Prothèses mammaires: L'ANSM réunit un comité d'experts pour statuer sur la sûreté des implants texturés
SECURITE SANITAIRE•Pendant deux jours, le comité d'experts auditionnera des patientes et des professionnels de santé avant se se prononcer sur la sûreté des implants mammaires texturésAnissa Boumediene
L'essentiel
- L’ANSM a créé un comité d’experts indépendants chargé de lui remettre un avis sur la sûreté des implants mammaires texturés.
- Un lien direct a scientifiquement été établi entre ces implants mammaires à enveloppe rugueuse et la survenue d’une forme très rare de cancer : le lymphome anaplasique à larges cellules.
- Le comité d’expert procédera à deux journées d’auditions, puis rendra un avis sur la base duquel l’ANSM se prononcera sur l’utilisation à l’avenir de ces implants mammaires à enveloppe texturée en chirurgie esthétique et reconstructrice.
Deux jours d’auditions avant de se prononcer. Ces jeudi et vendredi, l'Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé (ANSM) réunit un comité d’experts indépendants chargé d’auditionner patientes et professionnels de santé sur la sûreté sanitaire et la fiabilité des implants mammaires texturés, impliqués dans des cas de cancer. Sur la base de ces auditions – à suivre en direct sur la chaîne YouTube de l’ANSM- et des contributions écrites adressées à l’ANSM, ce comité d’experts a pour mission d’émettre un avis sur la place et l’utilisation des implants mammaires texturés en chirurgie esthétique et reconstructrice.
Des implants liés à des cas de cancer
Au cœur des préoccupations et craintes des patientes, des professionnels de santé et de l’agence de santé : la texture même des implants mammaires, qui constituerait un facteur de risque de cancer selon le type de prothèses implantées aux patientes. A ce jour, il existe plusieurs types de prothèses : les implants texturés, qui ont une surface un peu rugueuse, les implants microtexturés et les implants à enveloppe lisse. Problème : un risque de cancer est directement associé aux implants texturés, qui ont largement les faveurs des chirurgiens puisqu’elles représentent 85 % du marché en France, et alors qu’environ 500.000 femmes en France sont porteuses d’implants mammaires.
Or, « depuis 2011 dans l’hexagone, 56 porteuses de ces prothèses à la surface rugueuse ont développé une forme très rare de cancer du système immunitaire : le lymphome anaplasique à grandes cellules (LAGC), rappelle le Dr Christelle Ratignier-Carbonneil, directrice générale adjointe de l’ANSM. Cela a nécessairement conduit à la mise en œuvre d’un programme de surveillance renforcée qui a mobilisé plusieurs institutions, parmi lesquelles l’Institut national du cancer (INCa), la Haute autorité de santé (HAS) et l’ANSM ». En France, l’INCa réunissait déjà en 2015 un groupe d’experts chargés d’étudier la question qui avait conclu à l’existence d’un « lien clairement établi entre la survenue de lymphome anaplasique à grandes cellules et le port d’un implant mammaire ». Et en décembre dernier, le leader mondial du marché, Allergan, perdait son marquage CE lui permettant d’être commercialisé en France et en Europe. Résultat : l’ANSM lui commandait de procéder au rappel de tous ses implants mammaires texturés en stock en France.
C’est donc pour prendre des mesures adaptées aux risques sanitaires liés à ces implants texturés que l’ANSM a décidé de créer un comité d’experts indépendants : le comité scientifique spécialisé temporaire (CSST). « Il est composé d’une sociologue, d’une psychologue, de représentantes d’associations de patientes et de médecins spécialistes en chirurgie plastique, en médecine générale et en gynécologie », détaille la directrice adjointe de l’ANSM.
Des auditions avant de statuer sur l’avenir des implants texturés
Une composition très large pour un comité qui a « vocation à faire un état des lieux de l’utilisation de ces implants mammaires texturés et de réfléchir à leur place aussi bien en chirurgie esthétique que reconstructrice », poursuit le Dr Christelle Ratignier-Carbonneil. Dès ce jeudi, ce CSST démarrera les d’auditions destinées à recueillir « plusieurs positions argumentées et documentées ». A cette occasion, il écoutera des patientes, des représentants associatifs, des professionnels de santé, des sociétés savantes, des représentants des industriels et plusieurs autorités de santé internationales, « pour la parole à l’ensemble des parties prenantes », souligne la directrice adjointe de l’ANSM. Dans un premier temps, le comité auditionnera les premières concernées : des femmes porteuses d’implants mammaires texturés, pour avoir des retours d’expériences personnelles. Il donnera ensuite la parole aux professionnels de santé et s’intéressera à l’intérêt de la pose de ces implants texturés en chirurgie esthétique et reconstructrice, se penchera sur des points précis tels que le résultat esthétique, l’état clinique de la patiente, la pratique chirurgicale et les complications ultérieures liés à ces implants. Enfin, le comité étudiera les alternatives à ces prothèses texturées.
Au terme de ces deux journées d’auditions, « des débats auront lieu au sein du CSST, qui remettra dans les prochains jours un avis à l’ANSM, dévoile le Dr Ratignier-Carbonneil. Puis, sur la base de cet avis, l’ANSM se prononcera dans les prochaines semaines et prendra un certain nombre de mesures et recommandations sur l’utilisation des implants mammaires à enveloppe texturée en chirurgie esthétique et reconstructrice, avec pour seul objectif de garantir la sécurité des patientes ».
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