Une chercheuse marseillaise en pointe sur un cancer agressif du cerveau

Marseille : Une chercheuse récompensée pour ses recherches de pointe sur le cancer du cerveau

SANTELa Fondation ARC finance à hauteur de 50.000 euros le projet de recherche d’Aurélie Tchoghandjian sur les glioblastomes
Caroline Delabroy

Caroline Delabroy

L'essentiel

  • Les glioblastomes sont les tumeurs cérébrales les plus agressives et les plus fréquentes chez l’adulte.
  • Depuis 2005, le traitement reste inchangé et le taux médian de survie est de 14 mois.
  • Une chercheuse du CNRS développe à Marseille une approche inédite visant à cibler la tumeur et son micro-environnement, via de petites molécules synthétiques. Explications.

Son projet de recherche sur les tumeurs les plus agressives du cerveau a retenu l’attention de la Fondation ARC. Pendant deux ans, Aurélie Tchoghandjian, chercheuse au CNRS à Marseille, va ainsi pouvoir bénéficier avec son équipe d’un soutien financier de 50.000 euros pour explorer une nouvelle piste de traitement des glioblastomes. Ces tumeurs cérébrales touchent près de 2700 nouvelles personnes chaque année en France. « L’enjeu thérapeutique est majeur, ce sont des cellules que l’on ne peut pas soigner », souligne la chercheuse, qui a consacré sa thèse de neurosciences aux cellules-souches cancéreuses.

Contre ce cancer du cerveau, le protocole « standard » est inchangé depuis 2005. Il consiste, quand cela est possible, en une intervention chirurgicale, suivie d’une radiothérapie et d’une chimiothérapie. « Depuis cette date, malgré toutes les connaissances sur ces tumeurs, nous ne sommes pas arrivés à trouver de meilleur traitement », relève Aurélie Tchoghandjian. Des pistes ont bien été testées par des équipes internationales, comme celle consistant à bloquer les vaisseaux de ces tumeurs très vascularisées, capables de créer leurs propres vaisseaux pour croître tant « elles ont besoin de manger », comme l’explique la chercheuse. Mais cette approche s’est révélée sans résultat sur la survie des patients, en moyenne de 14 mois, malgré l’amélioration de qualité de vie des malades au jour le jour.

La Fondation Arc soutien le projet de recherche d'Aurélie Tchoghandjian sur le glioblastome.
La Fondation Arc soutien le projet de recherche d'Aurélie Tchoghandjian sur le glioblastome. - Fondation ARC

Une nouvelle approche

Dont acte, Aurélie Tchoghandjian formule une autre hypothèse, qu'elle espère à terme mener vers un essai clinique. « L’idée est d’essayer d’utiliser des molécules qui peuvent agir sur la tumeur mais aussi son environnement ». « Je m’intéresse à de petites molécules synthétiques dérivées de protéines appelées SMAC, et capables de réenclencher le processus de mort des cellules cancéreuses, poursuit-elle. On sait qu’elles peuvent être de bonnes candidates pour cibler la vascularisation cérébrale.»

Grâce à des premiers tests, elle a pu observer une diminution de la taille des tumeurs et la restauration d’un réseau vasculaire dit normal, autrement dit qui n'est pas dense ni noueux. Plus encore, elle a constaté un recrutement abondant de cellules immunitaires venant de la périphérie, des tissus du cerveau. Et la chercheuse de s’interroger : « Ces cellules sont-elles bonnes ou mauvaises pour la tumeur ? Contribuent-elles à la régression de la tumeur, ou au contraire participent-elles à la mise en place d’une résistance au traitement ? ».

30 projets soutenus en 2018 en Paca

« Ce projet est innovant dans le sens où il essaie de cibler les cellules tumorales mais aussi les cellules du micro-environnement, poursuit François Dupré, directeur général de la Fondation ARC. Ce type d’approche n’a jamais été testé. » Si la chercheuse figure parmi les heureux sélectionnés de l’année – en 2018, la fondation a soutenu en région Paca 30 projets, pour un montant global de 2,1 millions d’euros – , c’est aussi pour la « forte capacité explicative » de son projet.

De fait, il suffit d’écouter les mots clairs et choisis d’Aurélie Tchoghandjian pour saisir les enjeux de sa recherche menée au sein de l’Institut de neurophysiopathologie d’Aix-Marseille Université. Et comprendre que si ces fameuses « SMAC » ont bel et bien un effet positif sur la tumeur, elles n’y suffiront pas à elles seules pour combattre ce cancer : « Ce sont des tumeurs très complexes, qui ont aussi des facteurs génétiques, rappelle-t-elle. On ne pourra pas les traiter qu’avec une molécule. Il faudra en associer une autre et trouver laquelle. » Les premiers résultats des tests sont attendus pour l’été prochain.