MATERNITESemaine de l'allaitement: Le parcours du combattant des mères pour allaiter au travail

Semaine de l'allaitement: Le parcours du combattant des mères pour allaiter au travail

MATERNITELa coordination française pour l’allaitement maternel se mobilise pour faire valoir un droit rarement appliqué…
Romain Scotto

Romain Scotto

Des tétées sans poser de RTT. Ce n’est pas encore un slogan de manif pour jeunes mamans en fin de congé maternité, mais simplement l’idée défendue par certaines mères souhaitant faire respecter leurs droits. Si 70 % des femmes allaitent leur bébé à la naissance, une majorité d’entre elles ne donnent plus le sein dès que sonne l’heure du retour au bureau. Eloignement avec l’enfant, absence de local adapté, incompréhension de la hiérarchie, regard des collègues… Tout semble réuni pour rendre incompatible allaitement et vie en entreprise. Pourtant « il existe un droit sur le sujet que nous voulons faire respecter », tonne Aurélie Serry, présidente de la coordination française pour l’allaitement maternel (CoFAM).

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Dans le code du travail, 25 articles ont trait au sujet. Chaque salariée allaitante dispose d’une heure par jour sur son temps de travail jusqu’au premier anniversaire du bébé. Cette heure n’est pas rémunérée, sauf si la convention collective le spécifie. En pratique, l’allaitement peut prendre plusieurs formes : la maman peut donner directement le sein dans une crèche d’entreprise, tirer son lait, ou partir une heure plus tôt du bureau. Il existe en réalité autant de cas que de femmes concernées. Mais aussi autant d’histoires à base de système D.

Harcelée par son manager

« Certaines mères font ça aux toilettes parce qu’il n’y a pas de pièce aménagée. Elles ont l’impression de faire un truc honteux, poursuit Aurélie Serry. Parfois, il n’y a pas de frigo pour stocker le lait. Rien n’est fait pour soutenir les femmes dans cette démarche. » Quand ce ne sont pas les managers qui rejettent les aménagements du temps de travail.

Virginie*, 36 ans et deux enfants, cadre dans une entreprise du CAC 40, se souvient du « harcèlement » de son supérieur lorsqu’elle a fait valoir son droit : « Il a pris acte et m’a mis la pression constamment. Je partais une heure plus tôt le soir. Puis à la veille des un an de mon enfant, il m’a dit : "Je t’ordonne d’être au travail demain à 19h" ».

Malgré les dispositions légales et la souplesse des conventions collectives, la subjectivité du manager reste un facteur décisif dans le choix des mères. Il ne s’agit pas là d’un problème de droit mais de connaissance du droit. « Les femmes se débrouillent donc seulement quand elles sont vraiment motivées. Elles ne devraient pas être obligées de choisir. Elles peuvent faire les deux. C’est important que la société soutienne les femmes pour qu’elles ne soient pas les seules à porter ce choix », enchaîne la présidente de la Cofam pour qui les heures d’allaitement au travail devraient même être rémunérées, comme en Suisse.

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Et les pères dans tout ça ?

A travers ce message, les « travailleuses allaitantes » ne se revendiquent pourtant pas du tout militantes. L’idée n’est pas de défendre le bien-fondé de l’allaitement en tant que tel, mais bien le droit que les femmes souhaitent appliquer dans l’entreprise.

En poussant un peu la logique, certaines n’excluent pas de faire bénéficier au conjoint ce droit à l’heure d’allaitement en lui permettant, par exemple, d’aller chercher le bébé ou de transporter du lait. Envisager l’allaitement au travail comme une problématique familiale permettrait peut-être de faire évoluer les mentalités.