Gabriel Attal : Pourquoi le Premier ministre plaît-il tant à la droite malgré son passé socialiste ?
GOUVERNEMenT•Passé par le Parti socialiste, le chef du gouvernement plaît à l’électorat de droite, séduit par ses actes d’autorité pris notamment à l’Education nationaleThibaut Le Gal
L'essentiel
- Gabriel Attal fête ses un mois à Matignon ce vendredi.
- Le nouveau Premier ministre, pourtant venu de la gauche, séduit largement l’électorat de droite.
- Malgré ce pouvoir d’attraction, Les Républicains refusent toujours de s’allier avec Emmanuel Macron.
«Hein Snowy, toi aussi, tu l’aimes bien Attal ? » Au marché Jean Zay de Levallois-Perret, dans les Hauts-de-Seine, même les chiens sont priés d’apprécier le Premier ministre. Mais la petite boule de poils blancs en question se contente de grelotter dans les bras de sa maîtresse. Cette dernière se montre heureusement plus loquace. « Gabriel Attal a énormément de talent. Il incarne la nouvelle génération, il ira loin. C’est un charmant jeune homme, rien que de le voir, c’est rafraîchissant », s’enthousiasme Nathalie, 58 ans.
Dans le fief historique de Patrick Balkany (LR), les habitants croisés ce mercredi matin au marché sont tous de droite. Et tous apprécient le chef de gouvernement, pourtant venu de la gauche, qui fête ce vendredi son premier mois à Matignon.
La droite apprécie Attal, pas Macron
« Qu’importe d’où il vienne, il est très bien ce jeune homme. Il est brillant et franc, ce qui n’est pas toujours le cas des politiques… Il a su faire respecter l’autorité lorsqu’il était à l’Education nationale », salue Françoise, une laisse dans chaque main. « Il faut maintenant qu’il se démarque plus de Macron, lui je n’en peux plus », s’agace-t-elle avant de filer avec ses deux chiens en gilet. Même constat pour Bernard, paquet de courses en main. « Notre président louvoie sans arrêt, alors qu’Attal sait ce qu’il veut. Avec les agriculteurs, il a été très clair, sans faire de discours alambiqué. Il me fait penser à Sarkozy, la droite que je ne retrouve plus aujourd’hui. La droite dynamique, en mouvement et audacieuse ». Avant de filer, il ajoute : « Le pays est dans une telle merde qu’il faut des gens comme lui qui avancent et tirent le reste des troupes ».
Ce constat fait dans le microcosme levalloisien se retrouve dans les enquêtes d’opinion au niveau national. Selon un sondage Ifop publié fin janvier, 73 % des Français ayant voté pour Valérie Pécresse (LR) à la dernière présidentielle sont aujourd’hui satisfaits de Gabriel Attal (49 % en moyenne nationale). Les mêmes ne sont en revanche que 29 % à saluer l’action d’Emmanuel Macron (31 % au national). « Attal a énormément séduit à droite par des actes d’autorité : lorsqu’il a décidé d’interdire l’abaya et sur les questions de harcèlement à l’école. Il apparaît comme celui qui fait de bons constats et apporte des réponses concrètes », assure Frédéric Dabi, directeur général Opinion de l’Ifop.
« Il représente le succès »
Cette popularité à droite n’étonne pas les macronistes, même si le passé au Parti socialiste (de 2006 à 2016) du Premier ministre, et son ouverture sur la GPA par exemple, aurait de quoi hérisser le poil d’un électorat plus conservateur. « Il vient de la gauche mais n’a pas particulièrement d’idéologie de gauche. C’est un pragmatique, il plaît par l’aspect libéral du macronisme, le fait qu’il n’ait pas de dogme », insiste une députée macroniste. « Il a 34 ans, il est Premier ministre, il représente le succès, c’est aussi ça qui plaît à une certaine droite », ajoute-t-elle. « Il a assis son autorité avec un discours de bon sens. La droite aime ça, il répond aux problèmes. C’est bien ce qui rend mal à l’aise Les Républicains », raille François Patriat, le patron des sénateurs Renaissance.
NOTRE DOSSIER SUR GABRIEL ATTALMalgré cet attrait du peuple de droite pour le Premier ministre, les responsables LR refusent toujours toute alliance avec la macronie. Eric Ciotti et ses amis sont même plutôt agacés du coup de Trafalgar sur le projet immigration et les nouveaux débauchages de Rachida Dati et Catherine Vautrin, récemment entrées au gouvernement. « Oui, ses mots parlent à la droite. La forme, la posture, le message sont de droite. Mais je n’y crois plus. Aujourd’hui la confiance est rompue, on a vu les actes avec la promesse non tenue sur l’AME », soupire Eric Pauget, député LR des Alpes-Maritimes. D’autres se montrent plus nuancés. « Ce jeune Premier ministre est brillant, on ne va pas lui enlever ça. Il fait gendre idéal, donc je ne suis pas étonné qu’il plaise à la droite », assure une de ses collègues. « Moi, j’attends de voir, je n’ai pas d’a priori, il faut des actes. C’est normal qu’il y ait une tension avec LR, du moins jusqu’aux européennes… » Avant un éventuel rapprochement ?