Dermatologie: Bientôt un vaccin pour se débarrasser de l'acné?
SANTE•Une équipe de chercheurs a mis au point un vaccin contre l'acné, mais il n'a pour l'heure pas encore été testé sur l'homme...Anissa Boumediene
L'essentiel
- Des chercheurs américains et taïwanais ont mis au point un vaccin contre l’acné.
- Ils ont créé un anticorps capable de cibler la toxine qui serait responsable de l’apparition des boutons.
- Mais le vaccin n’a pour l’heure été testé que sur les souris, et pas encore sur l’homme.
Elle n’épargne presque aucun adolescent et pourrit aussi parfois la vie des adultes, au hasard des boutons rouge, boutons blancs et autres comédons dont elle assaille ses victimes. Elle, c’est l’acné, « une affection qui touche 80 à 90 % des adolescents », indique le Dr Martine Bagot, chef du service de dermatologie à l’hôpital Saint-Louis à Paris. S’il existe à ce jour des traitements locaux et oraux pour traiter l’acné, un vaccin pourrait peut-être bientôt la terrasser, selon une étude publiée dans le Journal of Investigative Dermatology.
Des anticorps pour lutter contre l’acné
« L’acné se caractérise par une inflammation des glandes sébacées qui produisent un excès de sébum, précise la dermatologue. Elle se manifeste par la survenue de papules (boutons rouges) pour l’acné inflammatoire, et par l’apparition de comédons et kystes pour l’acné rétentionnelle ». Le plus souvent, il va s’agir d’une petite acné qui apparaît à l’adolescence et disparaît ensuite, « mais certains cas sont plus sévères et l’acné peut persister à l’âge adulte ».
Dans le cadre de l’étude menée conjointement par l’université de San Diego (Etats-Unis) et l’université de Jhongli (Taïwan), les chercheurs se sont intéressés spécifiquement à la bactérie Propionibacterium acnes, « P acnes » de son petit nom. Naturellement présente sur la peau, cette bactérie sécrète une toxine qui causerait la réaction inflammatoire déclenchant l’apparition de boutons. Les chercheurs ont ainsi mis au point des anticorps ciblant cette toxine. Pour l’heure, des tests ont été menés sur des souris et sur des échantillons de tissus humains, et les équipes ont pu observer une réduction significative de la réaction inflammatoire. « L’impact potentiel de nos découvertes est immense pour les centaines de millions de personnes souffrant d’acné », s’est réjoui dans un communiqué le Dr Chun-Ming Huang, qui a mené l’étude. « Les traitements actuels ne sont souvent ni efficaces ni tolérables (…). Des thérapies nouvelles, sûres et efficaces sont indispensables », a-t-il déclaré, alors que certains médicaments anti-acné aujourd’hui disponibles ont d'importants effets secondaires.
« Quid des effets secondaires potentiels ? »
Sur le papier, ce projet de vaccin – le premier du genre — est porteur d’espoir. Mais en pratique, le vaccin, qui n’a pas encore atteint la phase de tests sur l’homme, doit encore faire ses preuves et démontrer qu’il est exempt de risques. « C’est nouveau et novateur : c’est la première fois qu’un vaccin contre l’acné est à l’étude, confirme le Dr Martine Bagot. Mais il faut attendre de voir les résultats sur l’homme, prévient-elle. S’il aboutit, de nombreuses questions se poseront, notamment sur la rémanence de ce vaccin : quelle sera la durée de son effet ? » Car l’acné est une maladie qui a plusieurs causes permanentes, hormonales notamment. « Je ne pense pas que l’on puisse guérir cette affection avec des anticorps. Une seule injection suffira-t-elle ou faudra-t-il en faire plusieurs ? Est-il possible qu’une autre bactérie liée à l’acné prenne le relais de celle qui est ciblée par les anticorps injectés ? Le vaccin pourra-t-il traiter les deux formes d’acné : rétentionnelle et inflammatoire ? »
Mais ce ne sont pas les seules questions que se pose la dermatologue. Si l’efficacité est au rendez-vous, « quid des effets secondaires potentiels ? L’acné, bien qu’ayant dans les cas les plus sévères un retentissement social à ne pas négliger, reste une maladie bénigne, donc il faudra que le vaccin ne présente pas d’effets secondaires ou qu’ils soient vraiment minimes ». Dans leurs conclusions, les chercheurs qui ont mené l’étude concèdent que leur découverte « nécessite des travaux complémentaires ».