FAIT DIVERSPourquoi la saison 2 d’«American Crime Story» sur Versace est controversée?

«American Crime Story: The Assassination of Gianni Versace»: Pourquoi la série est-elle controversée?

FAIT DIVERSAprès l'affaire O.J Simpson, Ryan Murphy s'est intéressé à l'assassinat du couturier Gianni Versace, ce que sa famille n'a pas vu d'un bon oeil...
 Edgar Ramirez  joue Gianni Versace dans la saison 2 d'«American Crime Story».
Edgar Ramirez joue Gianni Versace dans la saison 2 d'«American Crime Story».  - Fox
Anne Demoulin

Anne Demoulin

Avec ses deux Golden Globes et ses neuf Emmy Awards, la première saison d’American Crime Story a été saluée comme l’une des meilleures séries de l’année 2016. Après une première saison consacrée au procès d’O.J Simpson, l’anthologie de Ryan Murphy revient en France ce jeudi à 21 heures sur Canal + avec une autre affaire criminelle qui a secoué l’Amérique : l’assassinat du couturier Gianni Versace en 1997 à Miami par Andrew Cunanan, serial killer mythomane, paranoïaque, et fasciné par la célébrité et l’argent. Une série que les héritiers du célèbre styliste italien ne voient pas d’un bon œil. Explications.

Une « œuvre de fiction » selon la famille Versace

La série démarre le 15 juillet 1997, à Miami Beach, en Floride, Gianni Versace (campé dans la série par Edgar Ramirez, repéré dans le film Carlos d’Olivier Assayas) est tué devant chez lui par Andrew Cunanan (joué par Daren Criss, un des héros de Glee), un tueur en série recherché par le FBI pour quatre autres meurtres.

Les neuf épisodes retracent les huit jours de la traque du serial killer par le FBI et remonte le temps via de long flash-back pour assister aux autres meurtres perpétrés par Andrew Cunanan et aux moments clés de la carrière du célèbre couturier, entouré de son compagnon de longue date, Antonio D’Amico, incarné dans la série par Ricky Martin et de sa sœur et muse, Donatella, joué par Penélope Cruz.

La série s’attache essentiellement à décortiquer la personnalité du meurtrier, un gigolo séduisant mais pauvre et frustré, prêt à tout pour intégrer le monde fait de paillettes et d’argent auquel appartient Gianni Versace, créateur baroque, richissime et au sommet de sa gloire.

Ecrite par Ryan Murphy et Tom Rob Smith, le récit se base sur le livre Vulgar Favors de Maureen Orth, une journaliste qui a notamment travaillé pour le Vanity Fair américain. Pour la famille Versace, ce livre « n’est que commérages et spéculations ».

« La famille Versace n’a ni autorisé, ni participé à la conception » de The Assassination of Gianni Versace : American Crime Story, qui « doit uniquement être considérée comme étant une œuvre de fiction », souligne-t-elle dans un communiqué adressé à la presse américaine au moment de la diffusion américaine de cette seconde saison d’American Crime Story en janvier.

« Maureen Orth n’a jamais reçu d’informations de la part de la famille Versace » et « dans un souci de créer une histoire sensationnelle, elle reprend des rumeurs contradictoires », affirment les Versace.

La sérologie de Gianni Versace en cause

Qu’est-ce qui agace tant la famille Versace ? Dans son livre, la journaliste Maureen Orth affirme que Gianni Versace était séropositif et qu’il ne l’a pas dévoilé afin de ne pas mettre en péril un projet d’émission publique d’actions de son empire de la mode. La journaliste affirme avoir mené près de 400 interviews au cours de son enquête, dont celle du détective de Miami, Paul Scrimshaw, qui lui aurait confirmé que Versace était séropositif à la suite de tests réalisés dans le cadre de l’autopsie.

Une thèse reprise par la série, que la famille conteste. Dans une interview à La Republica, Donatella Versace, la sœur du couturier désormais à la tête de l’empire, ne cache pas sa colère notamment autour de la question du statut sérologique de Gianni, non pas parce qu’il s’agit de « quelque chose de honteux, étant donné que Gianni fut l’un des premiers à s’occuper de ce problème, à organiser des événements de bienfaisance et à faire des dons personnels », mais parce que cette séropositivité supposée est l’une des « nombreuses choses fausses » de la série.

« En faisant ces odieuses affirmations, Maureen Orth ne tient pas compte des informations contraires ayant été fournies par les membres de la famille de Versace. Ces derniers sont pourtant les plus à même de connaître les détails de sa vie étant donné qu’ils ont vécu à ses côtés », explique-t-elle dans le communiqué.

Ce projet n’est pas du goût d’Antonio d’Amico, le compagnon de Gianni Versace qui a trouvé son cadavre. Il s’en est ouvert au Guardian : « Il y a eu beaucoup de choses écrites et dites à propos du meurtre, et des milliers de suppositions, mais pas une trace de vérité. Cette image de Ricky Martin tenant le corps dans ses bras est ridicule. Ce n’est pas comme ça que j’ai réagi ».

Une « non-fiction évidemment avec des éléments de docudrame »

« Tout comme la première saison d’American Crime Story sur le procès d’O.J. Simpson adaptait le livre de Jeffrey Toobin The Run of his Life, la suite The Assassination of Gianni Versace se base sur l’ouvrage documenté et complet Vulgar Favors de Maureen Orth, qui retrace l’authentique série de meurtres commis par Andrew Cunanan. Nous sommes solidaires du méticuleux récit des faits fourni par Mme Orth », a défendu dans un communiqué la chaîne américaine FX.

« La famille Versace a dit que c’était une œuvre de fiction - ce n'est pas un oeuvre de fiction », a rétorqué Ryan Murphy dans les colonnes Entertainment Weekly, ajoutant que le livre « a été discuté et disséqué et examiné pendant près de vingt ans ». Orth « est un reporter impeccable et nous soutenons son enquête. Notre série est basée sur son travail, donc, de ce point de vue, ce n’est pas une œuvre de fiction, c’est un travail de non-fiction évidemment avec des éléments de docudrame. Nous ne faisons pas de documentaire. »

Dans la série, Andrew Cunanan fantasme différentes rencontres avec le célèbre couturier. Des scènes qui peuvent être prises comme argent comptant par le spectateur non documenté sur l’affaire. Bien qu’Andrew Cunanan se soit vanté auprès de ses amis d’avoir eu une liaison avec Versace, l’enquête n’a jamais été établie que l’artiste et son exécuteur se connaissaient personnellement. Basée sur un fait divers bien réel, « The Assassination of Gianni Versace » reste l’interprétation romancée d’une affaire aux multiples zones d’ombre, dont les deux protagonistes ont emporté dans leur tombe les secrets.