EntretienBertrand Desplat: “On veut défendre un football populaire, à l’ancienne”

Bertrand Desplat: “On veut défendre un football populaire, à l’ancienne”

EntretienLe président de l’En Avant de Guingamp a ouvert le capital de son club à ses supporteurs, via l’association Kalon. Une opération qui place l’EAG au même plan que le célèbre Barça et ses socios ! Une démarche logique pour Bertrand Desplat, un dirigeant au franc-parler certain, qui entend continuer à faire du Petit Poucet guingampais un club à part...
Maiwenn Raynaudon-Kerzerho - Bretons

Maiwenn Raynaudon-Kerzerho - Bretons

Bretons : Avec l’opération Kalon, les supporteurs d’En Avant peuvent devenir actionnaires du club ? Qu’est-ce que cela veut dire ?

Bertrand Desplat : Pour nous, c’est avant tout un symbole. C’est le projet le plus fusionnel du club. Il vient dans un environnement qui existe déjà, le mode d’actionnariat d’EAG, qui est en lui-même très particulier. On est le seul club de l’élite du football détenu par 141 copropriétaires. Le schéma classique d’un club de foot, c’est qu’il est détenu par un actionnaire très puissant, voire unique : monsieur Pinault à Rennes, le fonds d’investissement QSI du Qatar à Paris… À Guingamp, 141 chefs d’entreprise locaux et régionaux se sont réunis dans une forme de coopérative, pour dire : chez nous, il n’y a pas de multinationale, de milliardaire, de grand mécène. Par contre, il y a une union d’hommes qui va faire la force. En étant unis, divers, multiples, on va pouvoir faire vivre un rêve complètement fou, une utopie : dans un village de 7 000 habitants, on va avoir une équipe de Ligue 1, voire même une équipe qui joue la Coupe d’Europe ! Grâce à notre solidarité.
Ce modèle est magnifique. Mais quand on le regarde, on peut se dire qu’il y a des oubliés : les supporteurs. Jusqu’à maintenant, le supporteur n’avait pas sa place, alors que l’histoire d’EAG est autant la sienne que celle des entreprises dans le capital. On vient réparer un oubli, ouvrir grand la porte de la maison EAG pour permettre à tout supporteur, où qu’il soit dans le monde, à partir du moment où il se sent proche du club, qu’il y est attaché, de participer à cette aventure humaine.

Avec cette idée de socios, on pense tout de suite au Barça !

Eh bah voilà, ça me fait marrer ! On ne serait jamais arrivés là si on n’avait pas un peu rigolé. On sait qui on est à Guingamp, on ne s’invente pas une vie. Mais on aime bien être un peu poil à gratter, être l’empêcheur de tourner en rond, avoir ce regard distant très second degré sur notre situation. Oui, on ne sera jamais le PSG ou le Barça, mais si on peut rire en cognant sur le PSG, si on peut rêver en se disant : peut-être que, un jour, il y aura un Guingamp-Barça… Ça coûte pas cher, et à partir du moment où on rêve, on se donne une toute petite chance que ça arrive un jour. Nous, ici, on n’a rien. On ne nous a rien donné au départ. Ici, c’est le granit, la flotte, le vent… On est tout allés chercher à la force du poignet, avec l’envie et l’opiniâtreté. On a bien gagné le droit de rêver ! Mais à force de rêver, on est venus en Ligue 1, on a gagné deux Coupes de France, on s’est qualifiés pour des seizièmes de finale en Coupe d’Europe,
on est le seul club breton à l’avoir fait !

Vous vivez dans un système qui ne vous est pas forcément favorable. Vous avez ainsi mené la fronde des petits clubs au sein de la Ligue pour une meilleure répartition des droits télé, ne pas changer les règles de montée et descente… C’est une question de survie pour vous ?

On me voyait comme le gauchiste de service, on m’appelait le Cégétiste ! J’ai pas l’impression d’être cégétiste ! Nous, on respecte le combat, mais pas les combats truqués, pipés d’avance. Dans un championnat, il y aura toujours un premier. Je vous rassure, ce sera rarement nous, on peut rêver mais bon… On en a bien conscience. Mais le premier, il aura toujours à jouer contre un dix-neuvième, un vingtième. Et ce qu’il faut, on va parler marketing, pour que le produit ait une valeur, c’est qu’il soit équilibré, qu’il y ait l’incertitude du sport. Que, comme cette année, Guingamp puisse battre le PSG. Ça n’arrivera qu’une fois sur dix ou vingt matches, mais il faut que ça arrive ! Et si ce n’est pas Guingamp, Dijon ou Brest. Si demain, le PSG met 10-0 à chaque fois qu’il rencontre Guingamp, Brest ou Lorient, le championnat n’a plus aucun intérêt.

magazine Bretons n°130
magazine Bretons n°130 - Bretons

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