Des cosmétiques sains, écolos, éthiques et sans se ruiner, c'est possible?
COSMETIQUE•L'association Slow Cosmétique décerne des mentions permettant d'identifier des cosmétiques sains, écologiques et éthiques...Anissa Boumediene
L'essentiel
- Aujourd’hui, de plus en plus de consommateurs veulent des produits cosmétiques exempts de substances toxiques, et qui sont plus respectueux de l’environnement et de la santé.
- L’association Slow Cosmétique décerne des mentions permettant d’identifier ces produits de beauté bons pour la santé et l’environnement.
- Des produits vendus à un prix juste, qui ne nécessitent pas de vider son porte-monnaie pour se les offrir.
Déodorants aux sels d'aluminium et risques de cancer du sein, rouge à lèvres à la paraffine dérivée du pétrole, crème de jour et produits de maquillage au phénoxyéthanol : les produits cosmétiques que l’on utilise au quotidien peuvent contenir un nombre impressionnant de composés chimiques potentiellement toxiques. C’est pour trouver un moyen d’éviter tout cela que le concept de « Slow Cosmétique » a vu le jour. L’objectif : permettre aux consommateurs et consommatrices de trouver des produits cosmétiques « propres », qui soient à la fois efficaces, sans perturbateurs endocriniens, écologiques et rémunérateurs pour ceux qui les fabriquent. Du gagnant-gagnant pour tout le monde ?
Eviter le « brainwashing » et les perturbateurs endocriniens
« La Slow Cosmétique part d’un constat : de nombreuses marques pratiquent le greenwashing, et vous vendent à grand renfort d’emballage vert nature un produit qui est loin d’être bio ou écolo, observe Julien Kaibeck, spécialiste des cosmétiques et auteur du livre Adoptez la Slow Cosmétique (éd. Leduc. s). Et nombreuses sont celles qui font du "brainwashing" pour susciter l’acte d’achat sur des bases qui manquent d’honnêteté, poursuit-il. Une très grande marque qui vous vend très cher un cosmétique "à base d’extrait d’une fleur très rare" vous vend l’idée d’un produit d’exception, exclusif, dont la qualité justifie le prix. Or, quand vous analysez la composition, vous allez généralement constater que la formulation est assez conventionnelle, que l’extrait de fleur en question arrive très loin dans la liste d’ingrédients, ce qui signifie qu’il en contient une quantité infinitésimale. Au final, vous payez très cher un produit qui vous déçoit ».
C’est pourquoi il lance en 2013 l’association Slow Cosmétique, qui remet chaque année une mention à des produits cosmétiques répondant à un cahier des charges très fourni. « Un peu comme le célèbre guide qui décerne des étoiles aux grands restaurants, mais avec les cosmétiques », compare Julien Kaibeck. Un outil qui permet d’éviter les problèmes que l’on peut rencontrer avec les cosmétiques conventionnels : « ils peuvent contenir des substances aux effets perturbateurs endocriniens, comme du phénoxyéthanol, relève Constance Sycinski, coordinatrice de l’association. Ce sont des substances qui peuvent affecter le système hormonal, la fertilité, voire déclencher certains cancers. Si les concentrations se trouvant dans ces produits sont réglementées, il n’y a aucune étude sur l’effet cocktail, lorsqu’on utilise plusieurs produits contenant des perturbateurs endocriniens, avertit la jeune femme. Or, on utilise en moyenne neuf cosmétiques par jour, donc à long terme, ce n’est pas anodin. C’est pourquoi notre mention exclue les cosmétiques contenant du phénoxyéthanol et toute autre substance considérée comme toxique : nous privilégions le principe de précaution ».
Récompenser une démarche globale
Si la mention Slow Cosmétique est proche d’un label bio, « c’est toutefois différent, nuance Julien Kaibeck, cela récompense une démarche globale. On va examiner la formulation du produit, qui doit être saine et écologique, mais on s’intéresse également à un ensemble de facteurs : on regarde le modèle de l’entreprise, les valeurs qu’elle défend, s’il s’agit d’une entreprise familiale, si les matières premières sont obtenues selon des procédés écologiques et éthiques. Et on s’intéresse aussi de près aux allégations des produits que nous analysons : une marque qui promet un taux exceptionnel d’hydratation de la peau en avançant des "résultats prouvés" sur un échantillon d’une dizaine de personnes ne rentrera pas dans nos critères ».
En faisant ce travail d’évaluation très méticuleux, l’association entend « rendre service aux consommateurs qui peuvent avoir du mal à décrypter les étiquettes ». « Nous sommes là pour les accompagner à consommer autrement, de façon plus responsable, explique Constance Sycinski. Car cette démarche s’inscrit aussi dans une volonté de protéger l’environnement : 0,5 à 1 % des plastiques qui finissent dans les océans est issus des plastiques liquides contenus dans les cosmétiques ». Une initiative qui privilégie aussi les productions locales. « On préférera une huile de bourrache française qui ne sera pas bio mais dont on aura examiné le site de production à la loupe à son équivalent que l’on peut trouver en épiceries bio mais qui est issu de graines chinoises », explique Julien Kaibeck.
Pas besoin de casser sa tirelire
Des cosmétiques sains, écolos, éthiques et made in France : cela signifie-t-il que la Slow Cosmétique creuse un trou dans le porte-monnaie ? Pas forcément. « Un produit cosmétique de qualité a un certain coût, parce qu’il utilise des matières premières de qualité et respecte l’environnement et les salariés qui participent à sa production, détaille Julien Kaibeck. Mais prix juste ne veut pas dire exorbitant ».
Sur l’eshop mis en place par l’association, on retrouve les produits des marques ayant reçu la mention « Slow Cosmétique ». Parmi elles, la marque CoZie, qui propose une gamme de cosmétiques bio et zéro déchet, avec des ingrédients d’origine française. Pour s’offrir un de leurs soins, pas besoin de casser sa tirelire. Les prix oscillent entre 10 et 20 euros. Le principe de CoZie est simple : « les formulations de nos produits sont bio, très courtes et focalisées sur un principe actif garantissant leur efficacité », explique Arnaud Lancelot, cofondateur de la marque. Et pour remplir son objectif zéro déchet, la marque propose ses produits dans des flacons en verre consignables à vie. « Si vous achetez une crème pour le visage pour la première fois, cela vous coûtera 21 euros, soit 19,50 euros plus 1,50 euro pour le prix du flacon, explique Arnaud Lancelot. Quand votre flacon est vide, vous le rapportez en boutique et bénéficiez de 1,50 euro de réduction quand vous rachetez un produit ». Un concept écolo mais aussi social. « Nos flacons sont lavés et reconditionnés en Esat (Etablissement et service d’aide par le travail), des établissements qui favorisent l’insertion sociale et professionnelle de personnes en situation de handicap, ajoute le cofondateur de CoZie. On met la planète et l’homme au cœur de notre projet ».