PROCREATIONVIDEO. L'anonymat du don de gamètes, l'autre tabou de la PMA

VIDEO. Etats généraux de la bioéthique: Vers la fin de l’anonymat du don de gamètes?

PROCREATIONAlors que s’ouvrent ce jeudi les Etats généraux de la bioéthique, la question de l’accès aux origines des enfants nés de donneurs anonymes revient dans les débats…
Hakima Bounemoura

Hakima Bounemoura

L'essentiel

  • L’accès aux origines des enfants nés d’un don de gamètes revient dans les débats à l’occasion de l’ouverture ce jeudi des Etats généraux de la bioéthique.
  • En France, près de 70.000 personnes sont nées depuis les années 1970 d’un don anonyme de gamètes.
  • L’association Procréation médicalement anonyme milite depuis une dizaine d’années pour « un droit d’accès aux origines à l’âge de 18 ans ».

«Nous sommes une génération d’abandonnés, des orphelins sans racines. » La délicate question de l’accès aux origines des enfants nés d’un don de gamètes (spermatozoïdes ou ovules) après une PMA (Procréation médicalement assistée) revient sur le devant de la scène à l’occasion de l’ouverture ce jeudi des Etats généraux de la bioéthique. L’association Procréation médicalement anonyme (PMA) en a fait son cheval de bataille depuis une dizaine d’années. « Près de 70.000 enfants sont concernés en France », explique à 20 Minutes Vincent Brès, le président de l’association, qui milite pour « un droit d’accès aux origines à l’âge de 18 ans », et « non pour une levée totale de l’anonymat des donneurs ».

« C’est important de connaître ses origines pour se construire. Et nous, nos origines biologiques sont classées secret d’Etat », déplore le président de l’association, lui-même conçu à partir d’une insémination artificielle avec don de sperme (IAD). « Toute une génération a déjà été sacrifiée, il est temps que les choses changent ». Un constat partagé aujourd’hui par une partie du corps médical. « Le principe d’anonymat absolu est une anomalie qui méconnaît les droits des enfants à connaître leur origine. En Europe, plusieurs Etats qui avaient opté pour la règle du secret, comme la France, y ont récemment renoncé », affirme Jean-René Binet, professeur de droit à l’université de Rennes et spécialiste de bioéthique.

L’accès à ce contenu a été bloqué afin de respecter votre choix de consentement

En cliquant sur« J’accepte », vous acceptez le dépôt de cookies par des services externes et aurez ainsi accès aux contenus de nos partenaires.

Plus d’informations sur la pagePolitique de gestion des cookies

« Ça m’a pris trente secondes pour commander un test à 99 dollars »

Le combat de l’association Procréation médicalement anonyme a largement été médiatisé en début de semaine. Le porte-parole du collectif, Arthur Kermalvezen, né il y a 34 ans d’une insémination artificielle avec donneur anonyme, a révélé lundi avoir retrouvé son père biologique grâce à l’utilisation d’un test génétique réalisé à l’étranger. Une première en France. « C’est une histoire de fou, à laquelle j’ai encore du mal à croire aujourd’hui », explique-t-il à 20 Minutes. « Le 25 décembre, jour de Noël, j’ai eu le plus beau des cadeaux (…) Un coup de fil de mon père biologique, dont j’avais réussi à retrouver la trace grâce à un test ADN [illégal en France] et à un méticuleux travail de généalogie ».

Mais ce qui paraît le plus invraisemblable dans cette histoire, c’est la facilité déconcertante avec laquelle il a procédé. « Ça m’a pris trente secondes pour commander sur Internet un test à 99 dollars, deux jours pour le recevoir, et trois semaines pour que la société américaine 23andMe m’envoie les résultats. Et douze heures plus tard, en menant mon enquête comme un journaliste, j’ai retrouvé mon géniteur », explique simplement Arthur, qui avoue avoir eu énormément de chance.

L’accès à ce contenu a été bloqué afin de respecter votre choix de consentement

En cliquant sur« J’accepte », vous acceptez le dépôt de cookies par des services externes et aurez ainsi accès aux contenus de nos partenaires.

Plus d’informations sur la pagePolitique de gestion des cookies

Le danger de la consanguinité, « on y pense tous »

En faisant ces révélations quelques jours avant le lancement officiel des Etats généraux de la bioéthique, l’auteur de Né de spermatozoïde inconnu (éditions J’ai lu en 2010) espère bien imposer dans les débats le thème de l’anonymat du don. Il souhaite démontrer « qu’avec les nouvelles technologies, ce principe est devenu caduc » et qu’il y a donc urgence à revenir sur la loi instituée dans les années 1970 et gravée dans le marbre en 1994, lors de l’adoption des premières lois de bioéthique.

Lui et les membres de l’association PMA souhaitent aussi alerter sur le danger de la consanguinité. « En région parisienne, beaucoup ont été conçus au Cecos du Kremlin-Bicêtre (Val-de-Marne), avec souvent les mêmes donneurs. Alors le danger de la consanguinité, on y pense tous, un jour ou l’autre », explique Vincent Brès, le président de l’association. Audrey, l’épouse d’Arthur Kermalvezen, également née d’un don anonyme et avocate du collectif, peut en témoigner. « En faisant aussi un test ADN, j’ai retrouvé une demi-sœur et un demi-frère que je côtoyais sans le savoir depuis des années dans l’association », explique-t-elle. « Nous sommes sans doute très nombreux dans ce cas », alerte la jeune femme, pointant ainsi du doigt les risques de consanguinité pour les enfants et les petits-enfants nés d’un don anonyme.

L’accès à ce contenu a été bloqué afin de respecter votre choix de consentement

En cliquant sur« J’accepte », vous acceptez le dépôt de cookies par des services externes et aurez ainsi accès aux contenus de nos partenaires.

Plus d’informations sur la pagePolitique de gestion des cookies

La France bientôt condamnée par la justice européenne ?

Des arguments pour réclamer la levée de l’anonymat du don de gamètes, l’association PMA en a listé plusieurs qu’elle espère pouvoir présenter au Comité consultatif national d’éthique (CCNE), en charge de la révision des lois sur la bioéthique. « Pour l’instant, aucune audition n’est prévue », déplore Vincent Brès.

Le seul espoir de l’association repose aujourd’hui sur la justice européenne. Déboutés de leur demande par le Conseil d’Etat en 2015, deux des membres de l’association ont saisi la Cour européenne des droits de l’Homme pour faire valoir leur droit d’accès à leurs origines. « Depuis quarante ans, la France ne respecte pas la convention européenne des droits de l’Homme, notamment l’article 8 qui stipule qu’il est indispensable pour un individu de connaître son ascendant biologique », explique Arthur Kermalvezen. « Avec la jurisprudence en cours, nul doute que la France sera condamnée. Reste à savoir quand la décision va tomber ».

L’accès à ce contenu a été bloqué afin de respecter votre choix de consentement

En cliquant sur« J’accepte », vous acceptez le dépôt de cookies par des services externes et aurez ainsi accès aux contenus de nos partenaires.

Plus d’informations sur la pagePolitique de gestion des cookies