CONFLITAprès l’échec des négos entre Sécu et médecins, bientôt la case arbitrage ?

Consultations : Faute d’accord, les nouveaux tarifs bientôt fixés par un « arbitre » ?

CONFLITL’Assurance maladie et les médecins ne devraient pas, selon le ministre de la santé, parvenir à un accord sur la nouvelle grille des tarifs des consultations
Anissa Boumediene

Anissa Boumediene

L'essentiel

  • Après plusieurs mois de négociations, Assurance maladie et médecins ont jusqu’à ce mardi soir pour trouver un accord sur la grille tarifaire des consultations.
  • Mais les propositions formulées par l’Assurance maladie et le gouvernement ne satisfont pas les médecins, qui refusent de signer un accord de convention.
  • Faute d’accord, c’est désormais par la voie d’un arbitrage qu’une nouvelle convention, valable pour les cinq prochaines années, devrait voir le jour dans les mois à venir.

Pas d’accord en vue. Au terme de plusieurs mois d’échanges tendus, les six syndicats représentatifs des médecins libéraux ont jusqu’à mardi soir pour dire s’ils acceptent ou non la nouvelle grille de tarifs proposée par l’Assurance maladie pour les cinq prochaines années.

Mais vraisemblablement, « il n’y aura pas d’accord d’ici mardi soir, c’est à peu près certain », a déclaré ce lundi matin sur France Inter le ministre de la Santé François Braun, prenant acte de l’échec des négociations. Alors, faute d’accord, à quoi faut-il s’attendre ? Ce bras de fer entre médecins d’un côté et Sécu et gouvernement de l’autre peut-il mener à autre chose qu’une impasse ? Les médecins peuvent-ils encore obtenir une revalorisation satisfaisante sans passer par un accord ? Pas sûr.

Quelles propositions ont été faites ?

Dans le cadre des négociations, la Sécu proposait une enveloppe annuelle de 1,5 milliard d’euros, prévoyant notamment de revaloriser l’ensemble des consultations médicales de 1,50 euro. Soit 26,50 euros pour le tarif de base des généralistes, maintenu à 25 euros depuis 2017. Autre mesure proposée : le « contrat d’engagement territorial », ouvrant la voie à une consultation à 30 euros pour les généralistes, « à condition - au choix – rappelle-t-on dans l’entourage du ministre de la Santé, de voir davantage de patients, de consulter le samedi matin, ou encore d’exercer dans un désert médical ». Des conditions déjà remplies par plus de 40 % des médecins, selon le ministère, « et qui leur auraient permis de gagner en moyenne 20.000 euros de plus par an, tout en demandant un effort supplémentaire aux autres pour répondre aux besoins de santé des Français », insiste l’entourage du ministre, pour qui « la revalorisation sans condition n’était pas une option », surtout au vu des « sommes colossales » en jeu.


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Quelles ont été les réponses des syndicats ?

Les syndicats sont massivement contre les propositions mises sur la table. Le syndicat de généralistes MG France a exprimé son refus « à l’unanimité » dans le cadre d’un vote interne, a souligné sa présidente Agnès Gianotti. « MG France refuse un texte qui conditionne la simple mise à niveau du tarif de leur acte de base à des contraintes supplémentaires, a réagi ce lundi le premier syndicat des généralistes. Le gouvernement n’a pas compris le malaise de cette profession, et l’Assurance maladie n’a pas mesuré le manque d’attractivité de cette spécialité médicale complexe, dont les honoraires moyens restent inférieurs de 40 % aux honoraires moyens des autres spécialités ». Un avis partagé par le syndicat Avenir Spé-Le Bloc, qui regroupe les spécialistes, et qui a fait savoir dès dimanche son opposition au texte.

Or, ces deux organisations poids lourds représentent plus de 30 % des médecins dans chacune dans leurs catégories, et sans elles, le projet d’accord soumis en fin de semaine dernière par l’Assurance maladie ne peut aboutir. D’autant que cette opposition ferme est partagée par le Syndicat des médecins libéraux (SML), qui a dénoncé ce lundi une proposition « anti-libérale », et par l’Union française pour une médecine libre (UFML), qui s’est déclaré contre ce projet de convention « dès le début des négociations », a rappelé son président, le Dr Jérôme Marty.


« On passe à côté d’une occasion d’améliorer la prise en charge de nos concitoyens », a pour sa part estimé François Braun, jugeant que « les syndicats de médecins ne sont pas responsables ». Une déclaration qui a agacé le Dr Marty : « Quand le ministre dit que les syndicats sont irresponsables, c’est qu’il juge que les médecins, dont il a la charge, sont irresponsables, ce qui est scandaleux. C’est le gouvernement qui est passé à côté de cette négociation et cette défaite est à mettre à la boutonnière de Macron. Nous sommes des libéraux qui travaillons déjà 55 heures par semaine, on veut bien faire notre part, mais on n’a déjà pas le temps de répondre aux besoins de tous nos patients qu’on nous demande d’en voir encore plus. Or, on ne veut pas faire de la médecine de merde en ne les voyant que cinq minutes. Si le gouvernement veut une réforme digne de ce nom, il doit sérieusement revoir sa copie. »

Que va-t-il se passer s’il n’y a pas d’accord ?

Aucun accord ne devrait être conclu avant ce mardi soir. Auquel cas, il faudra en passer par la case arbitrage pour élaborer une nouvelle convention. « Les parties prenantes aux négociations ont désigné en amont une arbitre, Annick Morel, ancienne présidente du Haut conseil pour l’avenir de l’Assurance maladie, qui a trois mois pour entendre tous les protagonistes et proposer au ministre un règlement arbitral qui vaudra convention pour les cinq prochaines années », a indiqué ce lundi l’entourage de François Braun.

Dans ce cadre, l’enveloppe allouée à cette convention devrait être revue à la baisse : « le ministre n’aura pas envie de donner la même chose que dans le cadre d’un accord signé », confie-t-on encore, du côté du ministère. De quoi faire grincer des dents du côté des syndicats de médecins, dont certains agitent désormais la menace d’un déconventionnement qui leur permettrait de fixer librement leurs tarifs, « mais sans que leur prise en charge ne soit remboursée aux patients par la Sécu », rappelle-t-on au ministère. Une pratique qui concerne actuellement « un peu moins de 1 % » des praticiens.


notre dossier sur le tarif des consultations

Il faudra attendre fin mai pour découvrir la teneur du projet de convention soumis par l’arbitre au ministre de la Santé, qui, après un délai de quelques semaines, le validera… ou pas. « En cas de validation, il faudra compter un délai de six mois pour l’entrée en vigueur de toute mesure impliquant une revalorisation financière, précise l’entourage du ministre. Si l’arbitrage proposé n’aboutissait pas à un nouveau texte, c’est l’ancienne convention qui continuerait de s’appliquer, mais on estime que le règlement arbitral va aboutir ».