Antibiotiques: Les tests différenciant les angines virales des bactériennes trop peu utilisés
MEDICAMENTS•La résistance aux antibiotiques est en train de devenir un problème majeur de santé publique...Anissa Boumediene
Serons-nous tous antibiorésistants demain ? Face à la multiplication du recours aux traitements , la question de l’antibiorésistance et ses est au cœur du débat. A l’occasion ce 18 novembre de la Journée européenne d’information sur les antibiotiques, 20 Minutes s’intéresse aux tests de détection rapides (TDR), outils essentiels pour lutter contre les infections résistantes aux antibiotiques, à l’origine de plus de 12.000 décès par an, rappelle l’agence dans un rapport sur la consommation d’antibiotiques et l’antibiorésistance en France publié jeudi.
L’angine dans le viseur
Pour lutter contre cette menace, l’une des pistes majeures est l’utilisation plus large, systématique même, de ces TDR, dont certains sont sur le marché depuis une vingtaine d’années. Dans le viseur : la fameuse angine, encore trop souvent soignée à coup d’antibiotiques, pourtant inefficaces dans la majorité des cas. « Nous avons des tests qui permettent d’identifier les streptocoques A, responsables des angines bactériennes, explique Patrice Nordmann, professeur de microbiologie à l’Université de Fribourg (Suisse) et directeur de l’unité « » de à titre étranger, qui a participé à l’élaboration des TDR. De manière imparable, ce test différencie les angines virales, qui ne nécessitent pas de traitements antibiotiques et représentent 80 à 90 % des cas d’angine, des angines bactériennes ». Avec un résultat clair obtenu en moins de quinze minutes.
Cette problématique de l’antibiorésistance, la ministre de la Santé s’en est emparé. « Nous allons renforcer le dépistage sur l’origine virale ou bactérienne des angines par des tests rapides », a déclaré Marisol Touraine, qui prône le renforcement de l'« encadrement des prescriptions » avec, par exemple, la mise en place d'« une ordonnance dédiée à la prescription des antibiotiques » et un « message de mise en garde » sur les boîtes de ces médicaments contre les risques de mésusage.
Une éducation aux antibiotiques
Pourtant, aujourd’hui, « en cas d’épidémie de grippe, sont distribués gratuitement par l’Assurance maladie aux médecins généralistes », souligne le Dr Bruno Coignard, directeur des maladies infectieuses de l’agence Santé Publique France. Mais malgré plusieurs années de campagnes, ces tests restent très peu utilisés. « Moins de 30 % des médecins les utilisent », regrette-t-il.
Les auteurs du livre blanc recommandent l’amélioration de l’information des professionnels de santé et du grand public sur ces « outils performants d’aide à la décision thérapeutique », ainsi qu’une meilleure prise en charge par l’Assurance maladie. « Une politique efficace de lutte contre l’antibiorésistance passe par l’utilisation de ces outils dont nous disposons, mais aussi par une éducation et une sensibilisation des médecins à cette problématique », clament de concert le Dr Coignard et le Pr Nordmann.
Le risque d’impasse thérapeutique
Encore trop répandus aujourd’hui, les traitements antibiotiques inadaptés ou arrêtés en cours de route, ainsi que l’utilisation massive et répétée en santé humaine et animale des antibiotiques, contribuent à la progression des résistances bactériennes dans le monde, avec un risque d'« impasse thérapeutique » pour les malades, alerte le Dr Bruno Coignard. « C’est pour cela que réduire les prescriptions d’antibiotiques à mauvais escient est un enjeu majeur de santé publique mondiale », insiste le Pr Nordmann. Or, « pour l’heure, nous n’avons pas réussi à atteindre l’objectif de réduire de 25 % la consommation d’antibiotiques en France, prévu dans le , déplore le Dr Coignard. C’est pourtant un facteur essentiel pour préserver l’efficacité de ces traitements ».
En décembre dernier, le Pr Nordmann et son équipe avaient mis au jour ce qui pourrait être la souche bactérienne la plus coriace à ce jour, qui « (carbapénèmes et à la colistine) ». Une découverte qui vient « renforcer ».