Législatives 2024 : Comment le NFP a sélectionné les « swing circos » qui pourraient tout faire « basculer »
Objectif second tour•Le Nouveau Front populaire veut se concentrer sur une centaine de circonscriptions qui peuvent être gagnées et ainsi influencer les résultats du second tour des élections législatives, ce dimancheDiane Regny
L'essentiel
- A quelques jours du second tour des législatives, le Nouveau Front populaire a lancé l’initiative « 5 jours pour gagner ».
- La militante féministe Caroline de Haas explique que cent circonscriptions peuvent tout changer et « faire basculer l’élection ».
- Mais comment ces circonscriptions ont-elles été choisies ? 20 Minutes s’est penché sur la question.
A l’approche du second tour des législatives, chaque camp s’affaire afin de peser de tout son poids sur cette campagne éclair. Dans l’espoir d’envoyer « un maximum de députés de gauche à l’Assemblée », le Nouveau Front populaire a lancé l’initiative « 5 jours pour gagner ». Site sur lequel une carte de toutes les circonscriptions – de celles déjà perdues à celles déjà gagnées – s’affiche accompagnée de conseils pour soutenir l’alliance de gauche.
L’équipe qui a participé à l’élaboration de cette carte a mis en exergue (en orange sanguine) une centaine de circonscriptions clefs, qui peuvent « faire basculer l’élection », comme l’explique la militante féministe Caroline de Haas dans un vocal intégré à la page Web. « Ce sont des circos où la mobilisation peut faire la différence et où l’écart de voix est rattrapable au second tour », explique Elliot Lepers, consultant en stratégie qui a participé à l’élaboration de la carte. « Ce sont les circonscriptions prioritaires, l’écart y est faible et mobiliser des volontaires peut faire toute la différence », abonde Lou Welgryn, analyste de données.
Des « swing circos » basées sur des modèles
L’équipe de « Cinq jours pour gagner » compare ces circonscriptions aux « swing states » américains. Tout comme aux Etats-Unis où ces Etats disputés peuvent faire pencher la balance d’un côté comme de l’autre, ces circonscriptions peuvent, elles aussi, basculer. « Il y a de fortes incertitudes sur le gagnant dans ces "swing circonscriptions" », explique Alessio Motta. Cet enseignant-chercheur en science politique et consultant sur les mobilisations collectives et électorales a fourni l’un des modèles utilisé pour sélectionner les circonscriptions prioritaires pour le NFP.
« J’ai créé un modèle qui tente de projeter ce que peuvent être les résultats en se basant sur ceux des européennes de cette année, les résultats des précédentes législatives de 2012, 2017 et 2022 dans chaque circonscription ainsi que les caractéristiques et les alliances locales », explique-t-il. Son modèle, ainsi que d’autres, ont ensuite été agrégés. « Tous les modèles sont faux indépendamment mais quand on les cumule, on observe un faisceau d’indices qui permet de dégager une tendance », explique Elliot Lepers.
Passer « à la main »
Fort de ces tendances statistiques, l’équipe a ensuite analysé chacun des scénarios à la main. « On peut faire mentir les pronostics. Statistiquement, une circonscription comme celle de François Ruffin [1re circonscription de la Somme] est donnée perdante mais c’est une figure connue, le scrutin législatif est différent du scrutin européen et il y a une implantation locale et un travail de terrain », détaille Elliot Lepers. Pour toutes ces raisons, la 1re circonscription de la Somme est considérée par le NFP comme prioritaire, malgré le ballottage défavorable du député sortant.
Passer « à la main » après les modèles, circo par circo, permet d’affiner les résultats en « tenant compte des spécificités » et des « réalités de terrain », confirme Lou Welgryn. « Ce sont des situations réelles et complexes, le modèle ne peut pas être entièrement mathématique », glisse aussi Alessio Motta alors que les derniers désistements continuent à être annoncés au compte-goutte ce mardi, altérant encore la donne. Ainsi, pressée de toute part, la ministre des Collectivités territoriales, Dominique Faure, a fini par renoncer à se présenter au second tour, dans la 10e circonscription de Haute-Garonne. Elle était arrivée troisième, derrière le candidat du Nouveau Front populaire Jacques Oberti (36,2 %) et celle du RN Caroline Falgas-Colomina (30,3 %).
Grâce à ce travail d’orfèvre, l’alliance de gauche espère arracher un maximum de siège. Mais aussi « empêcher l’extrême droite d’obtenir trop de sièges », souligne Alessio Motta, alors que le Rassemblement national pourrait bien obtenir une majorité absolue à l’issue de ce scrutin précipité.