PARENTALITEQuand Noël rime avec tristesse pour les couples touchés par l’infertilité

«Un bébé pour Noël»: Quand les fêtes riment avec tristesse pour les couples touchés par l’infertilité

PARENTALITESi Noël est souvent un moment de réjouissances et de communion, pour certaines personnes, qui espèrent une grossesse, cette période peut s'avérer douloureuse...
Oihana Gabriel

Oihana Gabriel

L'essentiel

  • En France, entre 18 et 24 % des couples font face à un problème d’infertilité.
  • Moment de réunion familiale, fête de l’enfant par excellence et période de vœux, la fin d’année est parfois anticipée par ces couples avec angoisse ou tristesse.
  • Certaines femmes, qui sont dans un parcours de PMA, expliquent à 20 Minutes comment elles vivent cette période un peu compliquée.

«Noël, c’est vraiment chaque année une période difficile », avoue Mélyssa, 22 ans. Depuis deux ans et demi, elle et son mari espèrent que leur vœu de grossesse sera exaucé. Mais cette année encore, il n’y aura pas d’enfant pour ouvrir les cadeaux ou de verre levé au ventre arrondi. Ce jeune couple souffre d’une infertilité inexpliquée… « C’est difficile d’en parler, les gens ne comprennent pas qu’on ne puisse pas avoir d’enfant sans raison, en général on nous répond : "c’est dans la tête, partez en vacances, ça viendra". » Le couple a fait une insémination artificielle en septembre, sans succès. Tentative qui sera rééditée mi-décembre, non sans un espoir mêlé d’angoisse. « Comme on habite à 400 km de nos familles, on va fêter Noël à deux cette année, reprend Mélyssa. On aimerait bien avoir notre famille à nous pour cette réunion, avec notre ou nos enfants. »

Fête de la natalité et des enfants

En effet, Noël, reine des fêtes des enfants, « vole la vedette à toute journée de la fertilité », tranche Ronan Chastellier, sociologue, qui présentait ce jeudi les résultats d’une enquête Opinion Way pour Merck*. Selon cette étude, pour 45 % des Français, la période de Noël donne envie de faire des enfants. « Cette fête de la famille rappelle aux couples confrontés à l’infertilité leur échec de correspondre au modèle social, souligne Virginie Rio, cofondatrice de l’association Bamp qui accompagne ces couples. Ils ont anticipé la chambre supplémentaire, les moments de fête avec leur propre famille, et ils se retrouvent face à un vide, dans un temps défini où tout tourne autour des enfants… » Sur les réseaux sociaux, d’ailleurs, certains partagent leur peine.

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Des câlins aux larmes

Cees grandes réunions familiales sont aussi l’occasion de jouer avec le petit dernier ou féliciter la cousine éloignée pour sa grossesse… « J’aimerais bien offrir ce cadeau à mon mari, un enfant, avoue Mélyssa. Je suis issue d’une famille de six enfants, me retrouver à Noël "seule" c’est vraiment dur. Chaque année, nous voyons des enfants, la sœur de mon mari qui a 2 ans, mes sœurs qui ont 7 et 9 ans. Et je traverse deux périodes contradictoires : d’abord je suis super contente de les avoir, je chouchoute, je câline, je fais la petite maman. Et après, quand je me dis que si les choses avaient été autrement, j’aurais mon enfant à Noël, il m’arrive d’en pleurer. »

Pour Anna, le problème se pose de façon inverse : c’est l’absence d’enfant au pied du sapin qui remet le couteau dans la plaie. « C’est surtout par rapport à la famille qui attend un petit enfant pour faire revivre la magie de Noël, explique la trentenaire qui essaie depuis juillet 2015 de tomber enceinte. Cela devient une fête entre adultes, c’est différent. »

Blagues et questions des proches

Ce moment de communion et de retrouvailles peut se transformer en enfer sur Terre quand il devient festival de questions indiscrètes, moments malaises et vœux déplacés. Même avec bienveillance, le proche qui vous souhaite d’être un de plus pour le Noël prochain, c’est toujours désagréable, surtout après l’échec d’une PMA ou une fausse-couche… « Au début, on n’en parlait pas, raconte Mélyssa. Mais même en le disant, on a droit à des blagues genre "tu ne sais pas faire un bébé, si tu veux je te montre", les gens ne se rendent pas compte… » De son côté, Anna salue la délicatesse de ses proches. « Toute ma famille sait que je voulais des enfants, beaucoup et très jeunes, explique la trentenaire. Soit on a des messages du genre "on pense à vous", soit les gens n’abordent pas le sujet. Mais il y a toujours la grand-mère qui va regretter qu’il n’y ait toujours pas de petits-enfants… » Ces deux adhérentes de l’association Bamp ont trouvé une oreille attentive et du soutien auprès d’autres femmes qui traversent comme elles ce parcours du combattant. Mélyssa partage ainsi ses doutes et espoirs sur son compte Instagram avec des inconnues. « Il n’y a que comme ça que j’arrive à avoir un poids en moins », assure-t-elle.

« On se dit que notre tour viendra… »

Heureusement, pour certains couples, cette période de fêtes ne rime pas forcément avec dépression. « Il ne faut pas noircir le tableau, pour certains Noël redonne de l’énergie et de l’espoir », insiste Virginie Rio du collectif Bamp. « Le Noël le plus difficile, c’était en 2015, on essayait depuis six mois d’avoir un enfant et on ressentait un sentiment d’injustice. Pourquoi pas nous ?, témoigne Anna. On ne savait pas à l’époque qu’il y avait un problème, mais l’incertitude, c’est ça qui travaille le plus. » Depuis, elle et son mari ont découvert que l’infertilité concernait ce dernier. En janvier 2019, ils pourront passer à l’insémination artificielle grâce au don de gamète.

« La période de Noël était très compliquée à vivre encore l’année dernière, poursuit Anna. Le temps fait son œuvre et je suis moins triste que les autres années. La peine vient surtout du fait que tous nos proches ne sont pas infertiles, et que les bébés fleurissent sur les réseaux sociaux. Mais on se dit que notre tour viendra… »

Illustration d'un couple de futurs parents.
Illustration d'un couple de futurs parents. - O. Gabriel / 20 Minutes

* Sondage réalisé par OpinionWay pour Merck auprès d’un échantillon représentatif de la population française de 1060 personnes sur âgées de 18 ans et plus, les 21 et 22 novembre 2018.

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