AVC, infarctus, malaises… Après plusieurs sauvetages, un médecin veut « améliorer la prise en charge » en plein vol
DECHOCAGE en ALTITUDE•Le médecin réanimateur niçois Vincent Liu-Bousquel, volontaire du programme d’Air France « Community of doctors on board », partage ses recommandations après plusieurs urgences à bordFabien Binacchi
L'essentiel
- Le 26 août, six mois seulement après avoir porté assistance à un passager victime d’un AVC, le médecin réanimateur Vincent Liu-Bousquel est revenu au secours, encore une fois en plein vol, d’un homme frappé par un infarctus.
- Le praticien niçois de 34 ans, volontaire du programme d’Air France « Community of doctors on board », pense que les moyens embarqués pour faire face à des urgences médicales sont encore perfectibles.
- Il a obtenu de s’entretenir avec le médecin-conseil d’Air France ce jeudi pour un « retour d’expériences » en ce sens.
La loi des séries. Le 26 août, six mois seulement après avoir porté assistance à un passager victime d’un AVC, le médecin réanimateur Vincent Liu-Bousquel est revenu au secours, encore une fois en plein vol, d’un homme frappé par un infarctus. C’était entre Séoul et Roissy sur le vol AF 267. Médicalisés avec les moyens du bord, ses deux patients ont pu être pris en charge à temps, une fois leur avion arrivé sur le tarmac.
Mais ces « moyens du bord » justement, le praticien niçois de 34 ans, volontaire du programme d’Air France « Community of doctors on board » (une « communauté de médecins à bord » qui peuvent être appelés à la rescousse), pense qu’ils sont encore perfectibles. Vincent Liu-Bousquel a obtenu de s’entretenir avec le médecin-conseil de la compagnie française ce jeudi pour un « retour d’expériences » en ce sens.
Des « contre-indications formelles aux voyages en avion »
Alors comment améliorer la prise en charge de patients en danger de mort quand on est coincé à 40.000 pieds ? Le spécialiste de la réanimation estime, « et c’est pareil pour toutes les compagnies » selon lui, qu'« il faudrait d’abord faire un effort au niveau de l’information des passagers ». « Et notamment sur les contre-indications formelles aux voyages en avion. Quand on s’enregistre, on nous rappelle qu’il ne faut pas embarquer avec une grenade ou un pistolet, mais rien n’est dit sur le fait qu’il est strictement déconseillé de voler dans le mois qui suit un pneumothorax ou un infarctus du myocarde ou encore quand on a une otite, pointe-t-il. Les médecins peuvent oublier de le préciser, les compagnies ont un rôle à jouer. »
Sur son site Internet, Air France donne les principales recommandations mais une note, au moment de la réservation par exemple, « serait une très bonne chose », dit-il. Elle permettrait de prendre le problème à la base en faisant peut-être baisser le nombre d’urgences à bord. D’après une étude publiée en 2013 dans le New England Journal of medicine, elles surviendraient en moyenne dans un vol sur 604.
L’idéal serait aussi, selon le médecin-réanimateur, que tous les passagers emportent avec eux leur dossier médical, « ou au moins quelques informations sur leurs antécédents et les traitements, primordiales en cas de malaise. »
Electrocardiogrammes et vasopresseurs
Sa deuxième recommandation concerne les connaissances du personnel navigant. En première ligne pour assister un médecin amené à intervenir en vol, stewards et hôtesses doivent être aussi efficaces que possible, chaque seconde étant comptée pour maximiser les chances de survie. « Ils reçoivent de solides formations de secourisme mais il leur manque certaines connaissances en matière de jargon médical, estime encore Vincent Liu-Bousquel. Une journée d’entraînement ou même un document détaillé pourraient améliorer cela. Sur l’infarctus du mois d’août, j’avais dû mal à me faire comprendre au moment d’installer une perfusion. On ne m’a pas forcément tendu les bons outils tout de suite. »
La question du matériel médical embarqué pose aussi justement question selon le médecin niçois. « Il y a un défibrillateur automatique mais il faudrait aussi un ECG [électrocardiographe qui réalise des électrocardiogrammes] pour pouvoir suivre l’activité du cœur et savoir quand administrer les médicaments le plus efficacement possible ». « Il faudrait aussi d’autres médicaments et notamment des vasopresseurs [pour augmenter la tension artérielle]. »
Des recommandations qui « peuvent s’adresser toutes les compagnies »
Autant de points que le réanimateur aimerait discuter avec le médecin-conseil d’Air France « sachant que toutes ces recommandations peuvent s’adresser à l’ensemble des compagnies », souligne-t-il encore. « La prise en charge peut-être encore améliorée », assure-t-il.
De son côté, le Dr Vincent Feuillie, référant de la compagnie tricolore, rappelait cet été dans une interview donnée au média spécialisé Egora.fr qu'« une étude menée il y a quelques années a montré que le taux de survie pour un arrêt cardiorespiratoire est supérieur à bord d’un avion ». Plus important en tout cas que dans le cas de malaises qui surviennent dans le cadre privé, à domicile, et sans témoins.