SANTEAnorexie: Le plaisir de maigrir serait plus fort que la peur de grossir

Anorexie: Les malades seraient victimes d'une addiction au plaisir de maigrir

SANTELes personnes atteintes d’anorexie seraient accros à la satisfaction procurée par des grammes en moins sur la balance…
Audrey Chauvet

A.Ch. avec AFP

Elles n’ont pas peur de grossir mais deviennent accros à la satisfaction procurée par des grammes en moins sur la balance : selon une étude publiée ce mardi, les personnes atteintes d’anorexie, en majorité des jeunes filles, seraient victimes d’une addiction au plaisir de maigrir. L’anorexie, qui comprend une composante génétique, ont voulu approfondir la piste ouverte par de tout récents travaux évoquant un dérèglement du « circuit de la récompense » observé dans les addictions.

Sudation face à des photos de maigreur

Les chercheurs ont donc analysé les réactions spontanées de 70 patientes et de 20 femmes en bonne santé, à la présentation d'images de personnes de différents poids en utilisant un test qui mesure le taux de sudation de la peau. L'émotion provoquée par certaines images entraîne en effet une augmentation de la transpiration, rapide et automatique. Chez ces patientes, de poids variés et présentant divers degrés de sévérité de la maladie, la vision des images de femmes de poids normal ou en surpoids a provoqué une réaction comparable à celle des sujets sains.

En revanche, face à des images de maigreur, les patientes ont eu des réactions émotionnelles positives alors que les sujets sains n'avaient pas de réaction particulière. Chez les patientes souffrant d'anorexie mentale, l'augmentation de transpiration face aux images de maigreur corporelle s'expliquerait par la présence d'une forme spécifique (dite « allèle Met ») du gène le plus souvent associé à l'anorexie et qui commande la fabrication d'un facteur, le BDNF, impliqué dans la survie des neurones et la neuro-plasticité.

Vers une meilleure prise en charge thérapeutique

Cette « très forte probabilité » que l'anorexie soit du « registre des addictions » devrait améliorer la prise en charge avec certaines approches thérapeutiques comme par exemple « la thérapie en pleine conscience », avance le Pr Gorwood de l’Inserm et chef de service à l'hôpital Saint-Anne à Paris. « On est très démuni au niveau thérapeutique, et aucun pays n'a de médicament ayant une AMM (autorisation de mise sur le marché) pour l'anorexie », remarque-t-il évoquant « des rémissions réelles dans un tiers des cas » seulement.

Le diagnostic de ce trouble du comportement alimentaire repose habituellement sur trois critères internationaux : la présence d'une restriction alimentaire menant à la perte de poids, une perception déformée du poids et du corps et une peur intense de grossir, d'après le manuel de l'Association Américaine de Psychiatrie (le DSM-5). Cette pathologie rare, à composante génétique, prédomine chez les filles (9 filles pour un garçon) et toucherait de 0,2 % à 0,5% de la population, avec un pic chez les 13 à 25 ans, selon le Pr Gorwoord. Beaucoup moins fréquente que la boulimie (5 boulimiques pour une anorexie mentale), l'anorexie a la plus forte mortalité suicidaire de toutes les pathologies mentales (bipolaires, schizophrènes...), selon ce spécialiste qui a dirigé l'étude parue dans la revue spécialisée Translational Psychiatry. L'anorexie a une forte héritabilité (70%), selon des études antérieures notamment sur des familles et des jumeaux.