Ce dimanche soir, dans son fief de Tourcoing, Gérald Darmanin vit ses dernières heures de ministre de l’Intérieur et ses premières minutes de député du Nord. Au second tour des législatives anticipées, il sort largement vainqueur (58,85 %) de son duel avec le candidat du Rassemblement national (37,04 %). Et même si le résultat n’était pas forcément évident, les Tourquennois étaient serins avant même le triomphe de leur champion.

Alors que moins de deux points séparaient Gérald Darmanin de son adversaire du RN au premier tour, on s’attendait logiquement à voir des mines crispées, des regards anxieux et un tas d’ongles rongés dans le hall de la marie de Tourcoing, ce dimanche soir, avant le prononcé des résultats. Mais rien de tout ça, au contraire. Plus d’une heure avant le verdict des urnes, Bruno n’était pas stressé : « ici, on savait que tout le monde allait faire barrage au RN », nous assure cet habitant. « Y’a même des bureaux où il a fait 80 % », renchérit-il.

On frôle l’entrée sur scène d’une rock star

Un optimiste égaré ? Pas du tout : « on n’avait pas de doute qu’il soit élu, il a tellement fait pour Tourcoing en tant que ministre de l’Intérieur », se félicite un commerçant du coin. Et les mines se réjouissent d’autant que l’on approche de l’heure « H ». Avant même que l’intéressé se présente aux 200 personnes venues assister à la soirée électorale, tout le monde sait qu’il est passé large. Alors, lorsque Gérald Darmanin arrive, on frôle l’entrée sur scène d’une rock star. Ça applaudit, ça crie, ça hurle et le ministre de l’Intérieur grimpe finalement sur l’estrade sous les « Gérald président ».

Parmi les mines hilares, une femme ronge son frein. « Il a eu beaucoup de chance de bénéficier de notre retrait », rumine Katy Vuylsteker, opposante écolo à la mairie. Puis de lâcher que « ça fait quand même des années qu’il ne fait que leur paver la route au RN » et « qu’il verra bien en 2026 pour les municipales ».

Devant la presse, Gérald Darmanin reste humble, affirmant « qu'aujourd’hui, personne n’a gagné » et qu’il faut « prendre ces résultats avec humilité ». Ça dénote un peu avec le « V » de la victoire qu’il faisait sur scène deux minutes avant mais bon. Ce dont le député se félicite ouvertement, c’est d’avoir gratté quelques voix au RN dans certains bureaux : « J’ai compris les électeurs du RN et j’ai même su en convaincre. […] Il faut plus d’autorité », a-t-il clamé. Avant de se faufiler entre les caméras, claquant des bises et acceptant volontiers les selfies.

« Faut rester rassemblés maintenant »

Si les Tourquennois présents sont ravis de voir Gérald Darmanin (re)devenir député, ils semblent aussi lui promettre un avenir plus grand. Beaucoup plus grand. « Ce serait égoïste de vouloir le garder ici, ou même à l’Assemblée nationale. Il a un destin plus haut que ça », affirme notre commerçant. Et Bruno d’ajouter que « Darmanin à l’Intérieur, c’était mieux pour la ville ». Président de la République ? S’ils n’osent en prononcer le vœu individuellement, l’assistance ne se gêne par pour le faire lorsque le champion repart.

Loin de l’euphorie, Adrien et Léa, 20 ans tous les deux, prennent l’air dehors. Dans leurs yeux, ni larme de joie, ni larme de désespoir. « On est quand même rassurés que ce soit pas le RN qui soit passé, mais c’est pas une victoire pour autant », soupire le jeune homme qui a voté pour le Nouveau Front populaire avec espoir au premier tour. « Faut rester rassemblés maintenant, pour pas que ça recommence aux prochaines élections. »

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