La cigarette électronique aiderait à arrêter de fumer, mais continue à faire peur
INTERVIEW•Ce mercredi, l’agence Santé Publique France publie une étude sur l’usage de la cigarette électronique en FrancePropos recueillis par Romarik Le Dourneuf
L'essentiel
- La cigarette électronique est apparue vers 2010 en France.
- En 2017, 700.000 personnes déclarent avoir arrêté le tabac grâce à la vapoteuse.
- Les effets à long terme des produits utilisés sont encore méconnus, ce qui entraîne une défiance de beaucoup de fumeurs, selon Guillemette Quatremère, la responsable de l’étude.
Et si Lucky Luke avait troqué son (ex)-mégot contre une cigarette électronique ? Il aurait alors imité 3,8 % des Français. C’est ce que révèle le baromètre de Santé Publique France publié ce mercredi. L’étude montre le succès grandissant de la vapoteuse, laquelle garde toutefois une image mitigée. 20 minutes a interrogé Guillemette Quatremère, responsable de l’étude, pour en savoir plus.
Le baromètre se base sur la période 2010-2017. Sur cet intervalle, le nombre d’utilisateurs a explosé. Qui sont les vapoteurs français ? Et combien sont-ils ?
En premier lieu, les vapoteurs ont presque tous un lien avec le tabac. Qu’ils fument en parallèle ou ne touchent plus une cigarette, ils ont tous été fumeurs. Il faut préciser que l’étude porte sur les personnes âgées de 18 à 75 ans. D’ailleurs, 90 % des vapoteurs utilisent du produit avec nicotine. En 2017, 3.8 % de la population affirme vapoter, et 2.7 % le fait quotidiennement. Ce sont en majorité des hommes, près de 6 sur 10. Parmi ces vapoteurs de tous les jours, les personnes ayant un baccalauréat ou plus sont significativement plus nombreuses. Quasiment 40 % des utilisateurs de cigarette électronique continuent de fumer du tabac quotidiennement, contre 50 % qui n’y touchent plus. Enfin, moins de 1 % de cette population n’a jamais fumé.
La cigarette électronique permet-elle réellement d’arrêter de fumer ?
Oui, c’est assez clair. Mais attention, sur ce type de sujet, il est toujours nécessaire de faire des études scientifiques à long terme. Toutefois, certains chiffres parlent déjà. La part de fumeurs quotidiens a diminué de 64.5 % à 39.7 % chez les vapoteurs. Cela signifie bien que la cigarette électronique se substitue petit à petit au tabac chez les utilisateurs. Depuis son arrivée en France, 700.000 personnes affirment que vapoter les a aidés à arrêter de fumer. C’est d’ailleurs l’intérêt principal à son expérimentation, 6 vapoteurs ou ex-vapoteurs sur 10 déclarant avoir essayé pour arrêter de fumer. Et 30 % simplement pour diminuer leur consommation de tabac. Un impératif à l’arrêt du tabac : pour être efficace, l’utilisation de la cigarette électronique doit être exclusive.
De nombreuses études contradictoires ont été publiées sur les effets de la cigarette électronique sur la santé. Qu’en sait-on aujourd’hui ?
En effet, des études sortent presque tous les jours. Pour le moment, la très grande majorité des scientifiques et médecins s’accordent à dire que la cigarette électronique est nettement moins nocive que le tabac. Les effets à court terme sont bénins. Le produit utilisé ne contient pas les 4.000 substances toxiques qu’on trouve dans une cigarette. L’ANSES travaille dessus. Nous devons tout de même attendre des études incontestables et laisser le temps à la recherche. Il faut notamment rappeler que la nicotine, présente dans le produit pour vapoteuse, a un très fort pouvoir d’addiction.
L’étude montre que la moitié de la population pense que la cigarette électronique est au moins aussi nocive, voire plus nocive que le tabac…
Nous avons plusieurs hypothèses. D’abord, il y a souvent une confusion entre les effets néfastes du goudron, du monoxyde de carbone ou d’autres produits avec la nicotine. Les gens ont tendance à penser que deux produits contenant de la nicotine auront les mêmes effets. C’est aussi le reflet de la méconnaissance que nous avons des conséquences à long terme de la vapote. Les gens « connaissent » les dangers du tabac. Or, les doutes que nous avons sur le produit des e-cigarettes entraînent une méfiance, et même une défiance.