Rennes: « Avoir une lumière positive sur le quartier »… Le square de Copenhague veut changer d’image
SOLIDARITE•Une fresque participative imaginée par un habitant a été inaugurée mercredi en présence de nombreux riverainsCamille Allain
L'essentiel
- Une fresque collaborative a été inaugurée mercredi soir square de Copenhague, à deux pas de l’avenue Henri-Fréville à Rennes.
- L’œuvre a été imaginée par l’artiste Joe Popi, qui habite une des tours dominant le quartier.
- Dans le secteur, les habitants se mobilisent pour changer l’imager du quartier, souvent assimilé au trafic de stupéfiants.
Comme bon nombre d’idées, celle-ci est née lors d’un confinement. Depuis la fenêtre de son balcon, le graffeur Joe Popi voyait chaque jour les murs gris du centre commercial des Almadies, rêvant de colorer ce petit pôle commercial un brin vieillissant. Il n’aura pas réussi. Mais grâce aux animateurs de rue du Relais, l’artiste a eu accès aux murs décrépis du parking souterrain du square de Copenhague où il habite. Propriété du bailleur Aiguillon Construction, l’ouvrage en béton arbore depuis quelques jours de charmantes teintes colorées. « J’ai choisi quatre nuances de bleu. Des couleurs assez neutres, qui puissent plaire à tout le monde. Je n’ai jamais vu autant de sourires que quand j’ai travaillé sur cette fresque », explique Joe Popi.
L’inauguration de la fresque de street-art mercredi soir a permis aux habitants des immeubles de ce quartier situé à deux pas de la station de métro Henri-Fréville de se retrouver autour d’un concert et d’un café. L’ambiance était au sourire. « Les gens ne parlent que des choses négatives qui se passent ici. Alors qu’il y a plein de trucs positifs qui se passent. Cette fresque, elle a été faite avec amour, je trouve ça beau. Il faut des actions comme ça pour avoir une lumière positive sur le quartier », glisse Asma.
Faire oublier les trafics
L’image « négative » évoquée par l’adolescente de 15 ans, c’est celle du trafic de stupéfiants. Depuis plusieurs mois, le square de Copenhague est devenu l’un des hauts lieux de deal de Rennes. Les riverains le savent tous et ne le nient pas. Mais ils aimeraient en sortir, montrer autre chose. « On a des problèmes de délinquance, et des habitants en souffrent. Mais il y a une belle énergie dans ce quartier. On voit beaucoup d’initiatives de gens qui veulent s’approprier l’espace public », argumente Xavier Desmots, l’élu de quartier.
Ces derniers mois, un petit groupe de jeunes filles du quartier s’est fait remarquer par ses actions. Accompagnées par la MJC Maison de Suède, Asma, Norine et leurs amies ont réussi à faire valider leur projet de végétalisation du square, dans le cadre du budget participatif. « On va souvent s’asseoir sur un rond dans le square. Nous, on aimerait bien y mettre plus de nature, que les mamans y viennent avec leurs enfants. Peu de gens descendent », constate Norine. En allant frapper aux portes pour inciter les habitants à voter pour leur projet, les adolescentes ont réussi à obtenir 100.000 euros pour végétaliser leur square. Elles ont aussi réussi à créer du lien, aidant par exemple les plus anciens à utiliser un ordinateur pour enregistrer leur vote. « Ce quartier, c’est comme une famille. On organise des goûters, on se parle, on est soudés », assure Asma.
Un prix solidaire pour les ados du quartier
A ses côtés, l’une des animatrices de la MJC acquiesce. Et insiste. « Les filles en avaient marre de voir que leur quartier était mal vu. Je suis fière de les voir se bouger comme ça ». Aiguillon Construction, bailleur social qui gère l’immeuble, confirme que les initiatives d’habitants se multiplient ces derniers temps. « Tout n’est pas parfait mais on voit beaucoup d’actions positives, des tournois de foot, de pétanque. Il y a une volonté de changer l’image », poursuit Clémentine Jégou, chargée d’animation chez Aiguillon Construction.
Il y a quelques semaines, le bailleur social a emmené plusieurs adolescentes du quartier à Paris. Asma, Norine et leurs copines ont eu la surprise de recevoir le premier prix des trophées d’innovation solidaire. « On a pleuré, c’était tellement beau », glissent les deux amies. L’an dernier, elles et les « petits » du quartier avaient confectionné des colis solidaires qu’elles ont distribués aux habitants des immeubles. « Ce quartier, il le mérite. Il mérite du soutien, de la couleur. J’espère que les élus l’entendent », glisse l’artiste Joe Popi. Peut-être qu’ils le liront.