Covid-19 : Pourquoi le virus a recommencé à circuler davantage dans le Grand-Est et en Bretagne qu’ailleurs
EPIDEMIE•L’une des hypothèses privilégiées concerne « la reprise de la vie en collectivité » après la fin des congés scolaires de la zone BLuc Sorgius et Camille Allain
L'essentiel
- Depuis deux semaines, les autorités sanitaires constatent « une reprise épidémique forte » sur l’ensemble du territoire français.
- Plusieurs régions, dont le Grand-Est et la Bretagne, ont été touchées plus tôt que les autres par cette reprise.
- Qu’est-ce qui explique ce décalage ? Plusieurs hypothèses sont avancées.
Les chiffres ne mentent pas : pour la deuxième semaine consécutive dans le Grand-Est, « on observe une augmentation de 30 % des cas de Covid-19, avec 71.600 cas pour l’ensemble de la région, contre 55.000 la semaine précédente », observe Michel Vernay, responsable de Santé publique France dans la région Grand-Est. « Il y a une reprise épidémique forte. »
Plus forte qu’ailleurs ? L’épidémiologiste se veut prudent : « J’aurais du mal à vous dire s’il y a une spécificité régionale, car on observe la reprise dans toutes les régions, qui touche toutes les classes d’âge, avec des amplitudes variant selon les départements. » Michel Vernay confirme cependant que « le nombre de décès dans les établissements de soins, qui s’élève à 80 en moyenne sur les deux dernières semaines, ne baisse plus ».
Un moindre respect des gestes barrières
Le responsable de Santé publique France dans le Grand-Est avance trois hypothèses pour expliquer les raisons d’une reprise anticipée par rapport à d’autres régions : « La première, c’est le moindre respect des gestes barrières, déjà constaté dès février. La deuxième, c’est une circulation croissante du sous-lignage BA.2 du variant Omicron, un peu plus contagieux que le BA.1, de l’ordre de 17 %. »
Enfin, l’épidémiologiste note également « une reprise chez les 0-9 ans et les 30-39 ans » : « On peut penser que c’est lié à la reprise de la vie en collectivité et à la fin des vacances scolaires, comme nous l’avons constaté dans d’autres régions de la zone B. »
Parmi elles, la Bretagne. Le rebond épidémique dans le Finistère et les Côtes-d’Armor n’est pas étonnant. Si la Bretagne compte la meilleure couverture vaccinale française, elle a aussi été moins touchée par le virus. Les habitants des quatre départements ont été moins exposés au Covid-19 depuis son arrivée sur notre territoire au printemps 2020 et présentent une moins bonne immunité naturelle.
On peut également souligner que le taux d’incidence était moins redescendu en Bretagne qu’ailleurs. Tout simplement parce que la vague Omicron a frappé la région plus tard et qu’elle a donc mis plus de temps à se dissiper. « Il y a un petit effet décalage dans la région. La décrue en Bretagne sera sans doute un peu décalée », estimait Véronique Anatole-Touzet, directrice du CHU de Rennes, fin janvier.
64 classes fermées dans l’académie de Rennes
Dans le Finistère, certains établissements scolaires ont même décidé de réimposer le port du masque à leurs élèves et au personnel, notamment à Brest. « Nous avons fait partie de la première zone des vacances de février. Le brassage de population a été plus important ici qu’ailleurs », note la préfecture du Finistère.
Le retour des enfants à l’école remonte déjà au 21 février dans la région et les cas dans les établissements scolaires restent nombreux. Vendredi, 64 classes étaient fermées dans l’académie de Rennes. Un peu plus de 3.500 élèves étaient positifs sur les 7 derniers jours sur un total de plus de 600.000 élèves. Une part faible (0,59 %), mais qui augmentait légèrement avec près de 500 nouveaux cas en 24 heures.
« Il faut absolument protéger les personnes fragiles et leur entourage »
Dans ce contexte, Nicolas Lefebvre, chef de service des maladies infectieuses et tropicales aux Hôpitaux universitaires de Strasbourg, souligne « l’intérêt de garder le masque comme c’est recommandé », alors que la reprise épidémique du Covid-19 est conjuguée à une épidémie de gastro-entérite et celle, tardive, de grippe.
Au risque d’ajouter un peu plus encore à « la tension hospitalière au niveau des urgences », insiste le spécialiste : « Il faut absolument protéger les personnes fragiles et leur entourage. » Avant de conclure sur « un petit message d’espoir » : « A mon avis, on commence à avoir un minimum apparaître au niveau de l’immunité collective. » Michel Vernay, lui, enjoint la population à « encore fournir un effort pour passer un été relativement serein ».