Crash de l’avion d'Air Algérie: «On change toujours sa route quand il y a un gros orage»
AERONAUTIQUE•50 minutes après son décollage, l’avion aurait traversé une zone particulièrement agitée…Romain Scotto
Quelques minutes avant le crash, l’équipage espagnol de l’avion affreté par Air Algérie a signalé qu’il changeait de route «en raison de conditions météo particulièrement difficiles». De fortes rafales de vent et une activité électrique importante étaient relevés dans la région de Gao, où sévit la saison des pluies et où a eu lieu l’accident. Un cas d’adaptation météo très fréquent selon Gérard Feldzer, commandant de bord et consultant aéronautique et transport.
Comment le plan de vol est-il posé? Cette première phase, qui intervient en amont du vol, s’effectue grâce aux prévisions météo posées en avance. Les turbulences de la zone intertropicale sont bien connues dans la région. «On pose son plan de vol en fonction de ces perturbations. Après, il peut y avoir des orages sur la route que les radars de l’avion repèrent», note le spécialiste. Normalement, les pilotes sont formés pour les éviter, même s’ils doivent effectuer un très grand détour. Une décision est alors prise avec la tour de contrôle. Mais ils ne sont jamais à l’abri d’une mauvaise surprise. «On a beau se préparer à l’avance, un jour ou l’autre, on se fait piéger par quelque chose qui est beaucoup plus fort que ce qu’on a prévu. Les turbulences sont très difficiles à évaluer», poursuit Gérard Feldzer.
Quand un avion change-t-il sa route? Un code couleur existe pour hiérarchiser l’intensité d’un orage. Vert pour une petite pluie sans conséquence, orange pour une pluie forte, rouge pour un orage violent avec des grêlons qui peuvent dépasser la taille d’une balle de ping-pong. A partir de l’orange, les pilotes envisagent un changement de cap. «On change toujours sa route quand il y a un gros orage», note le commandant de bord. Dans la région concernée, où s’abattent de fortes pluies, les adaptations sont très fréquentes. Les cumulonimbus présents peuvent atteindre une altitude de 18.000m. Sachant qu’un avion vole jusqu’à 12.000m, il n’y a d’autre solution que de contourner la dépression pour l’éviter.
Qu’est ce qu’un orage entraîne sur l’appareil? Les risques sont multiples selon Gérard Feldzer qui évoque pêle-mêle une déformation de l’appareil, un éclatement du pare-brise, une dépressurisation, un décrochage qui peut même mettre l’avion sur le dos. «Malgré tout, il est excessivement rare qu’on perde un avion pour cause météo en vol.» A l’atterrissage, les accidents sont beaucoup plus nombreux qu’en croisière. Par ailleurs, l’absence de visibilité depuis le cockpit n’est pas un souci puisque les moyens modernes permettent de voler dans le noir. La foudre n’a généralement pas de conséquences non plus quand elle frappe l’appareil. «Sauf quand elle touche les réservoirs», précise le consultant aéronautique.