préventionPourquoi faire de la prévention médicale destinée aux 25, 45 et 65 ans ?

Consultations gratuites : Pourquoi faire de la prévention destinée aux 25, 45 et 65 ans ?

préventionLe ministre de la Santé a annoncé la mise en place d’une mesure de consultations préventives gratuites à des âges clé pour la santé
Cécile De Sèze

Cécile De Sèze

L'essentiel

  • Les Français âgés de 25, 45 et 65 ans auront la possibilité de consulter gratuitement un médecin généraliste, a annoncé le ministre de la Santé François Braun.
  • Une mesure qui permettra de pallier un certain retard en termes de prévention dans le domaine de la santé, estime Agnès Giannotti, présidente de Médecins généralistes de France, contactée par « 20 Minutes ».
  • La mise en place devra toutefois être concrétisée alors que la France ne parvient pas à combler son déficit médical dans certaines régions et que la profession attire moins qu’avant.

C’était une promesse de campagne du candidat Emmanuel Macron en 2022 et une mesure réclamée depuis des années par certains médecins. Le ministre de la Santé, François Braun, a annoncé dans Le Journal du dimanche du 18 septembre la mise en place de consultations gratuites destinées aux personnes âgées de 25, 45 et 65 ans qui doivent mettre l’accent sur la prévention en termes de santé.

Pour Agnès Giannotti, présidente de Médecins généralistes de France (MGF) et contactée par 20 Minutes, cette mesure est bien accueillie au vu du « retard accumulé » sur la question de la prévention dans notre pays. « Cela nous paraît important d’avoir des consultations dédiées », ajoute-t-elle, enthousiaste. « Notre pays n’est pas bon en termes de prévention », mais « nous avons décidé d’agir », a concédé le ministre sur France inter lundi matin.

Un retard dans la prévention

François Braun a bien insisté sur ce point dans le JDD : « On entre dans l’ère de la prévention ». Aujourd’hui, elle est jugée « insuffisante » au regard de ce que font d’autres pays. « On est très en retard car on ne rembourse que le soin », confirme Agnès Giannotti.

Pourtant, il y a un réel besoin de contrer les inégalités sociales face à la santé et de pousser les plus défavorisés à se rendre chez le médecin pour des bilans réguliers. Ceux qui sont les plus éloignés du soin sont ceux qui sont les plus touchés par ces inégalités. Cette gratuité sera-t-elle suffisante ? « Cela casse une certaine barrière financière, et c’est déjà quelque chose », répond la médecin généraliste. Pour elle, on voit ce retard pris « dans la société entière », pas la hausse des maladies chroniques, l’obésité ou le diabète.

Cette mesure de gratuité doit également pousser des catégories de personnes, notamment celles de 25 ans qui n’ont pas de problèmes chroniques et donc se rendent moins souvent chez le médecin, à consulter et être éduquées sur leur santé. Elle devra s’accompagner d’une campagne de prévention de santé publique globale. « Cela fera partie d’un tout », espère Agnès Giannotti. Selon le ministre, « nous allons mieux nous occuper des enfants, qui bénéficient de 20 examens jusqu’à 16 ans, mais aussi suivre ces générations au cours de leur vie ». « Nous allons avoir cette logique d’aller vers les personnes les plus éloignées du soin », a-t-il ajouté sur France Inter.

Pourquoi choisir ces âges ?

Les âges choisis par le ministre ne sont pas anodins. « Il s’agit de moments charnières dans la vie des adultes, confirme Agnès Giannotti. A 25 ans, c’est l’entrée dans l’âge adulte, dans la vie active, il faut de la prévention également sur les risques de violences, ceux liés aux infections sexuelles, à l’addiction quelle qu’elle soit, à l’obésité ou au diabète, et c’est un âge auquel on ne tombe pas gravement malade alors qu’il reste important d’aller voir son médecin ». C’est aussi l’âge des rappels de vaccins qui ne sont pas toujours à jour. Néanmoins, ces âges restent « indicatifs », a précisé le ministre.

Les personnes de 45 ans vont davantage être sensibilisées sur les maladies chroniques et incitées au dépistage de plusieurs cancers (du sein, du côlon ou de la prostate) car « si c’est à partir de 50 ans que l’on va insister sur le dépistage, c’est important de leur expliquer avant », estime la médecin généraliste. Là aussi, des questions sur l’environnement de travail et l’environnement privé vont pouvoir être abordées, et toujours les risques liés aux relations sexuelles. « Ce n’est pas inutile d’en remettre une couche pour les personnes qui changent de partenaire ou divorcent », ajoute-t-elle.

Enfin, à 65 ans, le médecin va aborder des questions liées à la retraite, au changement de cadre de vie et commencer la prévention sur la perte d’autonomie. « Refaire le point tous les 20 ans, ça me paraît important », abonde Agnès Giannotti.

Quelle mise en place concrètement ?

Cette mesure devrait être mise en place dès 2023, mais elle n’a pas fait l’objet de consultation des différents syndicats de médecins, s’insurge de son côté Jean-Paul Hamon, médecin généraliste et Président d’honneur de la Fédération des médecins de France, contacté par 20 Minutes. « Il a décidé ça tout seul dans son coin sans syndicat représentatif », regrette-t-il.

Et comment mettre concrètement en place ces consultations quand le pays est touché par « une pénurie de médecins, s’interroge-t-il. Si c’est pour faire une consultation sans moyens d’action sur ce qu’on veut prévenir, ça ne sert pas à grand-chose ». Rappelons que près de 7,5 millions de Français ont un « accès limité » à un médecin généraliste, selon les chiffres de l’Association des maires de France (AMF).



« Il y a une grande partie des personnes qui vont profiter de cette consultation alors qu’elles n’en ont pas besoin », abonde Jean-Paul Hamon. Selon lui, les médecins ont besoin de temps, d’une consultation longue et complète afin de faire de l’accompagnement, comme pour les personnes en surpoids. Le médecin plaide alors davantage pour des consultations dédiées par maladie ou complications, comme pour l’obésité ou l’addiction. « Ça aurait plus de sens, tranche-t-il. De la prévention, on en fait déjà tous les jours avec nos patients, qu’il s’agisse du rappel de vaccins comme du dépistage de cancers. Cela montre que le ministre ne sait pas ce que c’est le métier de médecin généraliste. » La mesure proposée par François Braun sera intégrée au prochain projet de loi de financement de la Sécurité sociale, soumis au parlement.