Manque de chance et cancer: L'étude américaine critiquée par l'OMS
SANTE•Les résultats de l'étude publiés dans le magazine «Science», qui avait fait grand bruit il y a dix jours, ont sans doute été présentés avec maladresse...N. Bg.
Personne n’est infaillible, pas même le très sérieux magazine Science. Souvenez-vous: le 2 janvier, le célèbre hebdomadaire relayait une étude affirmant que les cancers étaient plus souvent dus au hasard qu’au mode de vie ou à l’hérédité. Une étude ayant fait grand bruit dans les médias... et aujourd'hui vivement critiquée par la non moins sérieuse et célèbre Organisation mondiale de la santé (OMS).
Son agence pour le cancer (le CIRC, basé à Lyon) s'est dit mardi «en désaccord profond avec les conclusions» de cette étude, selon laquelle les deux tiers des cancers peuvent être expliqués par des mutations génétiques aléatoires qui permettent aux tumeurs de grossir, et un tiers sont le fruit de facteurs génétiques ou d'un environnement défavorable.
Le magazine «Science» ébranlé par les critiques
Pour le CIRC, cette analyse souffre de «limitations méthodologiques» et de «biais» et se trouve en contradiction avec un nombre très important de «preuves épidémiologiques». «Nous savions déjà qu'il y a un élément de chance dans le développement d'un cancer», explique le Dr Christopher Wild, directeur du CIRC. «Mais conclure que le "manque de chance" est la cause majeure de cancer serait trompeur et peut porter atteinte aux efforts pour identifier les causes de cette maladie et pour la prévenir», selon ce responsable.
Une critique qui a un peu secoué le magazine Science, dont la journaliste à l’origine de la publication de l’étude a reconnu certaines «maladresses». D’abord en titrant sur «les deux tiers de tous les cancers», alors que ceux du sein ou de la prostate, très courants, n’étaient pas pris en compte dans l’étude. Ensuite en simplifiant un peu trop le message des auteurs de l’étude, difficile à comprendre et à vulgariser. Enfin, tentation récurrente du journalisme scientifique, en donnant une allure un peu trop «sexy» à son article au détriment, même minime, des faits.
Au final, comme l’explique un spécialiste de la prévention du cancer cité dans le nouvel article de Science, «les auteurs de l’étude ont effectué une trouvaille vraiment fascinante. Mais c’est une petite trouvaille». Aussi petite que le rôle réellement joué par le hasard comparé aux causes génétiques ou environnementales au sens large. Et qui ne méritait sans doute pas un tel écho médiatique.