Isabelle Attard : « L’anarchisme, ce n’est pas la violence ni le chaos »
Bretagne•Ancienne députée écologiste de Normandie, Isabelle Attard a fait le choix de s’installer en Bretagne, région qui lui semble plus propice à l’épanouissement de ses idées. Actuellement directrice du musée de l’école de Bothoa, dans le Centre-Bretagne, elle a signé Comment je suis devenue anarchiste aux Éditions du Seuil...Magazine Bretons - Maiwenn Raynaudon-Kerzerho
Bretons : Vous êtes née dans le Loir-et-Cher, vous avez été élue en Normandie... Pourquoi avez-vous choisi de vous installer en Centre-Bretagne ?
Isabelle Attard : Je venais déjà en Bretagne très souvent, on aimait beaucoup la région depuis longtemps. Après la fin de mon mandat, on ne se voyait pas rester là où j’avais été élue. C’est très difficile psychologiquement. Quand vous croisez les gens, soit ils s’apitoient sur votre sort, soit ils vous enfoncent encore plus… C’est difficile de se fondre dans la masse, d’être incognito. On a décidé de venir en Bretagne. Il y a une atmosphère vraiment particulière sur ce plateau granitique, ici. Je me sens bien sur ce fer à cheval, qui va de Saint-Gilles-Pligeaux, Saint- Nicolas-du-Pélem, Kergrist- Moëlou jusqu’à Bourbriac.
Les réseaux militants vous ont semblé plus forts ici qu’ailleurs ?
Oui. J’en avais déjà discuté avec des militants qui faisaient un tour de France pour aller découvrir des initiatives écologiques, d’autonomie alimentaire, énergétique... On était arrivés à la même conclusion : il y a de belles choses à découvrir partout en France, il n’y a pas une région où il n’y en a pas, mais c’est une question de densité. En Bretagne, il y en a beaucoup plus. Et puis, même si j’aime le Sud, j’ai vécu longtemps dans les Cévennes, le changement climatique me fait dire que je ne pourrais pas y vivre. J’avoue aussi que les centrales nucléaires, ce n’est pas non plus trop mon truc. Donc tout était réuni pour qu’on vienne en Bretagne !
Toutes vos expériences, dont celle du sexisme – vous avez été de celles qui ont dénoncé les agissements de Denis Baupin –, et des lectures vous ont conduite à vous déclarer anarchiste. Mais qu’est-ce que l’anarchisme ?
Liberté, égalité, fraternité. Jamais l’une sans l’autre. John Stuart Mill disait : “Ma liberté s’arrête quand commence celle des autres”. Un anarchiste vous dira : “Je ne serai libre que quand tous les autres le seront aussi”. On ne peut pas se sentir libre s’il y a des injustices autour de nous. Il y a cette notion de solidarité. C’est une forme d’organisation qui abolit les phénomènes de domination.
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Aujourd’hui, les gens imaginent que l’anarchisme, c’est le chaos, la violence, alors que ce n’est pas ça. Élisée Reclus disait : “C’est l’ordre sans le pouvoir”. On s’organise nous-mêmes pour se fixer des règles de vie. Ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas de règle.
Quand on ne définit pas les mots, qu’on ne va pas à la racine, plus rien n’a de sens. Aujourd’hui, plus qu’avant, je ne peux que constater combien le capitalisme est chaotique et nous met dans une situation où on va dans le mur, en accélérant. Moi, je continuerai à dire qu’il existe une autre façon de fonctionner qu’un monde capitaliste où c’est chacun pour soi, le profit avant tout.
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Retrouvez l'intégralité de cet entretien dans le magazine Bretons de juin.