Allergies, c’est reparti… Mais comment se faire désensibiliser?
MEDECINE•On va rentrer dans le pic des consultations chez les allergologues à partir d’avril…Oihana Gabriel
Ça pique, ça gratte, ça coule… Pour beaucoup, le retour des beaux jours ne rime pas avec terrasse, mais avec mouchoirs. Un Français sur quatre souffre d’allergies respiratoires. En ce début avril, les pollens de bouleau au nord et de cyprès au sud sont à la fête… et on rentre dans le pic des consultations chez les allergologues aussi.
La plateforme de prise de rendez-vous Doctolib, qui compte 18.000 praticiens et 7,5 millions d’abonnés, dévoile en exclusivité pour 20 Minutes ses chiffres qui prouvent que les plannings des allergologues sont déjà surchargés.
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Doctolib de Nicolas Raffin« Si vous prenez rendez-vous aujourd’hui chez un allergologue, vous risquez d’attendre au moins un mois », résume Stanislas Niox-Chateau, co-fondateur et président de Doctolib. « Et si vous attendez juin, le délai s’allonge à 46 jours. »
« Beaucoup vont trouver porte close », confirme Pascale Mathelier-Fusade, allergologue à Paris. Mais Franck Godesky, allergologue à Lyon, rassure : « Pour un traitement symptomatique, le patient peut consulter son médecin traitant. Et prendre rendez-vous avec un allergologue pour faire un bilan complet ou se lancer dans la désensibilisation en septembre, après les différents pics d’allergies ». La désensibilisation, c’est la seule façon radicale de se débarrasser des allergies, mais dans quel cas est-ce vraiment efficace ?
A qui cela s’adresse ?
La désensibilisation ne fonctionne pas pour les allergies alimentaires. « En revanche, toutes les personnes de 5 à 80 ans, qui sont fortement gênés par leurs rhinites et pour lesquels le traitement symptomatique ne suffit pas peuvent y songer », souligne Franck Godesky. « Et pour les asthmatiques, il faut d’abord bien calmer les symptômes avec des médicaments », ajoute Pascale Mathelier-Fusade.
Quels sont les examens préalables ?
Le bilan doit d’abord déterminer si le patient est allergique aux acariens, aux animaux, aux pollens et à quels pollens précisément… Et s’il cumule ! Pour cela, les allergologues utilisent un test cutané. « En clair, on pique la face intérieure du bras avec chaque allergène, explique Pascale Mathelier-Fusade. Si une rougeur apparaît, cela veut dire que le patient est sensible. » Mais pas forcément allergique. « Il faut toujours vérifier auprès du patient qu’il a bien des symptômes allergiques car une personne peut avoir un test positif à l’allergie aux chats et vivre en bonne intelligence avec son animal ! » Un interrogatoire minutieux complété par une prise de sang pour repérer les anticorps qui agissent contre un certain allergène doit être effectué.
Comment se passe ce traitement ?
« En gros, avec la désensibilisation, on agit sur le coupable ! On va faire ingérer des petites doses d’allergène pour accoutumer votre corps », résume Pascale Mathelier-Fusade. « C’est un vaccin à l’envers !, synthétise son collègue. Quand on vaccine, on veut que le corps réagisse à un virus ». Et Pascale Mathelier-Fusade d’ajouter : « Là, on vous donne une petite dose d’acariens par exemple pour que votre corps fabrique une immunoglobuline qui vous protège des réactions allergiques. »
Et le traitement, qui était autrefois fait par piqûre, est aujourd’hui beaucoup moins contraignant. « Il y a vingt ans, on devait aller chez son médecin tous les quinze jours pour avoir une injection, reprend l’allergologue parisienne. Certains de mes patients sont nettement rassurés et convaincus quand je leur explique que pour leurs enfants, il suffit de prendre un comprimé tous les matins ! »
Mais en réalité, « le traitement par comprimé n’existe aujourd’hui que pour les allergies aux graminées, nuance Franck Godesky. Et on attend pour 2018 le comprimé pour les allergies aux acariens. Mais la recherche avance vite dans ce domaine. » Que doivent faire les autres pour suivre une désensibilisation ? Prendre à jeun des gouttes conservées au frigo sous la langue tous les matins qu’on garde deux minutes avant d’avaler. Ce qui n’est pas évident pour les enfants, qui en général me disent au bout de 30 secondes "ah yé !" », s’amuse Pascale Mathelier-Fusade. Et le traitement doit être répété pendant trois à quatre ans. « Avec la désensibilisation, on n’a pas d’adjuvant à la différence du vaccin, donc c’est plus long… », complète Franck Godesky.
Quand s’y mettre ?
Mauvaise nouvelle, pour ceux qui souffrent du pic actuel, il est trop tard pour cette année. « Pour les allergies aux pollens, il faut commencer la désensibilisation quatre mois avant le début du pic et le poursuivre pendant deux mois, précise l’allergologue lyonnais. En clair, si vous avez le « rhume des foins », c’est-à-dire que vous êtes allergique aux graminées, il faut s’y prendre dès janvier si vous vivez dans le sud de la France où la saison débute en avril et en février si vous habitez la région parisienne. En revanche, pour les acariens et animaux, le traitement dure toute l’année et vous pouvez le débuter dès les tests terminés.
C’est efficace ?
Il ne faut pas s’attendre à voir tout désagrément disparaître en quelques semaines. « Avec cette technique, on augmente le seuil de réaction : les symptômes seront donc moins forts et dureront moins longtemps dès les premiers mois », souligne Franck Godesky. « Dans 90 % des cas, la désensibilisation est une réussite, pour les allergiques aux acariens, aux animaux essentiellement le chat et tous les pollens. A condition de bien prendre son traitement ! », rassure l'allergologue parisienne.
Attention aux effets secondaires : « Ils sont attendus en réalité : la gorge risque de vous gratter et votre langue risque aussi de grossir. Il arrive aussi que les enfants aient un peu mal au ventre. » En revanche, si l’on est allergique aux pollens de graminées et aux acariens, la désensibilisation aux graminées ne va pas faire disparaître les symptômes liés aux acariens. Mais un patient peut suivre une double désensibilisation.