A Paris, Lyon, Marseille, qui est pour ou contre la réforme de la loi PLM ?

Municipales 2026 : A Paris, Lyon, Marseille, qui est pour la réforme de la loi PLM, qui est contre, et pourquoi ?

suffrage universel directLa commission des lois a adopté mercredi le texte visant à réformer le scrutin à Paris, Lyon et Marseille, un an avant les élections municipales. Un texte qui suscite une farouche opposition dans les villes concernées
Aude Lorriaux avec R. LD

Aude Lorriaux avec R. LD

L'essentiel

  • La réforme du mode de scrutin à Paris, Lyon et Marseille devrait être examinée à l’Assemblée nationale lundi 7 avril, après son adoption en commission des lois mercredi. Et ce, un avant les élections municipales 2026.
  • Le texte vise à faire en sorte que chaque voix compte, mais au détriment des conseils d’arrondissements, qui seront élus séparément, sans lien direct avec le pouvoir central.
  • Si la droite lyonnaise semble plutôt favorable au texte, ce n’est pas le cas à Paris ni à Marseille, où les élus locaux ont peur de perdre des sièges.

Vous avez sans doute vu passer cette histoire de réforme du scrutin à Paris, Marseille et Lyon, et ça vous a peut-être mis des nœuds dans le cerveau. 20 Minutes vous résume les enjeux et positions des poids lourds politiques dans chacune des villes, alors que la réforme devrait être votée le 7 avril prochain. Pour l’heure, elle vient de passer une étape décisive, avec son adoption en commission des lois.

L’actuelle loi PLM

Actuellement, et depuis la fameuse loi « PML » (et non PLM, mais peu importe, puisque PLM s’est imposé) de 1982, les élections dans les trois plus grandes villes de France se déroulent par arrondissements ou par secteurs, et non à l’échelle de la ville, comme on vous l’expliquait il y a un an dans cet article (à lire si vous n’avez vraiment rien suivi). Cela veut dire qu’à Paris, Lyon et Marseille, les électeurs et électrices votent pour des listes qui sont différentes dans chaque arrondissement, et qui ne comportent donc pas forcément le nom de leur futur maire, contrairement aux autres villes, où il n’y a qu’une seule liste. Les premiers et premières de chaque liste dans chaque arrondissement sont ensuite désignées au conseil municipal de la ville, qui élit le ou la maire. Les personnes en bout de liste ne sont « que » conseillers et conseillères d’arrondissement et ce sont elles et eux qui élisent le ou la maire d’arrondissement.

Bon à savoir pour comprendre la suite : comme pour toutes les communes de plus de 3.500 habitants, si une liste obtient la majorité absolue des voix au premier tour, elle gagne automatiquement la moitié des sièges, le reste étant distribué à la proportionnelle. Si donc une liste fait 50 % des voix, elle obtient 50 % des sièges et la moitié des 50 % restants (50 + 25), soit au final 75 % des sièges.

La réforme proposée

L’inconvénient de ce scrutin d’arrondissements, dénoncent certains depuis parfois des années, est qu’il ne reflète pas le total des voix, et pourrait conduire à ce que le maire d’une ville soit élu avec moins de voix que son adversaire. Le scénario s’est déjà produit à Marseille mais jamais clairement à Paris.

La proposition de loi, lancée par quatre députés macronistes (Sylvain Maillard, David Amiel, Olivia Grégoire et Jean Laussucq), propose d’élire les membres du conseil des trois métropoles au suffrage universel direct, comme c’est le cas dans les autres villes, et de séparer l’élection des conseils d’arrondissement de celle du conseil municipal. Ce qui ferait donc un deuxième scrutin. Elle prévoit aussi d’abaisser la prime majoritaire de 50 % à 25 %, ce qui permettrait une meilleure représentativité mais présente un risque d’instabilité.

A Paris, droite et gauche vent debout contre la réforme

Dans la capitale, peu d’élus se réjouissent de la réforme. Les socialistes dénoncent depuis plus d’un an un « tripatouillage électoral ». La Mairie de Paris veut plutôt renforcer le rôle des maires d’arrondissement, dans une logique de décentralisation.

Mais la droite y est également défavorable, alors même que la réforme est largement poussée par leur ancienne cheffe de file, Rachida Dati. « Nous dénonçons cette méthode précipitée et le risque de décisions expéditives », ont réagi début février les élus LR parisiens, redoutant « un Conseil de Paris centralisé gouvernant seul, au détriment des mairies d’arrondissement ».

« La réforme actuelle de la loi PLM annonce la mort clinique des arrondissements qui ne seront plus que des relais administratifs de la mairie centrale, n’ayant aucune force juridique. C’est une dérive très macroniste de recentralisation », critique le député de Paris Emmanuel Grégoire, ex-Premier adjoint, en campagne pour 2026. « Le texte qui est sorti hier [mercredi] de la commission des lois confirme leur volonté de tuer les arrondissements. Il est pire encore que ce que le rapporteur [Jean-Paul Mattei, Modem] avait essayé de faire. Il s’était montré sensible à nos arguments, de permettre une représentation équilibrée des arrondissements. Il y aura toujours des maires d’arrondissement certes, mais sans lien avec l’organe délibérant, là où l’on vote le budget et toutes les délibérations », se désole Patrick Bloche.

