Réforme des retraites : Un référendum est-il possible ?
Fake Off•L’article 11 de la Constitution de 1958 précise bien qu’un référendum est possible sur « des réformes relatives à la politique économique ou sociale de la nation »Maïwenn Furic
L'essentiel
- Les députés de la Nupes et ceux du Rassemblement national ont fait la demande d’un référendum sur la réforme des retraites. Requête qui sera débattue le 6 février à l’Assemblée nationale.
- Pourtant, Olivier Véran, le porte-parole du gouvernement, a laissé entendre que cela ne serait pas possible : « Les référendums ne sont pas pensés pour poser la question d’une politique économique ».
- Pourtant, l’article 11 de la Constitution de 1958 prévoit bien la possibilité d’un référendum pour ce type de projet de loi, comme l’expliquent des constitutionnalistes à 20 Minutes.
Cette deuxième journée de grève et de mobilisation contre la réforme des retraites a une nouvelle fois montré que les Françaises et les Français sont loin d’y être favorables. Il y a une semaine, un sondage de l’institut Elabe pour BFMTV affirmait que « 72 % des Français rejettent le projet de réforme des retraites ». Parmi ceux-ci, ils sont 40 % à se dire « très opposés » au plan dévoilé.
Il ne s’agit donc pas seulement d’une lubie de l’opposition. En ce sens, une centaine de députés de la Nupes ont déposé, le 24 janvier, une demande de référendum sur le projet de réforme des retraites. Même demande du côté du Rassemblement national.
Si la requête doit être débattue par l’Assemblée le 6 février, le porte-parole du gouvernement Olivier Véran, a déclaré le 22 janvier que les référendums « ne sont pas faits pour poser la question d’une politique économique ». Laissant ainsi entendre que ce ne serait pas possible. Qu’en est-il vraiment ? 20 Minutes fait le point.
FAKE OFF
« Ça n’est jamais arrivé. Si ce n’est jamais arrivé, c’est parce qu’il y a une bonne raison à cela. Les référendums ne sont pas faits pour cela. Les référendums ne sont pas pensés pour poser la question d’une politique économique qui peut être conduite à travers un projet de loi classique », a précisément dit Olivier Véran à l’antenne de BFMTV.
Le porte-parole du gouvernement se trompe. « Il n’y a pas d’obstacle constitutionnel tiré de l’article 11 qui fasse obstacle à un référendum. Les seuls obstacles sont d’ordre politique », affirme Guillaume Tusseau, professeur de droit public à Sciences Po.
Effectivement, la demande de motion référendaire est soumise à l’article 11 de la Constitution de 1958. Il y est écrit : « Le Président de la République, sur proposition du Gouvernement pendant la durée des sessions ou sur proposition conjointe des deux assemblées, publiées au Journal officiel, peut soumettre au référendum tout projet de loi portant sur l’organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique ou sociale de la nation et aux services publics qui y concourent, ou tendant à autoriser la ratification d’un traité qui, sans être contraire à la Constitution, aurait des incidences sur le fonctionnement des institutions. »
Sont bien mentionnées les réformes relatives à la politique économique, qui sont les termes repris par Olivier Véran. C’est la révision du 4 août 1995 qui a permis l’ajout de cette catégorie de textes.
Dominique Rousseau, professeur en droit constitutionnel, explique auprès de 20 Minutes : « D’un point de vue constitutionnel c’est tout à fait possible d’organiser un référendum. Mais comme l’explique la Constitution, c’est sur proposition du gouvernement que le président de la République peut organiser un référendum. » Le 6 février prochain, les députés vont donc seulement faire la demande de ce référendum, mais cela « n’a pas d’effet en droit, seulement d’un point de vue politique ». Et d’ajouter : « Il serait fondé juridiquement que le président décide de l’organiser en se disant que ça a l’air de bloquer dans le pays. » En clair, c’est au bon vouloir d’Emmanuel Macron.
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Il existe tout de même une manière, pour l’opposition, d’imposer le référendum. Pour cela, il faudrait qu’un cinquième des membres du parlement, donc Assemblée nationale et Sénat, signent la demande. Ensuite, cette demande doit recevoir le soutien d’un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales. « Ils l’ont fait contre la privatisation des aéroports de Paris, mais ils n’ont pas obtenu le soutien de suffisamment d’électeurs », précise Dominique Rousseau.
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