Un an avec sursis requis pour avoir extorqué de l'argent à des parents d'élève

Un an avec sursis requis pour avoir extorqué de l'argent à des parents d'élève

Le parquet d'Avesnes-sur-Helpe (Nord) a requis mercredi un an de prison avec sursis contre un enseignant soupçonné d'avoir extorqué de l'argent à des parents pour éviter à leur fils d'être exclu.
Le parquet d'Avesnes-sur-Helpe (Nord) a requis mercredi un an de prison avec sursis contre un enseignant soupçonné d'avoir extorqué de l'argent à des parents pour éviter à leur fils d'être exclu.
Le parquet d'Avesnes-sur-Helpe (Nord) a requis mercredi un an de prison avec sursis contre un enseignant soupçonné d'avoir extorqué de l'argent à des parents pour éviter à leur fils d'être exclu. - Francois Lo Presti AFP
© 2013 AFP

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Le parquet d'Avesnes-sur-Helpe (Nord) a requis mercredi un an de prison avec sursis contre un enseignant soupçonné d'avoir extorqué de l'argent à des parents pour éviter à leur fils d'être exclu.

Estimant que l'extorsion était constituée, le procureur a aussi demandé cinq ans d'interdiction d'exercer une profession en relation avec la fonction publique.

Rodolphe Miller, 54 ans, comparaissait mercredi devant le tribunal correctionnel pour avoir réclamé 7.500 euros en juin 2012 aux parents d'un élève de terminale d'un lycée professionnel d'Aulnoye-Aymeries (Nord), qui lui avait lancé six mois plus tôt une boulette de papier d'aluminium au visage.

Deux mois de prison avec sursis ont été requis contre sa compagne, 50 ans, poursuivie pour complicité.

Les parents comme l'enseignant ont reconnu avoir signé une «convention d'indemnisation», officialisant le versement, au rythme de 300 euros par mois.

En contrepartie, l'enseignant renonçait à toute poursuite contre cette famille aux revenus modestes, dont le père est concierge dans un collège.

Le pot aux roses avait été découvert en janvier, lors d'un conseil de discipline au cours duquel le lycéen âgé de 18 ans, avait été exclu, au grand étonnement de ses parents.

Le jeune homme a reconnu à l'audience avoir jeté un projectile fait de papier d'aluminium, d'une taille à mi-chemin entre la balle de tennis et la balle de hand-ball.

Les débats n'ont pas permis d'éclaircir la présence de morceaux de brique dans la boulette, comme l'affirmait M. Miller.

L'incident a provoqué une ITT (incapacité totale de travail) de trois jours, mais pas de traumatisme osseux ni de plaie, selon le médecin légiste intervenu pendant l'instruction. M. Miller a dit toujours souffrir de troubles de la vision.

«Il y a tromperie, puisqu'on réclame 7.500 euros pour un préjudice totalement imaginaire», a estimé le procureur, citant plusieurs expertises médicales.

Les parents se sentaient «menacés»

Outre les conséquences médicales, le tribunal a tenté de déterminer si la signature de la convention s'était faite sous la contrainte.

Les versions des deux parties divergent radicalement.

Début juin 2012, M. Miller va sonner chez les parents du lycéen qu'il soupçonne d'être l'auteur du jet de projectile. «C'est le père qui a soulevé cette idée» de convention, a affirmé l'enseignant. «Il m'a dit que comme son fils voulait entrer à la gendarmerie, il ne voulait pas avoir de problème». Le professeur affirme avoir alors conseillé au père de dénoncer son fils à la police. «Il me dit non et propose l'indemnisation», dit-il.

«Cette extorsion va être maquillée par des habits de légitimité», a déclaré Me Riglaire, l'avocat des parents partie civile au procès.

De leur côté, les parents ont raconté s'être sentis menacés dès la première visite de l'enseignant. «Il a dit que (...) l'enfant qui avait fait ça irait en prison, que sa vie serait gâchée», a raconté la mère de l'élève. Selon elle, l'enseignant explique alors que «si la personne se dénonce avec une lettre de pardon, ce sera terminé.»

Après le départ de son professeur, le jeune lycéen avoue à ses parents être l'auteur du méfait. Le père appelle l'enseignant pour lui présenter ses excuses. «Il a dit : +une lettre ça suffit pas, je veux de l'argent+», affirme la mère.

Selon elle, l'enseignant demande alors 10.000 euros, son mari propose 5.000. Fin juin, l'enseignant arrive avec la convention mentionnant 7.500 euros. «Avec toutes les menaces qu'il nous avait faites la première fois, on se sentait obligés de signer», dit la mère.

La convention était réglée dans les moindres détails: le professeur délivrait des reçus et avait demandé des renseignements à sa compagnie d'assurance.

Pour Me Berton, avocat de la défense, il s'agit d'une preuve de la bonne foi de son client. Selon lui, ni l'extorsion, ni même le chantage ne peuvent être démontrés.

«En matière d'extorsion de fonds, il n'y en a pas beaucoup qui envoient des reçus», a-t-il raillé.

M. Miller «était persuadé d'être dans une logique d'indemnisation. Il ne peut qu'être relaxé», a plaidé l'avocat.

«J'ai fait tout dans les règles», a déclaré M. Miller qui affirme avoir transmis un rapport d'incident à la conseillère d'éducation, qui a nié lors de l'enquête avoir reçu le document. Pendant l'instruction, le rectorat a confirmé de son côté avoir reçu un courrier de sa part.

Les parties civiles ont demandé 2.000 euros au titre du préjudice matériel et 7.500 euros pour le préjudice moral.

Le jugement a été mis en délibéré au 10 juillet.