ARCHEOLOGIEUne étude révèle les ingrédients secrets pour conserver les momies d’Egypte

Egypte : Une étude révèle les ingrédients secrets pour conserver les momies

ARCHEOLOGIELes anciens Égyptiens avaient accumulé une connaissance énorme pour préserver les corps après la mort
Un sarcophage (illustration).
Un sarcophage (illustration). - Pixabay / Denis Doukhan
20 Minutes avec agences

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Les secrets de conservation des momies se dévoilent un peu plus. Résines d’Asie, huiles de cèdre du Liban, bitume de la mer Morte : une étude publiée mercredi dans Nature révèle les ingrédients utilisés par les anciens Égyptiens pour leurs momies.

« Nous connaissions le nom des produits d’embaumement depuis le déchiffrage des anciens écrits égyptiens », a expliqué l’égyptologue Susanne Beck, dans un communiqué de l’université allemande de Tübingen, « mais jusqu’à aujourd’hui nous ne pouvions que deviner les substances derrière ces noms ».

Une trentaine de récipients analysés

Des fouilles menées en 2016 dans la nécropole de Saqqarah au sud du Caire ont mis au jour une collection exceptionnelle de poteries utilisées dans une chambre funéraire. Cette pièce appelée « wabet » se trouve au fond d’un puits, à 13 mètres de profondeur. Après l’éviscération du défunt et le retrait de son cerveau, les embaumeurs, accompagnés de prêtres dédiés, y lavaient le corps et le préparaient pour éviter la décomposition empêchant selon leurs croyances toute vie ultérieure. Après un traitement pouvant durer jusqu’à 70 jours, certaines des momies ont transité vers un deuxième puits, profond de 30 mètres, pour entamer leur voyage vers l’au-delà.

L’équipe de chercheurs des universités de Tübingen et Munich (Allemagne), aidée par le Centre national de recherche du Caire, a analysé les résidus dans 31 récipients du « wabet », datés de la 26e dynastie, il y a plus de 2.500 ans, et a pu les comparer à ceux identifiés dans des récipients trouvés dans les tombes adjacentes.

Huiles, goudrons, graisse

La découverte est exceptionnelle car des inscriptions sur les pots fournissent des instructions pour l’emploi des préparations. « Pour laver », avec un mélange d’huiles ou goudrons de conifères. « Pour rendre son odeur agréable », avec de la graisse de ruminant et de la résine d’arbuste. Ou encore pour le « traitement de la tête », la partie du corps faisant l’objet du plus grand soin, avec pas moins de trois concoctions.

Les analyses, menées par Maxime Rageot, archéologue à l’université de Tübingen et premier auteur de l’étude, révèlent ainsi « l’utilisation de substances ayant toutes des propriétés biologiques utiles à la préservation des tissus humains et à la réduction des mauvaises odeurs », a-t-il expliqué dans un point de presse.



Des connaissances poussées

Ces analyses corrigent aussi des croyances sur certaines substances, les égyptologues n’ayant disposé pendant longtemps que d’antiques sources écrites - papyrus égyptiens et auteurs grecs - et d’analyses de momies. C’est notamment le cas pour ce que les anciens Égyptiens appelaient l’antiu, longtemps assimilé à de la myrrhe, une gomme aromatique. Il s’agit en réalité d’un mélange d’huile de cèdre, de cyprès et de graisse animale.

Avec une pratique de l’embaumement remontant aux temps préhistoriques, et qui s’est complexifiée environ mille ans avant notre ère, les anciens Égyptiens « avaient accumulé une connaissance énorme » dans la préservation des corps, a précisé Philipp Stockhammer, professeur d’archéologie à l’Institut allemand Max-Planck d’archéoanthropologie. Ils avaient, selon lui, une connaissance aiguë des propriétés de leurs produits et de leurs associations.

Une influence sur le commerce jusqu’en Asie

Une des plus grandes surprises des chercheurs a aussi été d’identifier des résines, comme l’élémi ou le dammar, venant de forêts tropicales d’Asie du sud-est et peut-être aussi d’Afrique. S’y ajoutent des résines de pistachiers et huiles d’olive de l’arc méditerranéen, ce qui « montre que l’embaumement a été un moteur de la globalisation », selon le professeur Stockhammer.

La diversité des substances identifiées à Saqqarah montre que les embaumeurs « étaient très intéressés par l’expérimentation et l’obtention d’autres huiles et résines », selon lui. Ils ont mis à profit une route commerciale avec l’Asie et l’Asie du sud-est, qui existait déjà mille ans avant notre ère et qui reliait l’actuelle Indonésie à l’Egypte via l’Inde, puis le Golfe persique et la mer Rouge.

Reste à découvrir les propriétés exactes des substances que les embaumeurs utilisaient pour conserver leurs morts, si ce n’est pour leur garantir la vie éternelle.