SANTEDistilbène: une histoire sans fin

Distilbène: une histoire sans fin

SANTELes conséquences de l'utilisation du Distilbène concernent aujourd'hui trois générations...
© 2010 AFP

© 2010 AFP

Les conséquences de l'utilisation du Distilbène, hormone de synthèse prescrite en France pendant 30 ans aux femmes enceintes pour prévenir les fausses couches, concernent aujourd'hui trois générations, a montré un colloque organisé vendredi à Paris par l'association DES France.

Le diéthylstilbestrol (DES), fabriqué par les laboratoires Novartis et UCB Pharma, a été commercialisé en France de 1948 à 1977 sous les noms Distilbène et Stilboestrol-Borne, avec un pic d'utilisation entre 1966 et 1972.

L'alerte sur ses dangers a été lancée au début des années 70, à la suite de cas de cancers du vagin et du col de l’utérus chez les filles exposées in utero, les "filles Distilbène". Sont ensuite apparus les risques d'anomalies au niveau du système génital, avec leurs conséquences sur la fertilité et les accidents de grossesse.

Ces problématiques liées à la reproduction restent d'actualité en France, car les dernières femmes exposées in utero atteindront la quarantaine en 2016.

Par ailleurs, sont depuis apparus des risques concernant le cancer du sein, pour les filles mais aussi les mères, et d'autres risques pour la 3e génération, les petits-enfants Distilbène, notamment les garçons, qui font un peu figure d'oubliés dans cette histoire sans fin.

Le DES a été prescrit à environ 200.000 femmes en France, en faisant "un des pays où le nombre +d'enfants DES+ est le plus important, après les Etats-Unis et les Pays-Bas", rappelle Sylvie Epelboin (hôpital Bichat-Claude Bernard - AP-HP).

"La génération qui a pâti largement le plus est la 2e", souligne le Pr Michel Tournaire (hôpital Saint-Vincent de Paul - AP-HP).

Quelque 80.000 filles ont été exposées in utero. Pour ces filles Distilbène, "on sait que globalement, seulement la moitié des grossesses arrivent à terme", avec un risque important de grossesses extra-utérines et de fausses-couches, mais aussi d'accouchements prématurés, indique le Pr Tournaire.

En ce qui concerne les cancers, ceux du vagin et du col de l’utérus, rares après 30 ans, sont aujourd'hui en diminution, les filles Distilbène ayant avancé en âge.

Malheureusement, des études américaines ont montré pour ces femmes de la 2e génération une augmentation du risque de cancer du sein après 40 ans. Un sur-risque qui serait comparable à celui d'une femme ayant un cas de cancer dans sa famille proche. Un groupe d'experts a été mis en place pour définir la fréquence des mammographies.

Un sur-risque de cancer du sein, moins marqué, a également été observé chez les mères Distilbène, celles qui ont pris le médicament lorsqu'elles étaient enceintes, la première génération.

Les effets sur la 3e génération, les petits-enfants Distilbène, ont été moins étudiés. Les choses semblent s'apaiser, mais plusieurs signaux interpellent les médecins.

"Le principal problème" pour ces enfants est d'être nés prématurés, rappelle le Pr Tournaire.

Mais "il y a aussi des anomalies qui apparaissent", dont principalement, chez les garçons, un risque accru d'hypospadias (le petit garçon ne fait pas pipi au bout du sexe mais en dessous). Cette malformation s'opère, mais montre une transmission de l'effet Distilbène à travers les générations, souligne le gynécologue.

Un autre "clignotant" s'est d'ailleurs allumé aux Etat-Unis, chez les petites-filles Distilbène, avec la découverte suspecte de trois cas de cancers de l'ovaire. "Ce n'est pas suffisant pour établir un sur-risque, mais c'est l'objet de beaucoup de vigilance", a indiqué le Pr Tournaire.

DES France (www.des-france.org) est une association d'aide et d'information aux victimes du distilbène.

  1. Site de l'association d'aide aux victimes du Distilbène