Rennes interdit les terrasses chauffées, Paris y réfléchit
COMMERCE•Au 1er janvier, les cafés et restaurants de la capitale bretonne ne pourront plus allumer des chauffages à l’extérieurCamille Allain
L'essentiel
- La ville de Rennes a interdit les terrasses chauffées. La mesure prendra effet au 1er janvier 2020.
- Certains cafetiers craignent une baisse de leur chiffre d'affaires et un manque à gagner.
- La mesure environnementale est saluée par le principal syndicat de la restauration.
«Je suis fermé le 31 décembre. Mais je vais continuer d’utiliser mes chauffages jusqu’au dernier jour ». Ce patron de restaurant de la rue Saint-Georges ne digère pas la décision de la ville de Rennes d’interdire les terrasses chauffées. Finalisée avant l’été, cette mesure environnementale s’appliquera au 1er janvier à tous les bars et restaurants de la capitale bretonne. Une décision locale qui pourrait faire école dans le pays. La ville de Paris, qui avait tenté d’interdire les chauffages à gaz il y a quelques années, pourrait suivre Rennes dans son choix.
Dans les rues de la capitale bretonne, les avis sont partagés. « Je suis fumeuse, j’aime bien rester dehors avec mon café. Je trouve que les terrasses donnent de la vie, elles animent les rues », estime Marie, assise en face du Parlement de Bretagne. Emmitouflée dans son manteau d’hiver, la quadragénaire est frigorifiée en ce matin de décembre pourtant pas si froid. « Je comprends que l’on veuille interdire les terrasses chauffées, ça ne me paraît pas idiot. Même si je pense qu’il y aurait bien d’autres choses à faire avant pour préserver l’environnement ».
« Je suis écœuré »
Si la plupart des clients que nous avons croisés sont plutôt favorables à cette mesure, il n’en est pas de même chez les professionnels de la restauration, qui craignent de voir leur chiffre d’affaires diminuer. « Mes radiants, je ne les allume que les samedis soirs quand le restaurant est plein et que je n’ai plus de place à l’intérieur. Ce n’est pas grand-chose. Mais j’ai fait le calcul, je devrais perdre 20.000 euros de chiffre d’affaires au minimum chaque année. Je suis écœuré », s’emporte un restaurateur du centre ancien. A quelques pas de là, un serveur dresse la terrasse de sa crêperie, qui n’a jamais été chauffée. « Je sais que personne ne voudra manger dehors mais je le fais tous les jours. Je veux montrer qu’on est ouverts ».
Dans les rues pavées du cœur historique de la ville, les bistrots ou restos sont parfois étroits et comptent sur l’espace extérieur pour accueillir davantage de clients. « Il est vrai que ceux qui ont peu d’espace à l’intérieur seront davantage pénalisés. Mais le domaine public doit rester accessoire dans l’activité » rappelle Marc Hervé, adjoint de Nathalie Appéré chargé du commerce.
Le syndicat des cafetiers favorable à l’interdiction
Convaincu du bien-fondé de la mesure, l’élu s’étonne de la réticence des restaurateurs. « Les jours où il fait froid ou quand il pleut, les gens ne vont pas en terrasse, qu’il y ait du chauffage ou non. Cette mesure ne va pas empêcher les Rennais de sortir pour boire ou manger », estime le socialiste. Même son de cloche chez le patron des cafetiers d’Ille-et-Vilaine. « Ça va modifier quelques habitudes mais ça ne va pas faire baisser les chiffres d’affaires. Les professionnels pourront même économiser le prix de l’électricité. On ne peut plus mettre un appareil de 2.000 watts pour chauffer la rue », assure François de Pena, le président de l’Umih 35. Qui ajoute : « Ça me fait penser à l’interdiction de fumer. Aujourd’hui, qui reviendrait en arrière ? ».
Debout derrière le comptoir de son bar, un patron hausse les épaules. « On paye un droit de terrasse, on devrait nous laisser faire ce qu’on veut ». Lui n’a pourtant jamais installé de chauffage pour sa petite terrasse. « C’est beaucoup trop cher. Je ne vais pas payer pour trois ou quatre personnes qui prennent un café, ou alors il faudrait que je le facture trois euros », estime-t-il.
A Paris, de très nombreux cafés n’hésitent pas à chauffer toute la journée pour attirer les passants. Les écologistes souhaitent que la ville interdise la pratique, prenant Rennes en exemple.