Le premier adjoint d’Anne Hidalgo bat en brèche l’argument principal des promoteurs de la réforme : « Il n’est pas vraisemblable à Paris et à Lyon avec un scrutin d’arrondissement, que le candidat arrivé second en nombre de voix au niveau de la commune puisse être élu maire. » Il estime qu’il faudrait que la droite fasse des scores de l’ordre de 80 % dans les arrondissements de l’Ouest et que la gauche dépasse à peine 50 % dans ses arrondissements pour parvenir à un tel résultat.

A Lyon, la majorité est contre, la droite et l’opposition sont plutôt favorables

« Pas un Lyonnais ne s’intéresse à ce sujet », a déclaré en janvier Grégory Doucet, balayant le sujet d’une main, et dénonçant lui aussi un « tripatouillage électoral ». Pour le maire écologiste de Lyon, la priorité serait plutôt de revoir le nombre de conseillers par arrondissement, fondé sur un recensement datant des années 1980.

Le candidat LR pour les élections municipales de 2026, Pierre Oliver, s’est quant à lui déclaré favorable à la réforme, qui permettrait, dit-il à 20 Minutes de « rééquilibrer rapport de force », en comptant sur la plus forte participation de trois arrondissements lyonnais qui votent à droite, et sur les Lyonnais qui votent depuis leur résidence secondaire. « Je suis sur la même position que Rachida Dati », nous confie-t-il, tout en concédant avoir des interrogations sur le « timing » de la réforme, qui ne lui paraît « pas bon ». « C’est sûr qu’on se demande pourquoi ça n’a pas été fait avant ou pourquoi ce n’est pas reporté après les élections », lâche-t-il.

D’autres barons de la droite locale, comme Béatrice de Montille (LR), Christophe Geourjon (UDI) ou la centriste Delphine Borbon se disent aussi favorables « sur le principe », avec des réserves aussi sur la façon dont la réforme s’accomplit, qu’ils jugent tous et toutes « précipitée » ou « inaboutie ». « On est favorable au suffrage direct du maire de Lyon, estime David Kimelfeld, président de l’Alliance sociale démocrate et progressiste, qui souhaite rassembler le centre et la gauche. Mais certaines choses restent obscures, on ne sait pas bien comment les choses vont se mailler. Et le bémol, c’est que le même jour vous aurez les élections à la ville, dans les arrondissements, et pour la métropole. Il faut trois urnes, trois bureaux de vote, cela pose des problèmes en matière de lieu et de place. Il y aura 950 présidents de bureaux de vote, contre 600 pour deux scrutins, ce qui était déjà difficile. Cela paraît assez irréaliste. »

A Marseille, le maire soutient la réforme, la droite craint le RN

« La voix d’un Marseillais, ça vaut la voix d’un Bordelais, d’un Lillois ou d’un Niçois », a déclaré à France Info le maire DVG Benoît Payan, qui a accédé au pouvoir après la démission de la maire écologiste Michèle Rubirola. « Le maire de Marseille a toujours eu la même position sur cette loi il a toujours été favorable à une simplification du scrutin et à un scrutin plus lisible et démocratique. Un retour au droit commun est nécessaire, il faut que la voix des Marseillais, qu’ils soient du centre, des quartiers de l’Est ou du Sud, aient le même poids démocratique. Et 88 % des Marseillais y sont favorables », argumente son entourage, contacté par 20 Minutes.

A l’opposé du spectre, le maire du 3e secteur de Marseille, Bruno Gilles (Horizons), se dit « opposé sur le fond et sur la forme » au texte, pour des raisons en partie commune à la droite parisienne : le calendrier de la réforme, l’absence de remise à plat de la loi, la complexité d’un scrutin qui verrait comme à Lyon, les Marseillais voter dans trois urnes différentes. « Nous n’avons pas à payer les pots cassés du deal Macron-Dati », tacle-t-il. Martine Vassal (LR) serait sur la même ligne, selon son entourage, contacté par 20 Minutes, de même que Renaud Muselier (Renaissance), président de la région Paca. Tous ont dans le viseur, sans forcément le dire publiquement, le Rassemblement national, qui profiterait de la réforme en grignotant plus de sièges au conseil municipal.

Notre dossier sur les élections municipales 2026

Le texte doit être examiné en séance à partir du lundi 7 avril, à moins qu’il ne soit encore repoussé, après l’altercation verbale entre la ministre de la culture Rachida Dati et l’administratrice de l’Assemblée, qui a provoqué la suspension de l’examen de la réforme de l’audiovisuel public. La ministre punirait ainsi malgré elle la candidate aux élections municipales à Paris.