Une chercheuse française reçoit trois millions de dollars pour avoir découvert les neurones de l’instinct parental
AVANCÉE•Cette percée scientifique pourrait un jour permettre de mieux comprendre les rôles adoptés par les mammifères20 Minutes avec agences
La neurobiologiste française d’Harvard Catherine Dulac a reçu ce jeudi un prix scientifique américain doté de trois millions de dollars, le Breakthrough Prize, pour avoir découvert où se trouve l’instinct parental dans le cerveau de la souris. Une percée qui aidera peut-être un jour à mieux comprendre les rôles adoptés par les mammifères, dont les hommes et les femmes.
Les lauréats 2021 du riche prix créé par des entrepreneurs de la Silicon Valley ont été annoncés ce jeudi. Six autres scientifiques ont été récompensés en sciences de la vie, physique fondamentale et mathématiques, et recevront trois millions de dollars chacun pour des travaux considérés comme des « percées ». La somme est le triple de celle du prix Nobel.
Un instinct différent entre mâle et femelle
Catherine Dulac est professeure et directrice de laboratoire à Harvard et à l’institut médical Howard Hughes. Elle a été récompensée pour avoir identifié les circuits de neurones du cerveau qui, instinctivement, dictent à une souris femelle de généralement prendre soin des souriceaux, et au mâle de les attaquer, selon les circonstances. Sa contribution majeure est d’avoir montré que mâles et femelles ont chacun en eux les circuits comportementaux des deux sexes : la différence est que leurs hormones activent l’un ou l’autre des circuits, comme un interrupteur. Parfois, c’est l’autre circuit qui s’active, conduisant par exemple une mère stressée à tuer ses petits ou, encore plus spectaculaire, un mâle à s’occuper de sa progéniture lorsqu’il devient père.
« On pense que ce qu’on a trouvé peut s’étendre à d’autres espèces » dont les humains, a déclaré Catherine Dulac, 57 ans, installée depuis 25 ans aux Etats-Unis. « Il y a un instinct, et l’instinct, c’est justement le fonctionnement de ces neurones, qui sont – je parie - dans le cerveau de tous les mammifères et disent à l’animal, quand il y a des signaux sur la présence de nouveau-nés : "Tu dois t’en occuper" », poursuit la scientifique.
Questions transgenres
Ces travaux de recherche fondamentale, bien que limités à la souris, intéressent évidemment tous ceux qui travaillent sur les questions transgenres. « En chacun, le câblage masculin et féminin existe », explique la scientifique. Familles ou alliés de personnes transgenres l’interpellent régulièrement pour la remercier : « Je suis une scientifique, je regarde les données, je suis neutre. »
Quant à l’argent du prix, elle confie qu’elle en donnera une partie à des causes liées à la santé et l’éducation des femmes et populations défavorisées. Originaire de Montpellier, passée par Normale Sup, elle était partie aux Etats-Unis après son doctorat avec la ferme intention de revenir ensuite en France. Catherine Dulac a finalement choisi Harvard et fait sa vie là-bas, obtenant la double nationalité. Elle estime que les Etats-Unis ont des années d’avance sur la France pour promouvoir activement l’égalité hommes-femmes.