Le Marquis de la Rouërie, rival de Lafayette
Histoire de Bretagne•C’est un personnage presque inconnu de l’histoire de France, mais aussi digne d’intérêt que Lafayette. Ceci ne fait aucun doute pour le producteur de cinéma Thierry de Navacelle, tombé depuis longtemps sous le charme du marquis. Après le livre qu’il vient de lui consacrer, La Rouërie, rival de Lafayette, Navacelle travaille déjà sur une série en dix épisodes, produite aux États-Unis...Magazine Bretons - Didier Le Corre
BRETONS : Comment vous est venue l’idée d’écrire un livre sur La Rouërie ? Êtes-vous tombé par hasard sur son histoire ou étiez-vous déjà intéressé par le personnage ?
THIERRY DE NAVACELLE : J’avais 16 ans lorsque j’ai rencontré pour la première fois La Rouërie. J’ai lu le livre de Lenotre (Le Marquis de La Rouërie, édité en 1895, ndlr) et j’ai eu un coup de coeur. Après, je l’ai retrouvé par petites touches. Je ne suis pas Breton mais je me suis marié avec une Bretonne. Alors, j’ai beaucoup sillonné la Bretagne et je me suis retrouvé au château de La Guyomarais, où il est mort, devant cette plaque, don de l’ambassade des États-Unis, écrite en breton, anglais et français, avec de chaque côté un drapeau américain et un drapeau breton, et plus loin, la tombe, un peu perdue au fin fond de la Bretagne. Je suis allé ensuite à la découverte du château de La Rouërie, qui n’a quasiment pas changé depuis cette époque. Ensuite, je l’ai retrouvé à travers la littérature, en lisant par exemple les Mémoires d’outre-tombe de Chateaubriand, où il en parle plusieurs fois avec respect et admiration. Victor Hugo le cite également plusieurs fois dans Quatrevingt-treize. Tout ceci a commencé à m’intriguer et à m’intéresser de plus en plus…
On ignore que La Rouërie et George Washington se sont écrit de façon si régulière pendant quinze ans. D’où proviennent ces lettres ?
Une première série d’une quarantaine de lettres a été publiée en 1878 dans la revue historique de la ville de New York. Mais il y en a beaucoup plus, par exemple dans les archives de Washington. Il y en a sans doute encore à découvrir dans les archives d’Hamilton, de Jefferson et de beaucoup d’autres personnages de la révolution américaine, car La Rouërie écrivait beaucoup, dans un anglais souvent approximatif mais très imagé. Et toutes ces archives ont été transcrites et numérisées récemment, et sont pour la plupart disponibles sur le site de la Library of Congress.
L’idée générale est de redonner sa juste place à La Rouërie, notamment par rapport à Lafayette. C’est le titre du livre. C’est ce qui vous a guidé ?
Oui, car au fur et à mesure que j’avançais, je m’éloignais de plus en plus du personnage décrit par les historiens. Il était très structuré et organisé, assez loin du personnage un peu léger et flamboyant dont parle Lenotre. Ce n’était pas qu’un chevalier de l’Ancien Régime, un peu farfelu. C’était un homme très intelligent, et la tenue de son corps de partisans avait toujours fait l’admiration de tous. Alors qu’il n’avait aucune expérience de la guerre, il s’était battu comme un lion dès sa première bataille, à peine deux mois après avoir atterri, à la nage, sur les côtes américaines. Comme le précise Chateaubriand, il s’est plus battu que Lafayette.
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Retrouvez la suite de cet entretien deans le magazine Bretons n°168 d'octobre 2020