VIDÉO. Vaccins obligatoires : sept polémiques décryptées
DESINTOX•L'annonce du premier ministre a fait ressurgir des questionnements autour de la dangerosité des vaccins...Mathilde Cousin
L'essentiel
- Le premier ministre a annoncé que onze vaccins vont devenir obligatoires à partir de 2018.
- Une annonce qui a réactivé les accusations de liens avec l’industrie pharmaceutique et les interrogations autour des bienfaits de la vaccination.
- 20 Minutes décrypte ces polémiques.
Huit nouveaux vaccins « pour la petite enfance » vont devenir obligatoires dès l’an prochain, a annoncé mardi le premier ministre Edouard Philippe, portant à onze le nombre de vaccins obligatoires. La ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a tempéré cette annonce jeudi en annonçant qu’une « clause d’exception » était à l’étude.
Les vaccins pour la coqueluche, la rougeole, les oreillons, la rubéole, l’hépatite B, le pneumocoque, le méningocoque C et la bactérie haemophilus influenzae sont concernés par cette nouvelle mesure, en plus des vaccins contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite, déjà obligatoires. L’extension à onze vaccins obligatoires « représente 10 injections pour les enfants, étalées sur 2 ans », selon le ministère de la Santé. Au moins 70 % des enfants reçoivent déjà ces 10 injections et 80 % d’entre eux au moins 8 injections.
Cette mesure de santé publique à peine annoncée, des pétitions ont été mises en ligne, demandant la suspension du caractère obligatoire des vaccins. Ces pétitions mettent en avant plusieurs polémiques liées aux vaccins. 20 Minutes décrypte ces controverses.
Non, le Conseil d’Etat n’est pas contourné
Une pétition sur le site santé nature innovation affirme que cette obligation contourne une décision rendue par le Conseil d’Etat le 8 février. Avec cette décision, les membres du Conseil d’Etat demandaient bien la mise à disposition dans les pharmacies du vaccin DTP, le seul qui était obligatoire avant l’annonce du premier ministre. Actuellement, ces trois injections sont distribuées dans les pharmacies avec d’autres vaccins non obligatoires.
Toutefois, le Conseil d’Etat restreint sa demande, en précision que celle-ci ne sera plus valable, si « la législation évolue en élargissant le champ des vaccinations obligatoires ».
Les vaccins, une bonne affaire pour les labos ?
C’est une accusation qui revient régulièrement. Marine Le Pen et Nicolas Dupont-Aignan ont publié des tweets en ce sens suite à l’annonce du premier ministre.
La nouvelle ministre de la Santé, Agnès Buzyn, est pointée du doigt par les opposants à la vaccination obligatoire. Les signataires d’une pétition lui reprochent d’avoir siégé au conseil de direction de Novartis et Bristol-Meyers Squibb, deux laboratoires pharmaceutiques. La ministre y a bien siégé entre 2009 et 2011. Interrogée par Le Parisien, Agnès Buzyn déclare « qu’on ne peut pas réduire la question de la vaccination à l’intérêt des laboratoires ».
Pour la ministre, rendre ses onze vaccins obligatoires est un enjeu de santé publique. Elle cite l'exemple de la rougeole, qui réapparaît en France et a causé la mort de dix enfants depuis 2008. « Comme ce vaccin est seulement recommandé et non obligatoire, le taux de couverture est de 75 % alors qu'il devrait être de 95 % pour prévenir cette épidémie. »
Le vaccin contre l’hépatite B présente-t-il des risques ?
Il fait partie des huit vaccins qui vont devenir obligatoires. Il est accusé par ses détracteurs d’être « potentiellement dangereux » et « inutile pour la plupart des enfants ». D’autres opposants font le lien entre hépatite B et incidence de la sclérose en plaque. Ce lien ne peut toutefois être fait, selon l’Organisation mondiale de la santé, qui s’appuie sur les conclusions de neuf études : « aucune des études initiales ne met en évidence une augmentation statistiquement significative du risque ; les toutes dernières études ne révèlent aucun accroissement du risque. »
En 2008, le Haut conseil de santé publique recommandait lui aussi la poursuite de la vaccination en France, en s'appuiant sur deux études menées sur des enfants suivis de 1994 à 2003. Les résultats de ces deux études « ne montrent pas d'association entre vaccination hépatite B et sclérose en plaques. »
La polémique entre ce vaccin et l'apparition de la sclérose en plaques est née dans les années 90, quand Bernard Kouchner, alors ministre de la Santé, suspend le programme de vaccination systématique dans les collèges, suite à des suspicions autour du vaccin et de ses effets indésirables. L'affaire rebondit en 2009, quand le laboratoire GSK est condamné à verser 400.000 euros à une femme atteinte de sclérose en plaques.
