001, la BD se vend à 400.000 exemplaires et est adaptée au cinéma par Alain Berbérian avec Christian Clavier dans le rôle de Palmer.

«Le succès de cet album m'a abasourdi», assure le dessinateur, encore surpris d'avoir été fait citoyen d'honneur de la ville de Bastia.

Pétillon, c'est aussi des dessins dans l'Echo des Savanes, VSD, Métal Hurlant, Le Matin de Paris --où il scénarise la série du Baron noir dessiné par Yves Got--... avant son entrée en 1993 au Canard Enchaîné et ses premiers dessins politiques. Une collaboration qui aura une grande influence sur la suite de son travail. «L'enquête Corse découle directement de mon travail au Canard».

«Il y a un ressort que j'utilise énormément dans mon travail au Canard Enchaîné, c'est la mauvaise fois, ça peut être très drôle», explique-t-il, disant s'être «régalé» en écrivant les aventures de Palmer sur l'île de Beauté: «Les Corses s'amusent à qui sera le plus de mauvaise foi, c'est un jeu là-bas».

Quand il ne dessine pas, René Pétillon lit beaucoup, surtout des polars, jardine et bricole, comme en ce moment où il construit une cabane dans les arbres pour son petit-fils de deux ans.

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