La fluvoxamine, un antidépresseur, ne doit pas être utilisée contre le Covid en l’état actuel des connaissances, ont estimé ce mardi les autorités sanitaires françaises, jugeant insuffisants les quelques travaux allant dans le sens d’un bénéfice. « Les données disponibles à ce jour, du fait de leurs limites méthodologiques, ne permettent pas d’étayer un bénéfice clinique de la fluvoxamine en traitement curatif de la maladie Covid-19 », a résumé dans un communiqué l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM).
La fluvoxamine, largement utilisée comme antidépresseur, est l’un des rares médicaments déjà existants qui ont donné des résultats intéressants contre les formes graves de Covid. Contrairement à des pistes désormais discréditées comme la chloroquine ou l’ivermectine, quelques études crédibles laissent penser qu’elle peut réduire le risque de complications. Une telle perspective est notamment intéressante car le coût d’un tel traitement, depuis longtemps en circulation, serait bien inférieur à celui des médicaments anti-Covid développés spécifiquement dans ce but, comme la pilule Paxlovid de Pfizer.
« Cette position peut tout à fait évoluer et être révisée »
Toutefois, selon l’ANSM, l’état actuel des connaissances reste insuffisant pour appuyer un tel usage. « Les données disponibles aujourd’hui, et je dis bien aujourd’hui (…), ne sont pas suffisantes pour étayer un rapport bénéfice-risque présumé favorable dans cette indication », résume Philippe Vella, spécialiste des antidépresseurs à l’ANSM. Une partie des études disponibles ont observé après coup qu’il y avait moins de complications chez les patients traités par fluvoxamine, mais ne permettent pas de s’assurer d’un lien direct de cause à effet.
D’autres, plus rares, ont réellement cherché à estimer les bénéfices de la fluvoxamine, comparée à un placebo, mais, pour l’ANSM, elles présentent des biais trop importants.
La plus vaste étude, menée au Brésil et publiée fin 2021, a notamment comme défaut d’avoir mélangé deux critères d’évaluation : le risque de rester au-delà de quelques heures dans un service d’urgence, et celui d’être hospitalisé après plusieurs semaines. « On n’est pas au même niveau de sévérité dans les critères », a remarqué Philippe Vella.
L’ANSM juge aussi que ces études ne détaillent pas assez le risque d’effets indésirables de la fluvoxamine. Certes, son usage comme antidépresseur est bien documenté, mais elle serait donnée à des doses et un rythme bien différents contre le Covid. « Cette position, elle peut tout à fait évoluer et être révisée si de nouvelles données venaient à émerger », a toutefois conclu Philippe Vella, souhaitant que des études plus vastes soient mises en œuvre.