Et, récemment, le 21 juin, la Cour de justice de l'Union européenne a été saisie par la famille d'un homme qui avait développé la sclérose en plaques et qui avait été vacciné contre l'hépatite B. Dans le cadre de la législation sur les produits défectueux, les Sages ont estimé être en droit de « se baser sur des indices graves, précis et concordants pour établir le défaut d'un vaccin et le lien de causalité entre vaccin et maladie. » Mais cette décision ne s'appuie sur aucun fait scientifique et ne fait pas jurisprudence.
Y a-t-il un lien entre ROR et autisme ?
La confusion est née de la publication, en 1998, d’une étude dans la revue médicale britannique The Lancet. Cette étude évoquait une relation possible entre la vaccination ROR et l’autisme, rappelle le site vaccination info. En 2010, le magazine scientifique a publié une rétraction.
Les auteurs de l'étude controversée disaient avoir étudié douze enfants souffrant de troubles régressifs du comportement et d'entérocolite chronique, une inflammation qui touche l'intestin grêle et le côlon. Les parents de huit des douze enfants faisaient un lien entre ces troubles et le vaccin ROR. Les auteurs en concluaient que des facteurs environnementaux - le vaccin - étaient associés avec l'apparition de ces maladies. Problème : les enfants du groupe d'étude ont été sélectionnés et une partie des recherches ont été financées par des avocats qui travaiellent pour des parents engagés dans des poursuites contre les fabricants de vaccin.
L’OMS s’est penchée sur la question des troubles autistiques et du ROR et, après analyse de plusieurs études, a conclu qu’il « n’existait aucune preuve quant à une association de cause à effet entre le vaccin ROR et l’autisme ou les troubles autistiques. »
L’aluminium contenu dans les vaccins est-il dangereux ?
Le Haut Conseil de la santé publique a passé en revue en 2013 les études concluant à un lien entre les sels d’aluminum contenus dans les vaccins et l’incidence de la myofasciite à macrophages, une maladie rare provoquant des douleurs musculaires. Les experts du Haut Conseil en ont conclu que « les données scientifiques disponibles à ce jour ne permettent pas de remettre en cause la sécurité des vaccins contenant de l’aluminium, au regard de leur balance bénéfices/risques. »
L'aluminium est utilisé dans les vaccins comme adjuvant : il stimule la réaction immunitaire quand le vaccin est injecté.
De la mort au rat dans le Gardasil ?
Ce titre, un poil alarmant, est celui du site Dans quel monde vit-on, qui publie une note intitulée « Mort au rat dans le vaccin Gardasil pour les jeunes filles ». En réalité, cette note entend alerter sur la présence de borate de sodium et de polysorbate dans le vaccin. Actuellement, les produits massivement utilisés pour lutter contre les rats sont des anticoagulants et pas le borate de sodium ni le le polysorbate.
Le Gardasil, lui, contient bien ces deux substances, indique le Vidal. Celles-ci présentent-elles un risque pour la santé, comme le sous-entend le site Dans quel monde vit-on ? L'interrogation n'est pas nouvelle : en 2012, Rudy Salles, député Nouveau Centre, questionnait le ministère du Travail, de l'Emploi et de la Santé sur la présence du borate de sodium dans le vaccin. Le ministère rappelle, chez l'homme,« la valeur seuil d’exposition référencée à ne pas dépasser est de 0.2 mg (milligramme) de Bore/kg/jour. » Une dose de ce vaccin contient 35 mcg (microgramme) de borate de sodium, soit environ 4,2 mcg de bore, « ce qui est très largement inférieur à la valeur seuil assurant l’innocuité de ce dérivé de l’acide borique. »
Selon l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), qui a réalisé une étude conjointement avec l'Assurance maladie, la vaccination contre les infections à papillomavirus humains (HPV) par Gardasil ou Cervarix « n’entraîne pas d’augmentation du risque global de survenue de maladies auto-immunes, confirmant ainsi les données de la littérature française et internationale. »
Non, ces vaccins ne sont pas devenus obligatoires à cause des migrants
« La gale, la diphtérie, la tuberculose sont de retour grâce aux #Migrants : La solution du gouvernement : rendre 11 #vaccins obligatoires », écrit Rowlf sur Twitter. Son tweet a été retweeté un plus de 200 fois.
aCe tweet est faux car le vaccin contre la diphtérie est déjà obligatoire : il l’est depuis… 1966 pour les enfants de moins de 18 mois. Quant au vaccin contre la tuberculose, il est recommandé par les autorités sanitaires dans les régions à risque, comme l’Île-de-France, mais il n’est pas obligatoire, sauf pour certaines professions à risque. La gale, elle, est une maladie infectieuse, causée par un parasite. Il n'existe pas de vaccin contre cette maladie, qui se soigne avec un traitement local ou oral et des mesures d'hygiène.
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