ORDONNANCELa loi santé, le remède pour lutter contre les «déserts médicaux»?

«Déserts médicaux»: Le projet de loi santé examiné lundi au Sénat

ORDONNANCEPrésenté par le gouvernement comme un levier pour garantir un meilleur accès aux soins pour tous, le projet de loi santé arrive lundi au Sénat
VRB avc AFP

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Mesures incitatives ou régulation ? Après les députés, c’est au tour des sénateurs de proposer lundi leurs remèdes pour lutter contre les difficultés d’accès aux médecins dans les « déserts médicaux ».

Avec son projet de loi pour « l’organisation et la transformation du système de santé », la ministre de la Santé Agnès Buzyn entend « tout faire pour répondre à l’angoisse de la désertification médicale ». Mais pas question de remettre en cause la liberté d’installation des futurs médecins. Pour la ministre, un étudiant en médecine n’est pas un « pylône électrique » que l’on peut déplacer.

Une batterie de mesures

La mesure phare du texte – la suppression du « numerus clausus » qui limite le nombre d’étudiants admis en deuxième année de médecine – sera effective à la rentrée 2020, avec l’objectif d’augmenter d’environ 20 % le nombre de médecins formés. Mais la réforme ne portera ses fruits que dans une décennie au bas mot, correspondant à la durée de formation d’un médecin.

Une batterie de mesures vise à pallier le manque de médecins à court terme. Le dispositif de médecin adjoint, qui permet à un interne d’assister un médecin en cas d’afflux saisonnier en zone touristique, sera par exemple étendu aux zones « sous-denses ». Et le texte redistribue un certain nombre de tâches ponctuelles vers les pharmaciens, infirmiers ou sages-femmes.

La plupart des groupes au Sénat suggèrent de revoir le système de stages des étudiants en médecine pour les orienter davantage vers l’exercice en libéral et les zones déficitaires.

Au Sénat, c’est médecine douce…

Comme la ministre, le président de la commission des Affaires sociales Alain Milon (LR) proscrit des mesures d'« incitation des jeunes médecins à un ancrage rapide auprès d’un territoire ». Les sénateurs ont ainsi adopté en commission un amendement pour exonérer les médecins de cotisations sociales, à la condition qu’ils s’installent dans les trois années qui suivent l’obtention du doctorat, et s’engagent pour cinq ans.

Un autre amendement porté par Alain Milon vise à ce qu’un docteur en médecine n’ait pas le droit de faire plus de trois années de remplacement avant son installation, mesure qui a fait bondir des syndicats de jeunes médecins. Le PS, très mobilisé sur la question, propose de son côté que la dernière année d’études en 3e cycle (médecine générale et autres spécialités déficitaires) soit une année de pratique « en autonomie », réalisée en cabinet ou en maison de santé, dans les zones manquant de médecins.

… Ou remède de cheval

Saisie pour avis, la commission de l’Aménagement du territoire défend pour sa part une « régulation » des installations des médecins dans les territoires, tout en réfutant le terme de « coercition ». Près de « 9 % de la population française vit aujourd’hui dans un désert de médecins généralistes, soit près de 6 millions de personnes », soulignent son président, Hervé Maurey, et le rapporteur pour avis, Jean-François Longeot, tous deux centristes.

Ce dispositif de « régulation » passerait en premier lieu par la négociation conventionnelle entre médecins et assurance-maladie. A défaut d’accord, et à titre expérimental, il prévoit de limiter les installations dans les zones sur-dotées selon le principe « une arrivée pour un départ ».


Notre dossier sur les déserts médicaux

Initialement favorables au conventionnement sélectif, les communistes sont aujourd’hui « dans la réflexion ». Pour le sénateur PCF Pierre Laurent, « ce qui est certain, c’est qu’il faut une régulation d’installation, qu’elle soit incitative ou coercitive. La liberté totale n’est plus possible ». Son groupe plaide en parallèle pour « un maillage territorial en centres de santé », dont les conditions d’exercice répondent selon lui aux aspirations des jeunes médecins.