Futur Premier ministre : Xavier Bertrand cultive son fragile statut de presque favori pour Matignon
lobbying•Le nom du président des Hauts-de-France revient avec insistance pour le poste de Premier ministre. Mais, au regard du poids des LR à l’Assemblée, sa nomination est très loin d’être acquise20 Minutes avec AFP
L'essentiel
- Presque silencieux depuis les élections législatives, le président LR des Hauts-de-France laisse parler ses proches pour porter sa candidature à Matignon et mettre en avant son profil de « droite sociale »
- Gérald Darmanin voit en Xavier Bertrand un « homme politique avec une très grande compétence ». La ministre démissionnaire Aurore Bergé l’a cité comme possible « nouveau Premier ministre » qui sache « construire des compromis »
- Sa nomination serait une « aberration » au vu du poids de son parti à l’Assemblée (47 députés sur 577), a par contre cinglé la candidate du Nouveau Front populaire pour Matignon, Lucie Castets
Le bras de fer autour du fauteuil de Premier ministre se poursuit. Alors qu’Emmanuel Macron a choisi de repousser à l’après-JO sa décision pour nommer la tête du gouvernement, un nom circule avec insistance depuis plusieurs jours : celui de Xavier Bertrand.
Presque silencieux depuis les élections législatives, le président LR des Hauts-de-France laisse parler ses proches pour porter sa candidature à Matignon et mettre en avant son profil de « droite sociale » cultivé depuis plus de vingt ans, selon lui au barycentre d’une nouvelle Assemblée pourtant réputée ingouvernable.
Un ancien ministre de Chirac et Sarkozy
Le 9 juillet, au surlendemain du deuxième tour des élections législatives, Xavier Bertrand avait appelé à « un gouvernement d’urgence nationale, avec Les Républicains, les indépendants, le camp de M. Macron et peut-être aussi des hommes et des femmes de bonne volonté qui veulent clairement que notre pays ne soit pas paralysé à l’Assemblée ». Pour diriger cet attelage, sa propre candidature devait s’imposer.
Si depuis cette sortie, l’ancien ministre de Jacques Chirac et de Nicolas Sarkozy fuit les micros, son entourage parle à sa place. « Il est prêt à relever le défi, il est préparé », a ainsi assuré un de ses proches, cité mardi par le Figaro Magazine, faisant écho à un concert de louanges commencé fin juillet.
« Il a un très bon profil dans le contexte », a salué l’ancien patron de la droite Jean-François Copé, quand le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin voit en lui un « homme politique avec une très grande compétence », qui « peut servir grandement la France ». La ministre démissionnaire Aurore Bergé – autrefois sarkozyste – l’a encore cité dimanche comme possible « nouveau Premier ministre » qui sache « construire des compromis ».
Au même moment, Xavier Bertrand s’affichait sur une terrasse courue du Tout-Paris politique avec Bertrand Pancher, ex-député dont l’influence est réputée intacte auprès des parlementaires du groupe indépendant Liot, manière de montrer sa capacité à rassembler les « bonnes volontés » pour tenter de bâtir une majorité, fût-elle relative.
Une stratégie parfois déroutante
Une nomination à Matignon viendrait consacrer la carrière singulière de Xavier Bertrand, agent d’assurances d’une sous-préfecture de l’Aisne, Saint-Quentin, qui a gravi un à un les échelons. L’ancien maire de cette ville durement touchée par le déclin industriel s’est également démarqué par son positionnement politique, héraut autoproclamé d’une « droite sociale » cultivée par ses expériences aux ministères de la Santé et du Travail.
Mais la stratégie de celui qui fêtera ses 60 ans en mars a également parfois dérouté, quitte à apparaître marginalisé. Après l’élection d’Emmanuel Macron en 2017, il se projette en premier opposant de ce nouveau pouvoir, sans vraiment parvenir à s’imposer. Six mois plus tard, il claque la porte de son parti lorsque les militants républicains portent à sa tête Laurent Wauquiez, à qui il reproche des positions droitières. Mais il consent quatre ans plus tard à reprendre sa carte pour concourir à la primaire de la droite en vue de la présidentielle de 2022… à laquelle il finit quatrième.
Le gros tacle de Castets
Partisan du « non » au Traité de Maastricht de 1992, puis favorable à la Constitution européenne soumise au référendum en 2005, Xavier Bertrand avait ardemment combattu le mariage pour tous en 2013. Il résume désormais sa philosophie par une double injonction : « Plus de sécurité, moins d’immigration », tout en prônant un abaissement des impôts de production.
Son statut de presque favori pour Matignon pourrait pourtant paradoxalement réduire ses chances, selon la tradition macronienne de « toujours surprendre » quant au choix du Premier ministre. L’équation politique de la nouvelle Assemblée semble par ailleurs ardue à résoudre. Sa nomination serait une « aberration » au vu du poids de son parti à l’Assemblée (47 députés sur 577), a d’ailleurs déjà cinglé la candidate du Nouveau Front populaire pour Matignon, Lucie Castets, dans le quotidien Sud Ouest. A Paris, une fumée blanche est donc encore loin de flotter au-dessus du 57 rue de Varenne.