CLIMATMétéo: Gare aux arnaques des prévisions estivales à long terme

Météo: Gare aux arnaques des prévisions estivales à long terme

CLIMATLes prévisionnistes n’ont pas de visibilité précise à plus de 12-15 jours…
Romain Scotto

Romain Scotto

«La vierge du quinze août arrange ou défait tout.» En matière de beau temps, inutile de se fier à certains dictons pour planifier un barbecue, un week-end rando ou une journée pêche aux bigorneaux. Ils ne se mouillent généralement pas plus que Météo France, dont les prévisions ne dépassent pas un délai de 9 jours. En période estivale, certains sites de météo (payants) ou d’agences de voyages n’hésitent pourtant pas à se projeter beaucoup plus loin. Le temps de la fin de l’été, des prochaines vacances de la Toussaint, voire de Noël, n’a pas de secrets pour ces «Madame Irma» de la climatologie.

Dans ce domaine, les modèles scientifiques ne permettent pourtant pas d’envisager des prévisions précises à plus de 12-15 jours, note Jean-Pierre Céron, directeur scientifique adjoint à Météo France, obligé de «modérer son vocabulaire» pour qualifier les arnaques qui fleurissent sur le Web. «Ce qui est abusif, c’est la manière dont c’est présenté. Ils font état d’un détail chronologique du temps qui est pourtant hors de portée de la science.»

«C’est comme prédire le point d’atterrissage d’une feuille de papier lâchée d’un immeuble»

Ce flou à long terme s’explique par la théorie du chaos, bien connue des physiciens. Il existe des incertitudes au démarrage des prévisions, liées à la description de l’atmosphère et des systèmes climatiques. Plus on avance dans le temps et plus le modèle devient incertain jusqu’au seuil de 12 jours fixé par les météorologistes rigoureux. «C’est comme prédire le point d’atterrissage d’une feuille de papier qu’on lâcherait du haut d’un immeuble», résume Jean-Pierre Céron.

Le «modèle» en question est basé sur des équations traitant un certain nombre de termes propres à la dynamique des fluides. A l’avenir, il n’est pas exclu que les moyens de calculs permettront d’affiner sa résolution. En attendant, l’expert estime qu’il n’y a rien d’infamant à répondre «Je ne sais pas» à ceux qui lui demandent si, oui ou non, ils devront sortir la tonnelle pour leur mariage le 15 août. Sur La Chaîne Météo et Météo Consult, Pascal Saviner, responsable du service prévisions, lui, ne livre jamais une réponse aussi sèche.

Le recours aux prévisions saisonnières

L’entreprise privée répond toujours aux particuliers qui passent par un service payant pour être informés. «On apporte des éléments probants. On donne des tendances d’une semaine à quinze jours. On peut dégager des périodes favorables, défavorables, par rapport à une moyenne sur la région en question.» Mais rien de très précis sur du long terme non plus.

Pour voir un peu plus loin, les météorologues font seulement appel à ce qu’ils appellent les «prévisions saisonnières». Des grandes tendances climatiques, issues des températures océaniques tropicales, qui permettent de savoir à quel type de saison on aura droit. En ce qui concerne le mois d’août en France, les deux «oracles» scientifiques acceptent une tentative de décryptage: «Un été standard à tendance pluviométrique excédentaire très contrasté et changeant» pour Pascal Saviner. Alors qu’en termes de températures, «le signal est plutôt frais chez nous», poursuit Jean-Pierre Céron. Bref, mieux vaut prévoir la tonnelle pour le mariage. Au cas où.