FAKE OFFVIDEO. Les enfants non vaccinés moins malades que les vaccinés ?

VIDEO. Les enfants non vaccinés en meilleure santé que les enfants vaccinés ? Attention à cette étude devenue virale

FAKE OFFLes jeunes non vaccinés seraient-ils plus en forme que les autres ? C'est la surprenante conclusion d'une étude bien peu fiable...
Mathilde Cousin

Mathilde Cousin

L'essentiel

  • Les résultats d’une étude qui montre que les enfants non vaccinés sont en meilleure santé que ceux ayant reçu un ou plusieurs vaccins sont largement partagés sur les réseaux sociaux.
  • Mais cette étude présente de nombreux problèmes méthodologiques et ses résultats peuvent être difficilement exploités.

Vous l’avez peut-être vu sur Facebook : depuis plusieurs jours, la photographie d’un tableau présentant une comparaison entre la santé des enfants non vaccinés et ceux partiellement et totalement vaccinés est largement partagée.

Ce post reprenant une étude comparant la situation des enfants vaccinés et non vaccinés a été partagé plus de 17.700 fois sur Facebook.
Ce post reprenant une étude comparant la situation des enfants vaccinés et non vaccinés a été partagé plus de 17.700 fois sur Facebook. - Capture d'écran Facebook

Au premier abord, le tableau est frappant : les enfants non vaccinés présentent moins de maladies chroniques que les enfants partiellement ou totalement vaccinés. L'internaute précise que la photo a été prise « dans le cabinet d'un pédiatre », mais aucun élément ne le prouve.

Ce tableau reprend une étude de médecins américains, publiée en 2017. Cette étude a aussi été reprise de manière plus détaillée sur des sites français, sous le titre « Les enfants vaccinés plus touchés par les maladies chroniques que les non vaccinés. »

FAKE OFF

Les résultats spectaculaires de cette étude américaine sont à prendre avec beaucoup de recul. L’étude est le résultat du travail de quatre scientifiques américains, qui ont cherché à comparer la santé d’enfants américains vaccinés et non vaccinés et âgés de six à douze ans. En plus de s’intéresser aux maladies chroniques, ils se sont penchés sur la prévalence des troubles du neurodéveloppement, dont les troubles du spectre autistique.

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Les chercheurs ont choisi de s’appuyer sur des enfants scolarisés à la maison, car, aux Etats-Unis, ils sont plus nombreux à ne pas être vaccinés que les jeunes qui vont à l’école. Ce sont les mères qui ont répondu à l’étude, via un questionnaire anonyme posé sur internet. Les questions portaient la grossesse, la naissance de l’enfant, les maladies diagnostiquées par un médecin, les vaccins reçus par l’enfant, les traitements pris…

Cette méthode pose problème. La sélection de l’échantillon est assez hasardeuse : les mères ont été contactées par un intermédiaire et leurs réponses étaient anonymes. Il était donc impossible pour les chercheurs de vérifier leurs déclarations.

Autre limite, l’échantillon d’enfants (666, dont 261 non vaccinés) n’est pas assez représentatif, comme le reconnaissent les auteurs eux-mêmes : « Cette étude n’a pas été faite avec l’intention de s’appuyer sur un échantillon représentatif d’enfants scolarisés à la maison, mais sur un échantillon convenable de taille suffisante pour tester des différences signifiantes dans les résultats. » Ils ajoutent que les résultats doivent « être interprétés avec précaution », car « des recherches supplémentaires » sont nécessaires « pour dupliquer les résultats avec des études avec des échantillons plus larges et des modèles de recherche plus solides. »

Les enfants vaccinés voient plus régulièrement un médecin

Les auteurs de l'étude notent également que les enfants vaccinés voient plus régulièrement un médecin que les enfants non vaccinés. Ce que cette étude ne dit pas, c’est l’objet de ces visites : concernent-elles simplement les vaccinations ou ont-elles pour objet d’autres maladies infantiles ? Dans la mesure où les auteurs ont demandé aux mères de ne faire état « que des maladies diagnostiquées par des médecins », il se peut que les « enfants vaccinés » soient, de fait, considérés comme plus malades que les autres juste parce que leurs maladies ont été diagnostiquées, celles des non-vaccinés étant simplement passées sous les radars.

Autre point gênant : à aucun moment, l’impact individuel de chaque vaccin n’est étudié chez les enfants. Or, il est difficile d’attribuer la survenue de toutes les maladies à l’ensemble des vaccins.

Une étude financée par des opposants à la politique de vaccination

Les sources de financements de l’étude alertent également : elles sont présentées simplement comme des « organisations charitables qui soutiennent la recherche sur la santé et la sécurité des enfants », alors qu’elles ne sont pas neutres. le travail des auteurs a été soutenu par Generation Rescue, une organisation américaine, qui n’a pas hésité dans le passé à faire le lien, non prouvé, entre vaccin et autisme. En 2007, on trouvait sur leur site la phrase suivante : « Aucune étude n’a jamais été faite pour comparer les taux de désordres neurologiques entre les enfants non vaccinés et ceux vaccinés. » Cette idée est un des points de départ de l’étude controversée. Simple coïncidence ?

La deuxième source de financement est aussi peu neutre : le Children’s Medical Safety Research Institute affiche très clairement son scepticisme sur l’efficacité des vaccins et recommande la lecture du site infowars, un site conspirationniste américain.

Anthony Mason, un des quatre auteurs de l’étude, a déjà exprimé son soutien à Andrew Wakefield, l’auteur d’une étude qui faisait faussement le lien entre autisme et le vaccin ROR. L'étude d'Andrew Wakefield, publiée en 1998 dans la prestigieuse revue scientifique The Lancet, avait été retirée en 2004 de cette même revue après des accusations de fraude. En 2010, il a été radié de l'ordre des médecins britanniques. Andrew Mason avait lancé en 2012 un appel pour financer cette étude sur un blog tenu par des anti vaccins. Autant de liens qui jettent un voile sur les conclusions de l’étude.

Publiée dans des journaux peu reconnus

L’étude a connu un parcours mouvementé : un extrait a d'abord été publié en novembre 2016 sur Frontiers of Public Health, un journal qui fait payer les auteurs pour publier leurs études. L’étude avait été relue par une chiropracteuse, sans qualifications dans le domaine étudié. Devant la réaction de la communauté scientifique, l’extrait a été retiré de ce journal. L’étude a finalement été publiée dans le Journal of Translational Science, une autre publication où il faut payer pour être publié. Elle y a été retirée, avant d’y être remise en ligne. Sans explications.

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