pain sur la plancheEntre le gouvernement et l’opposition, la guerre du pain est lancée

Inflation : Les boulangers au cœur d’une nouvelle bataille entre le gouvernement et l'opposition

pain sur la plancheL’exécutif a annoncé de nouvelles mesures pour venir en soutien aux commerces en difficulté, mais l’opposition accuse le gouvernement de « laisser mourir » les boulangers
Thibaut Le Gal

Thibaut Le Gal

L'essentiel

  • De nombreux boulangers ont dénoncé ces dernières semaines l’envolée des prix, et notamment l’augmentation de leurs factures énergétiques, qui les menacent de faillite.
  • Face à la colère, le gouvernement a annoncé plusieurs aides qui permettraient selon lui d’absorber « jusqu’à 40 % » des factures.
  • L’opposition n’a pas attendu longtemps pour s’emparer de la crise et critiqué le manque d’anticipation du président et de ses ministres.

Bagarre autour de la baguette. De nombreux boulangers dénoncent ces dernières semaines l’augmentation sans précédent de leurs factures énergétiques, qui les menacent de faillite. Pour apaiser la colère, le gouvernement a annoncé en début de semaine des mesures de soutien, tandis qu’Emmanuel Macron recevra quelques artisans, ce jeudi, à l’occasion de la cérémonie traditionnelle de la galette des rois à l’Elysée. Mais les oppositions, Rassemblement national en tête, accusent le gouvernement de « laisser mourir » la profession.

Une mobilisation à Paris fin janvier

Touchés depuis plusieurs mois par la hausse des prix du beurre ou de la farine, ces artisans sont aujourd’hui frappés de plein fouet par l’explosion de leurs factures de gaz et d’électricité, parfois multipliées par dix depuis l’automne. Plusieurs boulangers ont déjà été contraints de fermer boutique, à l’image de Julien Bernard-Regnard, à Bourgaltroff (Moselle), le 3 décembre dernier. Ce dernier assure avoir vu sa facture d’électricité mensuelle de TotalEnergies bondir de près de 400 euros à 1.500 euros. « J’étais à des années-lumière de penser qu’une facture d’énergie pouvait me faire fermer mon commerce et arrêter ma vie ici. Il y a des boulangeries qui ferment tous les jours », dit-il à l’AFP.

Selon leur confédération, 80 % d’entre eux ne sont pas éligibles au bouclier tarifaire et pour beaucoup, les mesures de soutien mises en place par le gouvernement - comme le guichet d’aide au paiement des factures d’électricité ou l'« amortisseur électricité » - sont insuffisantes. Les appels à l’aide, qui se sont multipliés dans les médias, ont aussi été très relayés sur les réseaux sociaux. Plusieurs collectifs ont également indiqué qu’ils participeraient à une grande manifestation organisée le 23 janvier prochain à Paris.

Le gouvernement tente de réagir

Pour déminer le terrain, le gouvernement est monté au front toute la semaine. Mardi, Elisabeth Borne a annoncé que les PME (et notamment les 33.000 boulangers de France) pourront « demander le report du paiement de leurs impôts et cotisations sociales » afin de soulager leur trésorerie. La Première ministre souhaite également que les petits commerçants puissent étaler la paiement des factures. Dans le même temps, Bruno Le Maire a mis la pression aux fournisseurs d’énergie pour que les boulangers puissent renégocier leurs contrats sans pénalité.

« Le gouvernement continue de mettre en place des mesures d’aides et de protection, comme nous l’avons toujours fait dans cette crise de l’énergie et de l’inflation », défend Priscia Thevenot, députée des Hauts-de-Seine. Cet ensemble d’aides permettrait, selon l’exécutif, de prendre en charge « jusqu’à 40 % » des factures. « Le problème, c’est que trop peu d’entreprises éligibles aux aides les demandent, poursuit la porte-parole de Renaissance. Dans ce contexte angoissant, il est parfois difficile de s’y retrouver. C’est pourquoi nous devons continuer la pédagogie ». Le ministre de l’Economie a, par ailleurs, balayé l’hypothèse d’une explosion de faillites, évoquant plutôt « quelques centaines de boulangers en réelle difficulté ».

Les boulangers convoités par les oppositions

Mais l’exécutif a vivement été critiqué par les oppositions. « Avec ses effets d’annonce, le gouvernement n’a pas pris en compte la gravité de la situation. Emmanuel Macron ne peut pas se réjouir de l’inscription de la baguette au patrimoine de l’Unesco et laisser en même temps mourir nos boulangers », tacle Gilles Pennelle, directeur général du Rassemblement national. Très actif, le RN veut faire de cette crise « un symbole » de la supposée déconnexion des macronistes. Le président Jordan Bardella, qui sera en déplacement sur le sujet ce jeudi dans la Marne, a adressé ce mardi une lettre aux boulangers sur Twitter pour défendre notamment la sortie du marché européen de l’énergie.

Mais la gauche et la droite sont également montées au créneau ces dernières heures. « La déconnexion est la marque de fabrique de ce gouvernement ! Ils ne savent pas anticiper, donnent le sentiment d’être sourds et laissent les Français dans l’angoisse », a fustigé ce mercredi sur Twitter, le président des Hauts-de-France Xavier Bertrand.

Dans le contexte d’inflation, cette bataille autour des boulangeries n’est pas anodine. Les responsables politiques savent bien qu’elles occupent une place toute particulière dans la société française et peuvent parfois se muer en relais d’opinion. Bruno Le Maire l’a lui même reconnu ce lundi dans l’émission Quotidien sur TMC. « Le boulanger, c’est notre vie quotidienne. C’est le seul commerce de proximité dans des communes où il y a 200, 250, 600 habitants. »