Grippe: Faut-il porter un masque pour lutter contre l'épidémie?
MALADIE•Alors que l'épidémie touche toutes les régions de France, la question du port du masque, recommandé mais peu utilisé, se poseOihana Gabriel
L'essentiel
- L’épidémie de grippe touche cette semaine toutes les régions de France.
- Si se laver les mains et éviter de sortir de chez soi sont des recommandations qui sont rentrées dans les mœurs, porter un masque reste assez rare en France, contrairement à d’autres pays comme le Japon.
- Pourtant, certains hôpitaux recommandent au personnel soignant de porter un masque chirurgical, un bon réflexe ? 20 Minutes a cherché à en savoir plus.
Devrait-on tous sortir masqués pour lutter contre la propagation de la grippe ? Selon le dernier bulletin de Santé Publique France, aucune région n’est épargnée cette semaine par l’épidémie en forte augmentation.
Si le pic devrait être atteint la semaine prochaine selon l’autorité de veille sanitaire, cette maladie, qui touche chaque année entre 2 et 8 millions de Français et a fait 13.000 morts l'année dernière, devrait encore circuler quelques semaines. Et la vaccination n’est plus vraiment une option : étant donné qu’il faut attendre quinze jours pour que cette protection fasse effet, une fois votre partenaire, enfant ou parent coincé au lit avec 40° de fièvre, il est trop tard. En revanche certaines précautions peuvent peut-être vous permettre de passer entre les gouttes de l’épidémie… ou d'éviter de la propager. Le ministère encourage vivement le personnel soignant et les patients à porter un masque. Et pourtant, contrairement au Japon, le masque reste un réflexe rare et qui fait plutôt peur. Utile, vraiment ?
Protéger les autres du virus
Porter un masque n’est pas nécessaire pour tout le monde. Pour les bien portants, il ne semble pas indiqué de se balader toute la journée masqué, mais c’est une bonne idée pour les malades, tant qu’ils sont contagieux, c’est-à-dire un jour avant l’apparition des symptômes et quatre jours après. En effet, le virus de la grippe se transmet par l’air, via des gouttelettes infectées qui vous atteignent par des postillons, éternuements ou toux. D’où l’intérêt que les personnes malades gardent pour elles leur salive et morve, en portant ce masque chirurgical.
« Ce n’est pas pour soi qu’on porte le masque, mais pour les autres », synthétise Jean-Philippe Santoni, pneumologue et bénévole à la la Fondation du Souffle. Le médecin souligne que cette solution s’impose surtout quand le patient est au contact de personnes fragiles, à savoir nourrissons, jeunes enfants, femmes enceintes, personnes âgées, atteintes de maladies chroniques ou immunodéprimées.
Inutile donc de s’imposer ce bout de tissu pas extrêmement confortable 24 heures sur 24. Car en général, si vous avez vraiment la grippe, votre périmètre se retrouve limité à votre domicile… « Le malade doit le porter s’il sort, va chez le médecin, ou dans des lieux collectifs, souligne Sylvie Behillil, directrice adjointe du Centre National de Référence Virus des infections respiratoires à l’Institut Pasteur. Et bien sûr, dans les services de soins, il est recommandé au personnel soignant d’en porter un. »
Des masques vendus en pharmacie
Comment choisir son masque tout d’abord ? « Il faut acheter en pharmacie, et non sur Internet, un masque chirurgical, en tissu, avec un renfort rigide, conseille le pneumologue. Les masques de cyclistes sont donc inadéquats. Ensuite, il faut bien le placer juste en dessous des yeux et nouer les élastiques ou lacets sur les oreilles de façon à ce que le masque soit adhérent. Enfin, il faut absolument prendre des masques jetables, dès qu’il est mouillé, ce qui arrive quand on tousse, éternue ou fait un effort, la Haute autorité de Santé rappelle qu'il faut le jeter dans une poubelle à couvercle. » Des masques qui sont disponibles dans toutes les pharmacies, et parfois remboursés quand ils sont prescrits par un médecin.
Ne pas oublier les mains
« Le masque ne doit pas devenir une fausse sécurité », prévient le Dr Santoni. L’OMS précise dans un communiqué « le fait de mal utiliser un masque peut en réalité accroître le risque de transmission au lieu de le réduire ». Cette protection ne doit pas dispenser de respecter les conseils habituels de bon sens.
Parmi les règles d’hygiène élémentaires : mettre sa main ou son coude devant sa bouche, utiliser des mouchoirs à usage unique que l’on jette dans une poubelle fermée, éviter de sortir, de parler à quelqu’un à moins d’un mètre (le périmètre de sécurité), et surtout de se laver les mains dès qu’on tousse ou éternue avec du savon ou une solution hydroalcoolique. « Pendant 30 secondes en lavant bien le dos et les espaces entre les doigts », détaille le pneumologue.
« Le virus se transmet par l’air, mais aussi par les mains : donc quelqu’un qui tousse et met ses mains sur la barre du métro partage ses microbes avec la rame », rappelle Sylvie Behillil. « Mais les gens y pensent moins, regrette le pneumologue. Quand vous serrez la main d’un proche, c’est un risque de contamination aussi important que s’il tousse sur vous. Pour les gens qui ont des ordinateurs partagés, il existe des lingettes désinfectantes pour la souris et le clavier.
Efficacité limitée
Mais porter un masque reste seulement une recommandation et non une obligation pas seulement pour des raisons culturelles : l’efficacité de cette mesure peut être remise en question. En effet, l’OMS avance que « dans les établissements de soins, des études évaluant les mesures visant à réduire la propagation des virus respiratoires laissent à penser que le port de masques pourrait réduire la transmission de la grippe ». En revanche, « dans la collectivité, les avantages du port du masque n’ont pas été démontrés, en particulier dans les espaces ouverts, contrairement à ce qui se passe dans les espaces clos où l’on est en contact étroit avec une personne présentant des symptômes de type grippal ».
Une conclusion nuancée par Jean-Philippe Santoni. « Il existe des masques filtrants destinés à protéger les bien portants, mais leur efficacité reste controversée. Ils sont plus épais que le masque chirurgical, avec un dispositif de filtration, le problème, c’est qu’ils sont difficilement supportables plus de quelques heures, et que les personnes risquent de les replacer, avec des mains souillées. »