MALADIELes cinq défis à relever en France pour lutter contre le sida

Sida: Les cinq défis à relever en France pour lutter contre l'épidémie

MALADIEA l'occasion de la Journée mondiale de lutte contre le sida, «20 Minutes» s'est interrogée sur les défis de la France pour améliorer dépistage et prévention...
Oihana Gabriel

Oihana Gabriel

L'essentiel

  • A l'occasion de la Journée mondiale de lutte contre le sida, le ministère de la Santé lance une campagne d'information sur les outils de dépistage.
  • Car la lutte contre le sida s'est dotée de nouveaux outils pour améliorer le dépistage, encore méconnus.
  • Et en France, le point à améliorer reste le dépistage, car 25.000 personnes ignorent en France leur séropositivité.

Le film 120 Battements par minute, Grand Prix à Cannes et candidat aux Oscars, a mis un coup de projecteur sur la lutte des séropositifs au moment de l’apparition du sida. Mais aujourd’hui, le visage de l’épidémie et la qualité de vie des séropositifs n’ont plus rien à voir. Au point que certains évoquent une fin du sida possible, prochaine même. A quelles conditions en France ?

C’est le dépistage qui pêche

L'Onusida, programme des Nations Unies sur le VIH, parie sur une éradication du virus pour 2030, à condition d’arriver à l’objectif des 90-90-90 : 90 % des personnes vivant avec le VIH diagnostiquées, 90 % des personnes infectées sont traitées et 90 % d’entre elles ne sont plus contagieuses.

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« On a déjà atteint les deux derniers objectifs en France, assure Nathalie Lydié, responsable de l’unité santé sexuelle à la direction de la prévention de Santé Publique France. En revanche, on a encore des efforts à faire pour atteindre le premier 90 % : aujourd’hui 84 % des personnes infectées par le VIH ont connaissance de leur séropositivité selon les dernières estimations. » D'après l’enquête menée par Santé Publique France, les deux groupes les plus touchés par cette épidémie cachée sont les hommes homosexuels et les hommes originaires d’Afrique-subsaharienne.

Chaque année en France, environ 6.000 personnes découvrent leur séropositivité au VIH, dont plus d’un quart à un stade avancé de l’infection. Le dépistage précoce reste donc un enjeu de taille, à la fois au niveau individuel et collectif. « Aujourd’hui, une personne prise en charge tôt a la même espérance de vie qu’une personne séronégative, rappelle la spécialiste. Et cette personne, si elle est sous traitement avec une charge virale indétectable, ne va pas transmettre le virus, ce qui permet de casser la chaîne de l’épidémie. »

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Faire connaître les nouveaux outils de dépistage

Le dépistage peut s’appuyer sur de nouveaux outils. Avec notamment depuis 2012 le Test Rapide d’Orientation Diagnostique ou Trod, qui permet d’avoir un résultat en 30 minutes après une prise de sang. Des tests rapides, gratuits et anonymes, proposés par certaines associations au contact des publics les plus exposés (homosexuels et bisexuels, migrants, travailleurs du sexe).

Certaines associations proposent ainsi des Trod à la sortie d’un métro ou d’une gare. « Si le nombre de Trod a légèrement baissé entre 2015 et 2016, ils touchent toujours les populations les plus exposées au VIH si bien que le nombre de tests positifs est très élevé », reprend-elle.

Deuxième outil : les autotests, disponibles en pharmacie depuis septembre 2015. En 2016, 75.000 autotests ont été vendus. Une opportunité de plus pour des personnes qui veulent une confidentialité totale et éviter de passer par un médecin. « Chaque outil supplémentaire est intéressant car il permet de toucher des populations différentes », analyse Nathalie Lydié.

Problème : beaucoup ignorent ces avancées. D’où la campagne de prévention lancée ce vendredi par l’État pour faire connaître l’offre de dépistage.

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Cibler le message

Pour améliorer ce dépistage, autorités et associations ciblent les deux groupes les plus exposés depuis quelques années. « On a mis à disposition des personnes homosexuelles un site d’informations, sexosafe.fr, une page Facebook, on organise des interventions de terrain, énumère la spécialiste de Santé Publique France. En revanche, pour les personnes originaires d’Afrique subsaharienne, qui se servent peu d’Internet, on travaille via des magazines de santé, des partenariats avec des chaînes de radio ou télévision communautaires. » Un effort à poursuivre, sans doute.

Eviter les freins et les opportunités manquées

Pourquoi dans un pays où l’offre de soins est de qualité, autant de personnes ignorent leur infection ? « L’une des failles en France, ce sont les barrières légales, administratives, financières à l’accès à la santé pour les migrants d’origine afro-saharienne », souligne François Berdougo, militant de la lutte contre le sida et auteur de La fin du sida est-elle possible ? (Textuel). Qui appelle à faire la chasse aux opportunités manquées. « Aussi bien à la fin des années 1990 qu’aujourd’hui, certaines personnes passent par le système de santé sans qu’on leur ait proposé de test. »

Et Nathalie Lydié de suggérer une piste. « Si les femmes ont l’opportunité de se faire dépister au moment de la grossesse, le test n’est pas proposé de façon systématique au partenaire. »

Une coordination entre médecins et associations

Cet effort pour mieux dépister devrait également passer par « la sensibilisation des médecins généralistes, en tête de ligne pour aller chercher cette épidémie cachée, assure Nathalie Lydié. Santé Publique France propose ainsi à partir de ce vendredi un nouveau document sur les clefs du dépistage. Mais plus globalement, une bonne coordination entre généralistes, spécialistes, associations permettrait d’améliorer cette lutte contre l’épidémie, promet l'enquête de Santé Publique France.

Une prévention multiple… et méconnue

Faire en sorte que les personnes sachent qu’elles sont séropositives, c’est le premier étage de la fusée. Mais donner les moyens à ces personnes d’éviter toute contamination, c’est aussi possible. Pendant longtemps, on n’avait que le préservatif à proposer…. Aujourd’hui, l’offre préventive s’est, là aussi, élargie. Avec le traitement d’urgence après une prise de risque : une trithérapie à prendre dans les 72 heures suivant le rapport non protégé pour bloquer la mise en place de l’infection. Et depuis 2016, les séronégatifs qui prennent régulièrement des risques peuvent prendre un médicament qui les protège du virus, un peu à l’image de la pilule contraceptive qui évite une grossesse. On appelle ce traitement la prophylaxie pré-exposition, la Prep. Mais comme pour les outils de dépistage, « le défi aujourd’hui, c’est de faire connaître la diversité de l’offre préventive », argumente Nathalie Lydié.