Procès Chirac: Le procès va reprendre en septembre
JUSTICE•La Cour de cassation a rejeté la question prioritaire de constitutionnalité, le procès des emplois fictifs, dans lequel Jacques Chirac est poursuivi, aura lieu, certainement en septembre...Avec Reuters
Jacques Chirac n'échappera pas à la justice. La Cour de cassation a donné ce vendredi midi son feu vert à la réouverture du procès de l'ancien Président, poursuivi pour 28 emplois fictifs présumés à son cabinet quand il était maire de Paris.
La plus haute juridiction française a rejeté une demande procédurale appelée question prioritaire de constitutionnalité («QPC») qui tendait à faire déclarer ces faits prescrits.
Une procédure qui reprend
Ce procès est le premier dans l'histoire de France à viser un ancien chef d'Etat républicain. Il est depuis mars au coeur d'un débat sur la justice française, accusée par les médias et une partie de la gauche de ménager les hommes de pouvoir.
Le tribunal correctionnel de Paris, qui avait renvoyé le procès en mars dans l'attente que la Cour tranche le problème, se réunira à nouveau le 20 juin pour fixer une nouvelle date d'audience. Le début du mois de septembre est pressenti.
Jacques Chirac, 78 ans, est poursuivi avec neuf autres prévenus pour «détournement de fonds publics» dans un dossier visant 28 emplois présumés fictifs à l'Hôtel de ville de Paris de 1992 à 1995, quand il était maire.
La Cour de cassation, plus haute juridiction française, a rejeté une question prioritaire de constitutionnalité qui était soulevée par un co-prévenu de Jacques Chirac. Elle maintient du même coup des usages procéduraux sur la prescription qui permettent de poursuivre des délits financiers anciens, mais aussi des crimes en série.
Qu'est-ce qu'une QPC?
La question proritaire de constitutionnalité, procédure créée par une réforme de 2008, consiste pour un justiciable à contester une loi en mettant en doute sa conformité avec la Constitution.
Les délits sont en principe déclarés prescrits - trop anciens pour être jugés - après trois ans. Le co-prévenu de Jacques Chirac contestait deux méthodes interprétant ce principe et élargissant les possibilités de poursuites.
Si les faits ont été dissimulés, on peut actuellement les poursuivre durant trois ans à partir du moment où ils ont été découverts et non à partir du moment où ils sont commis. Par ailleurs, un dossier ancien n'est pas prescrit s'il est déclaré lié, «connexe», à un autre plus récent.
Michel Fourniret également débouté
Dans l'affaire visant Jacques Chirac, ces deux notions ont été utilisées, 21 emplois présumés fictifs découverts dans une enquête étant notamment «sauvés» par leur «connexité», leur lien avec sept autres.
La prescription n'est pas un principe à valeur constitutionnelle, dit la Cour. L'usage de la connexité et de la dissimulation pour poursuivre est par ailleurs conforme aux droits de l'homme, ajoute-t-elle dans quatre arrêts.
Ces arrêts concernent Jacques Chirac mais aussi le tueur en série Michel Fourniret, qui avait emboité le pas à l'ancien président en soulevant une question de procédure similaire.
Arrêté pour un enlèvement en 2003, Michel Fourniret a été condamné à perpétuité pour sept meurtres anciens dont la prescription théorique a été annulée grâce à leur lien avec l'affaire la plus récente.
La QPC, une arme pour «torpiller» le procès?
Il voulait faire déclarer prescrite une autre affaire de meurtre de 1988 pour laquelle il est mis en examen. Un autre arrêt de la Cour rejette enfin une question prioritaire de constitutionnalité soulevée dans le procès à Nanterre (Hauts-de-Seine) de Thierry Gaubert, un proche de Nicolas Sarkozy.
Il est soupçonné de malversations autour de la collecte du «1% logement» dans les années 1980 et 1990. lorsqu'il présidait deux organismes collecteurs, Habitation française et Habitation pour tous (HPT).
Des dirigeants politiques, notamment le président du MoDem François Bayrou, estimait que cette question prioritaire de constitutionnalité était utilisée comme arme pour «torpiller» les poursuites pour délits financiers.
Si la Cour avait accepté la procédure, elle aurait saisi le Conseil constitutionnel, appelé à trancher mais dont la composition est discutée.
Il est en effet présidé par Jean-Louis Debré, proche de Jacques Chirac et composé d'une majorité de membres qui furent ministres de l'ancien président ou ont été nommés par lui à ce poste.
Une partie de la majorité entend néanmoins poursuivre les tentatives de réforme de la prescription en empruntant la voie législative. Des textes sont en gestation à l'Assemblée nationale.