SANTEComment fonctionnent les organismes de certification d'implants mammaires?

Implants mammaires: Comment fonctionnent les organismes de certification?

SANTEDes femmes portant des implants mammaires de marque Allergan, dont l’une souffre d’un cancer, déposent plainte à Paris et à Marseille pour « mise en danger délibérée de la vie d’autrui »
Thibaut Le Gal

T.L.G.

L'essentiel

  • Des femmes portant des implants mammaires de marque Allergan, ont déposé plainte à Paris et à Marseille pour « mise en danger délibérée de la vie d’autrui ».
  • La mise sur le marché d'un dispositif médical comme les prothèses s'effectue dans le cadre de la législation européenne.
  • En novembre, une vaste enquête internationale réalisée par 59 médias révélait les défaillances des mécanismes de contrôle et le manque de traçabilité pour ce type de produits.

Une nouvelle affaire de prothèses ? Des femmes portant des implants mammaires de marque Allergan, dont l’une souffre d’un cancer, déposent plainte à Paris et à Marseille pour « mise en danger délibérée de la vie d’autrui », a-t-on appris jeudi auprès de leurs avocats. Les deux plaintes visent « à la fois le laboratoire, l’organisme de certification et les autorités sanitaires », assure l’un des avocats, Me Molina, ajoutant « redouter un scandale sanitaire de grande ampleur ». 20 Minutes revient sur le rôle des organismes de certifications, déjà mis en cause dans l’affaire des prothèses PIP.

Qu’est-ce qu’un dispositif médical ?

Les implants mammaires sont destinés à restaurer ou augmenter le volume des seins, dans le cas de reconstruction mammaire, de malformation congénitale ou dans un but simplement esthétique. Ces implants appartiennent à la catégorie des dispositifs médicaux. Contrairement au médicament, un dispositif médical « correspond à tout instrument, appareil, équipement, matière, produit […] utilisé à des fins médicales chez l’homme, et dont l’action principale voulue n’est pas obtenue par des moyens pharmacologiques, immunologiques ou métaboliques », assure l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (Ansm).

Les dispositifs médicaux sont classés en fonction du niveau de risque lié à leur utilisation. Les implants mammaires appartiennent à la catégorie 3, la classe de risque la plus élevée, au même titre que les prothèses de hanche par exemple.

Comment ces dispositifs sont-ils mis sur le marché ?

La mise sur le marché d’un dispositif médical s’effectue dans le cadre de la législation européenne. La loi impose aux fabricants de faire certifier leur produit par un organisme notifié, lui-même habilité par les agences nationales de santé de chaque pays (En France, l’ANSM). Cette validation se traduit par la mise en place d’un marquage CE (Conformité européenne) sur leur dispositif permettant la commercialisation dans l’ensemble des pays de l’Union européenne. « Des audits sont conduits périodiquement chez le fabricant par l’organisme notifié. Le marquage CE fait l’objet d’un renouvellement périodique », estime l'ANSM. En décembre, Allergan avait ainsi perdu le marquage CE pour ses implants mammaires à enveloppe texturée parce qu’il n’avait pas pu présenter des données additionnelles sur ces produits dans les délais impartis.

Comment expliquer les problèmes ?

En novembre, une vaste enquête internationale révélait les défaillances des mécanismes de contrôle et le manque de traçabilité pour ce type de produits. L’investigation, baptisée « Implant Files », dénonçait notamment la facilité avec laquelle les fabricants peuvent obtenir le fameux « marquage CE » auprès d’un organisme certificateur privé de leur choix et rémunéré par leurs soins.

En 2014, pour démontrer les failles du système, une journaliste néerlandaise avait ainsi fait passer pour un implant vaginal un simple filet à mandarines, et son « produit » avait obtenu sans difficulté sa certification européenne. L’enquête déplorait également des échanges peu transparents entre autorités de santé concernant ces incidents graves.

Des organismes ont-ils déjà été condamnés par la justice ?

Oui. En novembre, le certificateur allemand des prothèses mammaires PIP, a été condamné à indemniser environ 400 patientes suédoises victimes des implants défectueux, une décision dont l’entreprise va faire appel. En janvier 2017, TÜV avait déjà été condamné à verser 60 millions d’euros de provisions à 20.000 plaignantes par le tribunal de commerce de Toulon dans un autre volet du dossier. La société a aussi fait appel de cette condamnation.

TÜV est mis en cause pour avoir apporté la certification avant commercialisation des prothèses défectueuses PIP. Le certificateur a réalisé treize contrôles dans les locaux de la société française entre octobre 1997 et janvier 2010, sans jamais constater de manquements à la réglementation.

Que demandent les associations ?

Les dispositifs médicaux « les plus à risque » devraient faire l’objet d’une autorisation de mise sur le marché, au même titre que les médicaments, ont réclamé en décembre six associations, ONG et revues, dénonçant le « lobbying » des industriels auprès de l’Union européenne.

Selon elles, en raison de pressions des fabricants, le règlement européen sur les dispositifs médicaux qui entrera en vigueur en 2020 ne renforce pas suffisamment le contrôle de ces produits.