Le traumatisme psychique, une blessure invisible

Le traumatisme psychique, une blessure invisible

Il y a ce soldat hospitalisé qui se jette sur un infirmier pensant voir un taliban. Ou ce rescapé d'un crash d'une Gazelle (hélicoptère) dans l'Adriatique qui a la sensation que l'espace se remplit d'eau au moindre stimuli...

Il y a ce soldat hospitalisé qui se jette sur un infirmier pensant voir un taliban. Ou ce rescapé d'un crash d'une Gazelle (hélicoptère) dans l'Adriatique qui a la sensation que l'espace se remplit d'eau au moindre stimuli sonore. Confrontés à un stress intense et à la mort, la leur et celle de leurs camarades, les militaires peuvent revenir choqués. Ces traumatismes psychiques (appelés « PTSD », pour post-traumatic stress disorder) sont reconnus comme des blessures de guerre, ouvrant droit à pension depuis 1992. « Pendant longtemps, le blessé psy passait pour un faible, reconnaît le général Jean-Philippe Margueron. Mais c'est un blessé à part entière. » L'Afghanistan a obligé l'institution à appréhender le phénomène avec plus d'acuité. Sept pour cent des personnels qui en reviennent font part de souffrances psychologiques, selon la cellule d'aide aux blessés de l'armée de terre (Cabat). Un chiffre sans doute en deçà de la réalité. « Les soldats et leurs familles n'osent pas toujours taper à la porte. Dans la majorité des cas, il y a un déni de la part du blessé, explique Denis Gutierrez, le médecin en chef du service de santé des armées (SSA). Cette pathologie met du temps à se déclarer. » Souvent, trois à six mois. Parfois, des années.
Malgré le suivi mis en place pour tous les soldats revenants d'opérations extérieures (Opex), « on peut rater un PTSD ». Le SSA indique avoir ouvert 550 dossiers pour troubles psychiques. Mais tous n'évoluent pas en PTSD. « Les signes cliniques sont les cauchemars à répétition, la reviviscence du traumatisme sous forme d'hallucinations, des sursauts constants, des évitements de situation qui rappellent l'événement traumatique, mais aussi la dépression, l'irritabilité... », souligne le médecin Patrick Devillières, chef du bureau médico-psychologique des armées. Le traitement s'effectue à base de psychothérapies, mais aussi de médicaments. « J'ai pris la mesure des blessures invisibles », a assuré à la fin octobre le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, qui a annoncé un numéro vert pour les familles et un guichet unique de prise en charge pour les soldats. Et a déjà prévenu : « Plusieurs centaines de personnes au moins seront à traiter dans les années qui viennent. » Selon Laurent Attar-Bayrou, de la Fédération nationale des anciens des Opex, 30 000 personnes souffriraient déjà de PTSD « à des degrés divers ».A. S.