Gouvernement : Trois conseils pour profiter de ses vacances quand on est ministre
FULL TIME JOB•« 20 Minutes » a demandé à d’anciens ministres leurs conseils pour profiter au mieux de la période estivaleThibaut Le Gal
L'essentiel
- Après une année intense, les membres du gouvernement Borne vont pouvoir s’offrir quelques jours de répit.
- Mais pendant leurs congés, les ministres ne coupent pas vraiment avec l’actualité et leur ministère.
- Comment alors profiter des vacances ? On a demandé à d’anciens membres du gouvernement ce qu’ils faisaient pour profiter au mieux de leurs congés.
Après une année bien chargée, c’est l’heure de souffler. Elisabeth Borne et ses ministres vont pouvoir s’offrir quelques jours de répit à la fin de la session parlementaire ce dimanche soir. Deux petites semaines de vacances pour se mettre au vert et tenter de décrocher un peu avant la rentrée, prévue le 24 août. Mais les ministres profitent-ils vraiment de leurs congés d’été ? On a demandé quelques conseils à d’anciens membres de gouvernement.
1. Décompresser en famille…
La première chose à faire, bien sûr, c’est de se vider la tête. « Vous n’avez pas vraiment le temps de souffler, mais ces quelques jours permettent quand même de recharger les batteries. C’est le moment où vous pouvez changer d’air, prendre le soleil, faire quelques balades, et profiter de votre famille », assure Patrick Kanner, ancien ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports sous François Hollande. « La fonction ministérielle n’est pas vraiment compatible avec celle de parent. Donc ça permet de s’occuper de ses enfants, de retrouver pour quelques jours le rythme d’une famille normale, loin des journées intenses des ministères, confirme Corinne Lepage, ministre de l’Environnement de 1995 à 1997. C’est ce changement de rythme dont on profite le plus. Car la charge mentale est, elle, toujours présente. Même en vacances, les emmerdes ne s’arrêtent pas ».
Patrick Kanner, désormais patron des sénateurs PS, livre une petite astuce aux ministres du gouvernement Borne : « J’avais négocié pour ne pas avoir d’officiers de sécurité sur la serviette de plage à mes côtés, ma femme ne l’aurait pas supporté… Mais j’avais toujours mon téléphone sur moi, même en maillot. En réalité, le seul moment où vous êtes vraiment tranquille car injoignable, c’est dans l’eau. Le bain de mer est l’endroit le plus tranquille qui soit… »
2… tout en restant connecté
Car un ministre, ça ne décroche jamais totalement. Dans une circulaire envoyée à ses troupes, Elisabeth Borne a d’ailleurs rappelé quelques consignes à respecter : communiquer dates et lieux de villégiature pour être joignable à tout moment « en cas de nécessité » et transmettre les noms, qualités et coordonnées des personnes chargées de la permanence au ministère. « Quand vous êtes ministre, vous ne cessez jamais de l’être, reprend Corinne Lepage. J’avais à l’époque la gestion de tous les risques industriels ou écologiques, donc mon tel avec moi partout. Ça n’empêche pas de vivre, mais vous avez cette tension permanente ».
La déconnexion n’est donc pas vraiment à l’agenda. Patrick Kanner se souvient qu’il faisait un point chaque matin et chaque soir avec ses équipes, vérifiait régulièrement ses mails et les sites d’information. « On reste complètement addict, mais décrocher de l’actualité serait une faute. Le téléphone, c’est un lien direct avec le pouvoir, mais aussi avec les médias, qui continuent de vous solliciter sur telle ou telle affaire. Même en bermuda, vous restez toujours ministre », sourit-il.
Roger Karoutchi, secrétaire d’État chargé des Relations avec le Parlement de 2007 à 2009, confirme. « En réalité, vous n’êtes pas vraiment en vacances, il faut être joignable à la minute ! Surtout pour les ministères régaliens. Chaque semaine, il y a un événement, un drame, un incendie, un crime. Mais ce n’est pas non plus la mine ! Je me souviens que Sarkozy nous avait dit : " être ministre, c’est un bonheur tellement fort qu’il n’y a pas de fatigue " », s’amuse le sénateur Les Républicains.
3. Etre prêt à réagir vite (et à enlever le polo)
L’été n’est ainsi jamais de tout repos. Et pour les ministres, l’important est d’être sur le qui-vive. « A l’été 2008, j’étais au Maroc. Mais je reçois un coup de fil, on me dit " voilà, il faut rentrer ". Le lendemain, on avait une réunion interministérielle sur les inquiétudes liées à Lehman Brothers et la crise financière. Je n’avais pas le choix. Mais il n’y a pas de déception sur le moment car quand vous êtes ministre, il y a une forme d’adrénaline, vous êtes conscient des responsabilités qui pèsent sur vos épaules », assure l’ex-secrétaire d’Etat chargé du commerce et des entreprises Hervé Novelli (2007-2010).
Même si elle est courte, la période estivale peut par ailleurs être périlleuse. Tous ont en mémoire le sort de Jean-François Mattei à l’été 2003. L’interview surréaliste du ministre de la Santé, répondant en polo depuis sa maison du Var alors que la canicule faisait déjà de nombreux morts, lui avait coûté son poste. « Ça avait beaucoup marqué l’opinion et brisé sa carrière. Il faut faire attention. Et quoi qu’il arrive, ne pas renoncer au costume dans les médias », souffle Roger Karoutchi. Le sénateur, qui ne prend lui jamais de vacances, ajoute : « La période est tellement tendue. Je ne pense pas être un prophète de malheur en disant aux ministres qu’ils doivent tout faire pour prendre le maximum d’énergie. Car à la rentrée, ils auront une session parlementaire très longue et difficile… »